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Messages - konsstrukt

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Le cerveau / la nuit noire
« le: avril 21, 2008, 08:17:51 am »


(gravure : jean-marc renault - jmr02.blogspot.com)

***

19 : 15

Sur le plan scolaire, j’étais de plus en plus largué. Au collège, j’ai compris que c’était encore plus facile d’être transparent qu’en primaire. Je ne faisais rien en classe, rien en sport, je ne disais rien à personne, j’étais l’homme invisible. De temps en temps, je me faisais emmerder. Les filles se foutaient de moi. Les mecs voulaient se battre avec moi, des fois. C’est arrivé à deux ou trois reprises que j’en corrige certains. Mais je m’en foutais, j’avais mon sanctuaire. Ma mère, elle, ne s’arrangeait pas. Nos seuls contacts étaient désormais sexuels. Je n’avais plus de mère. On faisait l’amour, et elle partait dans ses médicaments. Je m’occupais seul du reste. Le soir elle ne mangeait pas. Elle parlait toute seule, et puis elle s’endormait devant la télé. Moi, je dormais très peu. J’avais toute la nuit pour moi. Je ne pouvais pas aller à mon sanctuaire, mais j’avais de quoi faire dans la maison.
Je m’amusais avec les Big Jims. J’ai commencé à y jouer vers six ou sept ans, et j’ai continué à y jouer jusqu’à la fin. J’en avais cinq. Un esclave, un maître et trois invités. L’esclave était nu. Il obéissait. Il lavait le sol, il faisait à manger, il nettoyait le maître, il le suçait, il s’introduisait des objets dans l’anus pour l’amuser. Il était tout le temps nu. De temps à autre, le maître prêtait l’esclave à ses invités. Les invités se faisaient servir, utilisait l’esclave comme table ou comme chaise, ou bien comme chiotte. Ils chiaient dans sa bouche ouverte. Ils le violaient, et l’esclave remerciait. Ils le fouettaient et le battaient, à tour de rôle. J’avais toutes sortes d’accessoires, des vêtements, des ustensiles de cuisine, une télé, un canapé, etc. Tout était utile. Ils vivaient dans une grande maison. Le maître était policier. L’esclave ne sortait jamais. Il n’avait pas le droit de parler, sauf pour répondre oui ou merci. J’ai appris le mot viol à onze ans. Avant, je disais faire l’amour.

20 : 14

A onze ans, j’ai testé ses médicaments. J’attendais qu’elle dorme sur le canapé. La première fois, j’ai mangé ses somnifères. La sensation était bizarre et agréable. J’avais les jambes molles, je perdais l’équilibre, et je n’arrivais pas à situer l’origine des sons. Ca a duré deux heures. Je ne me suis pas endormi.
J’ai goûté les antidépresseurs et les anxiolytiques. J’ai augmenté les doses et j’ai essayé divers mélanges. J’ai rajouté du cannabis, en ingestion. Un gramme à la fois. Les résultats étaient variables. Je vomissais souvent. Je perdais également souvent conscience. A d’autres reprises, j’ai eu des hallucinations, des transes, et des montées très puissantes.
J’ai pris l’habitude de prendre des médicaments pour jouer aux Big Jims. A un Noël, j’ai eu une maison Barbie. Une maison complète. Big Jim esclave était ligoté, dans la salle de bain, à quatre pattes. Son visage était enfoncé dans la cuvette des toilettes. Les invités se succédaient et le sodomisaient. Big Jim devait remercier, à chaque fois. Quelquefois, il vomissait. D’autres fois, les invités pissaient ou chiaient. Il avait interdiction de bouger la tête, ou de tirer la chasse. Quand il avait faim, il mangeait la merde ou le vomi.
A la fin, je consommais énormément de cachets. Dès que ma mère s’endormait je prenais de tout et j’allais au lit. Je faisais des rêves éveillés d’une grande précision. Tous ceux de mon école mourraient, l’école devenait un charnier. Je violais leurs cadavres. J’arrivais à sentir leurs odeurs. Je dormais et le matin, dès quatre heures, quand je me levais, j’en prenais encore et parfois un peu d’alcool pour faire glisser, et j’allais jouer aux Big Jims, ou avec mes couteaux. C’était bien.
Ma mère ne se rendait compte de rien. Elle en prenait tellement, elle aussi, qu’elle ne remarquait pas qu’il en manquait. Elle en rachetait, simplement. Constamment. Je crois que je serai devenu accroc, si je n’avais pas mis un terme à tout ça, le jour de ma renaissance. Une envie de pureté.

