Auteur Sujet: abattoir  (Lu 39124 fois)

doppelganger

  • Hastur Vomitron
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abattoir « Réponse #90 le: septembre 12, 2008, 13:22:42 pm »
Pas dans le cul la pompe dans l'artere du cou.Il enlève le sang et le remplace par un produit qui ralenti la décomposition des organes.

Enfin bon après ya des types pas net qui tuut les morts donc tout est possible.

konsstrukt

  • Vicomte des Abysses
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abattoir « Réponse #91 le: septembre 12, 2008, 13:55:04 pm »
(bon. mais sinon, pompe, ça veut dire, en gros, apparat, protocole. voir en grandes pompes, par exemple. rien à voir avec un type qui a des godasses géantes. et l'art pompier ne représente pas forcément des casernes. donc, le psychopompe, si on veut, c'est l'ambassadeur des âmes)

doppelganger

  • Hastur Vomitron
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abattoir « Réponse #92 le: septembre 12, 2008, 13:58:56 pm »
Voui.
Voir post précedent. smiley22  smiley23

konsstrukt

  • Vicomte des Abysses
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abattoir « Réponse #93 le: septembre 12, 2008, 14:18:07 pm »
ouioui, c'était pour ajouter un peu de précision cappellovicesque.

!dje!

  • Nyarlathotep Fongus
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abattoir « Réponse #94 le: septembre 12, 2008, 14:49:31 pm »
mais naaaaaaaaaaaaaan !
on croque l'orteil pour voir si le gars est mort : croque mort
mais imaginais que sur un champ de bataille le gars ai plus de bras ni de jambes ! comment faire pour savoir s'il est mort ou vif ??
voilà mon explication de "pompes funèbres" cqfd
In Girum Imus Nocte Et Consumimur Igni.

sqaw lee

  • Velextrut sarcoma
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abattoir « Réponse #95 le: septembre 12, 2008, 16:01:59 pm »
bin croque moignons...

Le caca ne fait pas tourner la terre, mais rend l'amour plus agréable !
Poil pour tous et tous à poil !
J'ai fait kk à ikea !
Les rêves sont au cerveau ce que le caca est aux intestins !
ça a l'air bien pour ceux qui aime bien!

konsstrukt

  • Vicomte des Abysses
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abattoir « Réponse #96 le: septembre 15, 2008, 07:47:20 am »
la station-service est ouverte de six heures à vingt-trois heures
à midi
la boutique se remplit de travailleurs qui viennent casser la croûte
il y a les mecs de la dde
habillés en orange
il y a des vrp en costards-cravate
il y a les maçons du chantier d’à-côté
et de temps en temps un type qui ne parle à personne
et à qui personne ne parle
qui déambule parmi les rayons
il regarde les marques
et les prix des produits
il écoute des morceaux de conversation
il n’achète rien et il repart cinq ou dix minutes après
pour lui c’est cinq ou dix minutes de gagnées
sur l’extérieur

***

dans la nuit de mardi à mercredi
evelyne (surnommée eve par ses copines)
est sorti plus tard que d’habitude du macdo de la zone commerciale des orchidées
elle faisait la fermeture avec ses collègues
mais son ex l’a appelée sur son portable
pendant qu’elle discutait avec lui
ses collègues lui ont fait au revoir de la main et sont partis
elle est resté au téléphone pendant vingt-cinq minutes
et après elle a traversé les parkings déserts
en espérant ne pas rater le dernier tram
elle s’est fait violer par trois mecs qui conduisaient une renault seize
devant darty
ils lui ont tabassé la gueule
et l’ont laissé là à sangloter et à saigner de partout
elle n’a pas porté plainte
parce que l’un des mecs elle le reconnaissait
c’était un copain de son frère
et elle ne voulait pas d’histoire

