Un squat historique de Genève évacué
mardi 24 juillet 2007
La police genevoise a procédé, lundi 23 juillet, à l’expulsion des 70
habitants de Rhino (pour « Retour des habitants dans les
immeubles non occupés »), le plus célèbre squat de la ville,
mettant ainsi fin à une expérience de vie alternative qui durait
depuis dix-neuf ans. Les rumeurs d’évacuation s’étaient amplifiées
depuis quelques semaines. Le 10 juillet, les habitants du squat tout
proche de la Tour avaient déjà été délogés, dans des conditions
qui avaient créé la polémique, leurs affaires ayant été envoyées à
la décharge.
Né en réaction à la spéculation immobilière, le mouvement squat
genevois a longtemps bénéficié d’une certaine tolérance de la part
des autorités, mais aussi des propriétaires, qui accordaient parfois
aux occupants des « contrats de confiance » provisoires. Au milieu
des années 1990, Genève était ainsi la ville la plus squattée
d’Europe proportionnellement à sa population. Les bâtiments
occupés offraient divers services : restaurants bon marché,
crèches, bibliothèques, etc. Ils constituaient également de hauts
lieux d’effervescence culturelle : réputé dans toute l’Europe,
accueilli à la Comédie française en décembre dernier, le Teatro
Malandro a par exemple débuté dans un squat, et la salle de
concert de Rhino était considérée comme un lieu de pointe pour les
musiques expérimentales.
L’élection en 2002 d’un nouveau procureur général, M. Daniel
Zappelli, qui s’est lancé dans une politique d’expulsions
systématiques, a mis un terme à cette exception. La droitisation
des mentalités incite la population à s’en tenir à des comparaisons
sommaires entre les honnêtes citoyens, qui triment pour payer un
loyer, et les squatteurs, qui mènent la belle vie — dédouanant au
passage spéculateurs, propriétaires et pouvoirs publics. Ces
derniers se montrent en effet moins empressés à garantir le droit
au logement que le droit de propriété : Genève reste, avec Zurich,
l’une des deux villes les plus chères d’un pays qui a connu une
augmentation des loyers de 20% en dix ans. Le loyer moyen s’y
élève à 1500 francs suisses (900 euros).
Source :
http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2007-07-24-Squat