21 : 13

La nuit, il n’y avait pas que les Big Jims. Je ne jouais pas toutes les nuits. Parfois, je me promenais juste dans la maison. Je me postais à la fenêtre, je regardais dehors. Le noir, à la campagne. C’est quelque chose. Les étoiles. Ou bien j’allais voir ma mère dormir. Je la regardais. Je sentais son haleine lourde. Je flairais ses pieds, et son sexe, enveloppés des collants qu’elle ne pensait pas toujours à quitter. Quelquefois, j’avais un couteau à la main. Je restais longtemps comme ça, avec à la main le couteau pris à la cuisine, à méditer sur sa vulnérabilité. Sur le fait que, si je le voulais, en cinq secondes tout serait terminé. Elle se viderait de tout son sang, par sa gorge ouverte, en quelques instants. Elle aurait tout juste assez de temps de comprendre ce qui lui arrive, mais pas assez pour se demander pourquoi je fais une chose pareille. Et elle serait morte. Mais je ne le faisais pas. Je ne voulais pas qu’elle meure. A chaque fois qu’elle se suicidait, ça me rendait fou de chagrin. Je baisais avec elle presque tous les soirs, pour qu’elle ne meure pas. Je ne voulais pas la tuer. Je ne voulais pas qu’elle meure. Pourtant il aurait suffit d’un seul geste. C’était facile. Elle aurait ouvert les yeux. Ils seraient devenus vitreux.
Je marchais dans la maison, dans toutes les pièces, mon couteau à la main. Je me sentais bien, puissant, maître de la situation. Personne ne me voyait, personne n’était conscient de ce que je faisais. Je tournais dans le séjour. Je marchais à pas lents, dans le noir, le couteau pointé devant moi. Je fixais chaque meuble, chaque ombre. J’allais sur le pas de la porte. Parfois, je l’ouvrais pour flairer la nuit. J’imaginais un rôdeur. Je me masturbais à la salle de bain, dans le noir, devant le miroir, le couteau dans mon autre main. Mais ce que je préférais, c’était regarder ma mère dormir.

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Le cerveau / abattoir
« le: avril 16, 2008, 08:47:08 am »
il y a un type qui se dépèche – il fait froid
il cherche son fils – dans la résidence il y a plein de recoins
il le trouve – en compagnie d’un plus grand – vers le local poubelle
entre le local poubelle et les arbres il y a un espace étroit
il y a le ballon
le jeune enfant est à genoux – il suce la bite du plus grand
le plus grand panique – il a le temps de crier – on ne faisait rien de mal – on jouait
le type le dérouille – le plus grand est en sang – il est à moitié assommé
le père demande à son fils de remettre son bonnet
ils rentrent tous les trois
le type ne sait pas comment annoncer ça à sa femme
à mi-chemin il fait une pause et défonce encore l’ado à coups de poings et à coups de pieds

423
Le cerveau / la nuit noire
« le: avril 14, 2008, 09:19:43 am »

(gravure : jean-marc renault - jmr02.blogspot.com)

***

16 : 18

Le premier suicide de ma mère. J’étais dans ma chambre. Je recopiais des livres de mythologie. Je dessinais des temples et des nécropoles. Peut-être, si j’en étais resté à faire des dessins, que ça n’aurait pas été plus loin. Si ma mère, ce jour-là,  ne s’était pas suicidée. J’étais sur mon lit. La porte était ouverte. Je l’ai vue passer ; elle titubait et son visage était très maquillé. Je suis sorti la voir. Elle s’est laissée tomber sur son lit. Elle portait une nuisette. Son visage était barré de traits de rouge à lèvre. Ses yeux étaient dilatés. Une épaisse couche de noir les bavait et débordait tout autour. Elle a eu un rire malade. Sa voix cassée. Je l’ai regardée et j’ai eu très peur. Je lui ai demandé ce qui n’allait pas, mais elle ne comprenait pas ce que je disais. Je ne suis même pas sûr qu’elle me voyait. Je l’ai secouée, elle a rit, je l’ai frappée. Elle a voulu se lever, elle est tombée du lit. J’étais sur elle. Elle m’insultait. Je crois qu’elle parlait à mon père. Ou alors à un autre type, qu’elle venait de quitter. Elle riait. Sa voix était éraillée et méchante. Ses yeux étaient haineux et tristes. Je lui ai cogné la tête contre le sol. Elle riait encore. Je suis sorti. J’ai été dans la forêt. Là, j’ai repensé au sanctuaire. Je me suis dit qu’il fallait que je le construise, que je le fabrique pour de vrai. Un endroit où je pourrais me réfugier. Je savais que si elle ne mourait pas ce jour-là, elle recommencerait. D’un côté, je voulais qu’elle soit morte. De l’autre, l’idée qu’elle ne soit plus là me terrifiait.
Quand je suis rentré à la maison, j’avais accepté son suicide. Tout le scénario. Ce qu’il faudrait faire. Quelles réactions exhiber aux autres. Mais elle était là. Ses poignets bandés. Démaquillée. Elle m’a pris dans ses bras. Pour se faire pardonner, elle m’avait acheté un Big Jim.