***

paul gardère et jean-louis antoniazzi travaillent ensemble pour la troisième fois
paul est âgé de trente-sept ans et il est marié
il a une fille de treize ans et un garçon de sept
il a passé six ans en prison
il a attaqué un fourgon blindé en association avec deux autres malfaiteurs
il est sorti il y a un an
il dit qu’il a besoin d’argent parce qu’il ne veut pas bosser toute sa vie comme un con
jean-louis est âgé de trente-quatre ans
il est recherché pour un meurtre commis il y a deux ans
une femme de soixante-treize ans étranglée avec du fil de fer et cambriolée
il est divorcé
il n’a pas d’enfant
il a besoin d’argent pour quitter la france
ils pensent qu’après encore trois ou quatre boulots dans ce genre ils pourront se retirer du business
ils disent business quand ils parlent de leur métier
ils emploient ce mot entre eux ou bien quand ils en parlent à des tiers
ou encore pour draguer des filles

***

le deux mars deux mille six
un corps décomposé
par un séjour d’une semaine dans l’eau
est remonté
par des policiers
qui draguaient la garonne
pour un autre motif
le trois mars deux mille six
le médecin légiste
déclare que la cause
probable du décès
est une surdose d’héroïne
le cinq mars deux mille six
l’identité judiciaire
de bordeaux
détermine que le cadavre
est celui d’aurore pelletier
en fugue depuis
le quinze septembre deux mille cinq
et recherchée
pour homicide
l’enquête est conclue
le six mars deux mille six
elle ne permet pas
de savoir si
la noyade
est accidentelle ou
criminelle
ni de déterminer si
aurore pelletier
était vivante ou
morte lorsque
elle est tombée dans la garonne
aucune procédure
supplémentaire n’est envisagée et le corps
est rendu à la famille

***

cynthia mouzier constate que son mari est mort d’une crise cardiaque
auparavant il effectuait des travaux de plomberie dans la cuisine
il est affalé dans une posture grotesque
des outils sont dispersés tout autour de lui
son visage exprime une souffrance intense
cynthia traverse un moment d’hébétude
elle monte les escaliers qui mènent à la chambre
elle jette un regard inexpressif au téléphone
elle prend le couvre-lit en laine
elle redescend
elle s’en sert pour dissimuler grossièrement le cadavre
elle décide ensuite de se doucher après quoi elle remonte enfiler une robe de chambre
ensuite elle redescend s’installer sur le canapé
elle y reste plusieurs heures
son visage traduit tantôt l’accablement tantôt l’inquiétude et tantôt l’hésitation
à vingt-deux heure elle constate que le téléviseur est resté allumé
elle tend le bras vers la télécommande posée sur la table basse mais se ravise
elle regarde la télé pendant un moment
elle zappe d’une chaîne à l’autre
elle a les yeux dans le vague
elle se pend dans la chambre un peu après une heure du matin
parce que c’est la seule pièce traversée par une poutre
elle avait cinquante-deux ans
son mari avait cinquante-quatre

konsstrukt

  • Vicomte des Abysses
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abattoir « Réponse #97 le: septembre 22, 2008, 09:59:56 am »
un texte à moi à paraître dans le prochain numéro de la revue chimères. je suis fier comme un pou. si, si.
sinon, trois nouvelles à télécharger sur un nouveau site, les nouvelles sont pas neuves, mais le site oui, ça peut l'aider de le faire mousser un peu.

- goule : c'est le début, un peu remanié, de mon roman raté ghl :
http://www.nousvelles.com/nouvelle.php?id=712&cat=3

- pute : c'est la moitié, un peu remaniée, de mon roman réussi pute :
http://www.nousvelles.com/nouvelle.php?id=610&cat=3

- ma soeur : un texte court et très sordide qui était peut-être passé inaperçu à l'époque :
http://www.nousvelles.com/nouvelle.php?id=696&cat=3

***

la chambre est assez spacieuse
les murs sont blancs
le sol est recouvert d’une moquette bordeaux à poils ras
un lit double flanqué de deux tables de nuit et deux veilleuses
une armoire
une table
deux chaises
des rideaux blancs à la fenêtre
une cabine en plastique qui regroupe douche et WC
un tableau qui représente une scène de pèche en haute mer accroché à l’un des murs
et c’est tout.
il ouvre la fenêtre et regarde un moment le fleuve
de l’autre côté du fleuve il y a
la route
les arbres qui bordent le route
une ligne d’immeubles
la gare invisible derrière les immeubles
dans un de ces immeubles vivait un copain à lui perdu de vue depuis le lycée
il lève les yeux
il considère le ciel lumineux et sans un seul nuage et puis son regard revient au fleuve
sur la droite le fleuve passe sous le pont qui relie la gare au centre-ville
après un virage il disparaît à la vue
sur la gauche on le voit couler jusqu’à la route départementale
il est bleu terne avec quelques zébrures marron
des deux côtés de la berge il y a des pontons de bois à intervalles réguliers
parfois des barques sont attachées aux pontons
il ferme la fenêtre et va s’étendre sur le lit
il allume la télé
il zappe
il s’attarde un instant sur une chaîne de cul où les acteurs parlent allemand
il puis un moment plus long sur mcm

***

dans le centre-ville des choses ont changé et d’autres non
la maison de la presse est toujours à la même place
le propriétaire a des cheveux blancs et presque la même tête
il semble déprimé.
il semblait déjà déprimé à l’époque
la boulangerie d’en face a été remplacée par un magasin de fringues techno
la vitrine de l’encadreur est passée au blanc d’espagne et il y a une affiche « à vendre »
pareil pour la boucherie charcuterie
en contrebas il y a le quartier de la glacière
à l’époque la glacière c’était la zone
les enfants y allaient prudemment
ils se racontaient des histoires de baston entre arabes et gitans
aujourd’hui il y a beaucoup de touristes et il fait très chaud
aux coins des ruelles réhabilitées des hauts-parleur diffusent la nouvelle scène française
il y a des boutiques de souvenirs
des galeries ringardes
des bars lounge
des boutiques de fringues branchées avec show-room
des restaurants à fooding
encore en contrebas il y a les quais
sur les quais tout est pareil qu’avant
un restaurant à poisson après l’autre
peut-être certains ont changé
peut-être pas
ça sent la vase
des touristes âgés lisent les menus

***

la vieille chaîne hi-fi prend la poussière
les trente-trois tours
mireille mathieu
michelle torr
les reprises des beatles et de simon and garfunkel par des orchestres de bal
sardou
carlos
le premier épisode de goldorak raconté et mis en musique
nana mouskouri
petit papa noël chanté par Tino Rossi
la chanson de rox et roucky interprétée par douchka
le générique d’albator
des tas d’autres
poussiéreux

***

la sortie de la gare est encombrée par des travaux
des gens se pressent
le tram charge une grosse brassée de voyageurs
des flics patrouillent par groupes de trois
un crs isolé discute avec un vigile privé
des ouvriers fument des clopes
il fait chaud
deux punks font la manche
il y a un kébab
et un bar à putes
(le nirvana, ouvert de quinze heures à dix-neuf heures, et puis à partir de vingt-deux heures)
des sex-shops et des taxi-phones
un taggueur
en train de repeindre entièrement à la bombe noire le rideau de fer d’un sex-shop encore fermé
le taggueur porte un blouson de skinhead et un masque à gaz
il a les cheveux mi-longs et ’accorde pas la moindre attention aux passants

***

un hôtel à vingt euros la nuit
la chambre est miteuse
un lit à une place
une couverture marron et rêche comme dans les internats
une fenêtre de petite taille qui donne sur une puît de lumière
il est rempli d’ordures et de sacs-poubelle où les ordures s’accumulent
des chiottes et un lavabo séparés du reste de la chambre par un paravent
une penderie métallique à roulettes
pas de table ni de télé

konsstrukt

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abattoir « Réponse #98 le: septembre 29, 2008, 07:42:08 am »
la rue sainte-catherine est soi-disant la plus longue rue piétonne de france
elle est légèrement en pente
on peut voir la foule se masser et progresser lentement sur un kilomètre et demi
entrant dans les magasins et sortant des magasins
stationnant aux abords de macdo et de la brioche dorée
esquivant les enquêteurs des instituts de sondages ou les quêteurs affiliés à la croix rouge internationale
contournant les sdf qui font la manche
des policiers arrêtent un type qui joue de la guitare devant go sport avec une casquette posée devant lui
à trente mètres de là deux types équipés de marteaux-piqueurs défoncent la chaussée

***

il y a plusieurs sortes de personnes qui vont au nirvana
des types jeunes et discrets
des vieux habillés comme des prolos
des cadres qui ont du temps à tuer entre deux tgv
des quadragénaires à l’air triste et ordinaire
il y a environ une vingtaine de clients par jour
après minuit ce sont surtout les habitués

***

josé grimal est séquestré pendant plus de quatre heures
il traverse des périodes d’inconscience et des périodes de conscience hébétée
il ne cherche plus à parler
il se laisse aller à pleurer et à gémir un peu
son visage et son cou sont couverts de sang
son tee-shirt est emplâtré de vomi
son œil gauche est enflé
la tuméfaction descend jusqu’à la moitié de la joue et prend une teinte violacée
ses ravisseurs sont installés dans la kitchenette
ils jouent à la bataille corse en buvant des bières et en racontant des conneries
ils se marrent bien
vers deux heures du matin l’un des deux types reçoit un coup de téléphone
il va s’enfermer dans la salle de bain pour discuter
pendant ce temps l’autre regarde josé avec un visage inexpressif
en sortant de salle de bain le type dit y’a céline qui a appelé et ils veulent qu’on les rejoigne

***

la première famille (la famille « A ») prend sa voiture
une twingo de couleur vert d’eau
la deuxième famille (la famille « B ») prend aussi sa voiture
un renault espace de couleur gris métallisé
le trajet va de la maison « A » à la maison « B »
la distance entre les deux maisons est inférieure à deux kilomètres
les enfants des deux familles confondues prennent place dans la voiture « B »
la voiture « A » part en premier et la voiture « B » la suit de près
d’autres voitures s’intercalent comme il arrive souvent
à un moment un automobiliste fait un appel de phare à la voiture « A »
malgré la faible distance restant à parcourir sur la route départementale
le conducteur choisir d’arrêter la voiture et de voir ce qui ne va pas
pour une raison demeurée inconnue
l’un des enfants sort de la voiture
il s’agit de l’enfant « B »
il se fait faucher par un automobiliste qui appelle aussitôt les pompiers
l’accident se déroule à quelque distance
de telle sorte que les occupants de la voiture « A » ne s’en rendent pas compte immédiatement
et ne réagissent qu’à la présence des pompiers
l’enfant est mort
et voilà

***

l’odeur des gens normaux
dans le bus
me donne envie de vomir

konsstrukt

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abattoir « Réponse #99 le: septembre 29, 2008, 07:42:14 am »
la rue sainte-catherine est soi-disant la plus longue rue piétonne de france
elle est légèrement en pente
on peut voir la foule se masser et progresser lentement sur un kilomètre et demi
entrant dans les magasins et sortant des magasins
stationnant aux abords de macdo et de la brioche dorée
esquivant les enquêteurs des instituts de sondages ou les quêteurs affiliés à la croix rouge internationale
contournant les sdf qui font la manche
des policiers arrêtent un type qui joue de la guitare devant go sport avec une casquette posée devant lui
à trente mètres de là deux types équipés de marteaux-piqueurs défoncent la chaussée

***

il y a plusieurs sortes de personnes qui vont au nirvana
des types jeunes et discrets
des vieux habillés comme des prolos
des cadres qui ont du temps à tuer entre deux tgv
des quadragénaires à l’air triste et ordinaire
il y a environ une vingtaine de clients par jour
après minuit ce sont surtout les habitués

***

josé grimal est séquestré pendant plus de quatre heures
il traverse des périodes d’inconscience et des périodes de conscience hébétée
il ne cherche plus à parler
il se laisse aller à pleurer et à gémir un peu
son visage et son cou sont couverts de sang
son tee-shirt est emplâtré de vomi
son œil gauche est enflé
la tuméfaction descend jusqu’à la moitié de la joue et prend une teinte violacée
ses ravisseurs sont installés dans la kitchenette
ils jouent à la bataille corse en buvant des bières et en racontant des conneries
ils se marrent bien
vers deux heures du matin l’un des deux types reçoit un coup de téléphone
il va s’enfermer dans la salle de bain pour discuter
pendant ce temps l’autre regarde josé avec un visage inexpressif
en sortant de salle de bain le type dit y’a céline qui a appelé et ils veulent qu’on les rejoigne

***

la première famille (la famille « A ») prend sa voiture
une twingo de couleur vert d’eau
la deuxième famille (la famille « B ») prend aussi sa voiture
un renault espace de couleur gris métallisé
le trajet va de la maison « A » à la maison « B »
la distance entre les deux maisons est inférieure à deux kilomètres
les enfants des deux familles confondues prennent place dans la voiture « B »
la voiture « A » part en premier et la voiture « B » la suit de près
d’autres voitures s’intercalent comme il arrive souvent
à un moment un automobiliste fait un appel de phare à la voiture « A »
malgré la faible distance restant à parcourir sur la route départementale
le conducteur choisir d’arrêter la voiture et de voir ce qui ne va pas
pour une raison demeurée inconnue
l’un des enfants sort de la voiture
il s’agit de l’enfant « B »
il se fait faucher par un automobiliste qui appelle aussitôt les pompiers
l’accident se déroule à quelque distance
de telle sorte que les occupants de la voiture « A » ne s’en rendent pas compte immédiatement
et ne réagissent qu’à la présence des pompiers
l’enfant est mort
et voilà

***

l’odeur des gens normaux
dans le bus
me donne envie de vomir

konsstrukt

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abattoir « Réponse #100 le: octobre 06, 2008, 08:17:27 am »
il y a un type qui prend le métro
avec sa copine
sous le bras les papiers
pour s’engager dans l’armée
le type a l’air simple
les joies simples de ne pas se poser de question
bien manger
bien bander
tuer des types
construire des ponts
l’amour se lit dans ses yeux
j’ai peur de lui

***

le mercredi je quitte la maison avant huit heures
je sors de l’immeuble et de la résidence et je longe la voie rapide
je passe devant un restaurant chinois et une boutique d’articles de golf dont la vitrine est protégée par des plots en ciment décorés d’une scène de golf et une agence d’assurance et une boutique de luminaires et un boutique de hi fi et j’arrive à la zone des supermarchés
darty
bricorama
mac donald’s
flunch
joué club
ils sont tous fermés à part macdo
tous les parkings sont déserts
je me dirige vers carrefour
l’air est froid et impregné d’essence même s’il n’y a presque pas de voiture
les portes tambour tournent lentement
j’entre dans la galerie marchande
il est huit heures et quart
les premiers clients sont déjà là
ce sont tous des vieux et des vieilles
ou alors des couples de vieux
ils sont tous accrochés à leur chariot
ils font comme un entonnoir à la pointe dirigée vers les grilles
tous les regards sont tournés vers elles
les vieux sont tous habillés pareils
avec des pantalons de vieux
et des gilets gris ou marron
un vigile fait les cent pas
il semble perdu dans ses pensées
au milieu de la galerie marchande il y a un kiosque qui appartient à une chaîne de fleuristes
l’employée est déjà là
elle fait la mise en place
elle porte un tablier vert aux couleurs de la société qui l’emploie
de l’autre côté des grilles des employés circulent en portant des paniers
ils mettent des produits en rayon
les caissières sont à leur poste
elles déchirent les rouleaux de pièces
au guichet d’accueil les deux hôtesses discutent
l’une d’elles rie
il est huit heures vingt
la télé se met en route partout dans la galerie
je lève la tête vers le poste le plus proche de moi
le programme dure moins de trois minutes et passe en boucle
il passera en boucle jusqu’à la fermeture
il y a d’abord un écran fixe avec le logo de carrefour
puis les horaires d’ouverture
puis l’heure
puis la météo régionale
et nationale
et européenne
puis les programmes de la télé hretzienne présentés par télé poche
puis une information sportive présentée par l’équipe tv
puis deux pétasses en maillot de bain prises en photo et assorties d’une fiche signalétique qui indique leurs prénoms leur ville d’origine leur cursus et leurs centres d’intéret
puis les programmes de la tnt
toujours présentés par télépoche
et ça revient au début
je détourne les yeux
à huit heures trente les grilles s’ébranlent
le grincement métallique capte l’attention de tout le monde
comme un cargo qui rentre au port
les grilles se lèvent lentement
les vieux s’avencent synchrones vers la bouche
c’est un peu effrayant

***

au rayon électroménager
deux vieux comparent les différents modèles de congélateurs
ils parlent fort
je les écoute

***

il y a des insectes partout sur mon lit
de longs insectes noirs
il y en a qui ont des pattes
il y en a qui ont des ailes
je suis sous la couverture elle est bien bordée
maman me dit de mettre la tête en dessous et que tout ira bien
je bouge les jambes et les pieds pour les faire partir
ils ne partent pas
il y en a partout
ils sont en tas
il y en a aussi au plafond
ils tombent
je ne peux pas mettre la tête sous la couverture sinon je ne les verrai pas
si je ferme les yeux ils vont marcher sur mon visage
maman dort toute nue elle s’en fiche elle des insecte
elle dit qu’elle n’a pas peur d’eux
elle dit que ça la chatouille quand ils marchent sur sa peau
et puis j’ouvre les yeux

***

je porte les assiettes
maman dort déjà
sa tête est sur la table
c’est la fin du journal télévisé
maman ronfle un peu
son verre d’eau est rempli
son tube de cachets est ouvert
sa plaquette de comprimés aussi
il y a du tabac
je dépose les deux assiettes près de la tête de maman
j’éteins la télé
dehors il pleut et j’aime le bruit de la pluie
j’écoute la pluie et je me perds dans mes pensées
et puis je sors de mes rêves
et je vais chercher les fourchettes
les pâtes sont presque prêtes
je termine de mettre la table
maman se réveille
elle se lève pour aller rallumer la télé
elle tousse
elle baille

***

rappel : le konsstrukt big band en live à strasbourg le 12/10. infos :
http://www.konsstrukt.blogspot.com

konsstrukt

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abattoir « Réponse #101 le: octobre 14, 2008, 09:13:01 am »
en pleine nuit des cris me réveillent
je mets un moment à comprendre que c’est la meuf du dessus
qui hurle
et elle hurle un bon moment sans que je puisse me rendormir
elle gueule après quelqu’un
on dirait
je ne comprends pas le sens de ses parôles
à part à plusieurs reprises
« putain mais c’est n’importe quoi »
hurlé d’une voix hystérique et aigüe
et voilà bien une phrase
qui peut vouloir tout dire
j’hésite à me lever
à aller voir si tout va bien
mais j’ai la flemme
je préfère me concentrer
sur la respiration de vanessa
sourde et profonde
et à tenter de me rendormir
au bout d’un long moment
les hurlements s’arrêtent
d’un coup
ça me fait penser à ma mère
qui gueulait comme ça et comme ça je passais des nuits blanches
à espérer qu’elle se taise
enfin
et je me fais aussi la réflexion que cette meuf
qui vit au-dessus de chez nous
je ne connais ni son nom
ni son visage

***

vanessa dort
et moi quelquefois j’ai envie
de me tirer d’ici
pas seulement de cette maison
mais aussi de ce pays
d’aller là où ils sont pauvres
de voir ce que ça fait
de vivre dans un pays ou les putes locales
coûtent moins chez qu’un hamburger français
de voir ce que ça fait
d’avoir abandonné la femme qu’on aime
et l’enfant qu’elle porte
de voir comment on se sent

***

mercredi devant le chu de bordeaux
un drap noué à une grillage portait des revendications
écrites à la peinture fluo
elles émanaient des kiné
jeudi devant le chu de bordeaux
la pluie fine
rendait les déplacements pénibles
le drap n’était plus noué qu’à un point
le reste formait un tas sur le trottoir
et prenait l’humidité
la pluie fine délavait
la peinture fluo

***

sur la barre des tâches ça clignote orange
j’ai sommeil mais je réponds quand même
après tout je suis là pour ça
la discussion s’enlise un peu
je me demande où on va comme ça
je me demande où je vais moi
avec mes phrases toutes faites
lui n’a pas l’air content
ni pas content d’ailleurs
mais plutôt l’air
de se faire chier
on a acheté nos webcam
presque le même jour
je lui montre mes nichons de temps en temps
et il est content

***

on ne sait pas encore
si on va tuer
un mongolien

***

un antipape travaille pour la cia
il s’appelle le pape noir
et c’est lui qui bénit les balles
qui servent à tuer les communistes



***



abattoir c'est terminé.