17 : 17

Le sanctuaire était circulaire. Les murs étaient faits de pierres empilées, sans mortier. Pour tenir lieu de plafond, j’avais fixé une bâche de plastique bleu, récupérée dans une décharge à la sortie du village. Le sol était de terre. J’avais simplement enlevé les pierres et les herbes et tout ça. Il n’y avait pas de fenêtre, juste une issue étroite. Je devais ramper pour entrer dans le sanctuaire.
Au centre, j’avais creusé une fosse peu profonde. J’y entassais les carcasses d’animaux afin qu’elles pourrissent, aussi bien tous ceux qu’avais chassé avant, que ceux que je chassais depuis. Le sang de mes nouvelles prises me servait à asperger les pierres. Au bout de trois semaines, l’odeur a pris sa texture définitive. Très puissante. Le sanctuaire attirait les mouches, les fourmis et les guêpes. La viande grouillait d’asticots et d’autres larves.
J’ai aussi tapissé les murs de ma merde. Ca a pris du temps. Une couche, puis deux couches. Attendre que ça sèche. Et encore du sang. Et encore de la merde. L’odeur devenait insoutenable. J’ai ajouté mon sang, et mon sperme, et ma pisse. Tout ce qui venait de mon corps. Mon sanctuaire était prêt.
C’est là que je venais penser. Toutes les choses qui me sont passées par la tête, ici. Dans l’obscurité. Avec la lumière bleu nuit qui filtrait parfois par la bâche. Avec le bruit de la pluie. Parfois. Les insectes, autour de moi. Parfois sur moi. La terre, sèche ou humide, quelquefois boueuse. Remplie d’insectes. Les odeurs. La pourriture, si intense qu’il m’arrivait de m’évanouir. La merde, qui suintait quand il faisait humide, qui craquelait quand il faisait sec. L’odeur qui variait avec la météo. La merde que je renouvelais. L’odeur du sang. Je la distinguais aussi, cette nuance. L’odeur de ma pisse, acide, qui me prenait à la gorge, qui ne s’affadissait pas. J’aimais ces odeurs, c’étaient les miennes. J’étais dans ma tête. Toutes les pensées, toutes les sensations qui me venaient. J’avais construit ma tête et j’habitais dedans.

18 : 16

Je m’enfermais dans le sanctuaire tous les mercredis, du matin au soir. Je séchais les cours le matin, presque chaque semaine. Je falsifiais le carnet de correspondance.
Il n’y avait pas beaucoup d’air. Il faisait très froid. L’odeur me remplissait les poumons et le cerveau. Je plaçais des morceaux de viande pourrie sur mon corps. J’étais nu. Les insectes venaient sur moi. Je m’efforçais de ne pas bouger, de ciller le moins possible, de fixer la bâche, de me concentrer sur la pluie quand il y en avait, ou sur le vent, ou sur la lumière, de me focaliser sur les battements de mon cœur, sur mon souffle, sur toutes les odeurs. Quand on est conscient de ses rythmes cardiaque et respiratoire, ils changent, ils se détraquent. Et plus on se concentre, plus ça se détraque.
Je fantasmais beaucoup. Les gens du lycée étaient là. Ils me rouaient de coups, ils violaient ma mère sous mes yeux. Leurs coups me provoquaient des orgasmes honteux, alors je les suppliais d’arrêter et de continuer. Ma mère mourrait. Ils violaient son cadavre. L’homme à la hache venait les tuer tous. Chaque coup de hache vrombissait dans l’air, déplaçaient les odeurs comme l’eau dans une mare. Les corps étaient coupés, démembrés. Le sang chaud giclait sur moi. Ensuite, l’homme à la hache me sodomisait, et au moment le plus fort de ma jouissance, m’arrachait la tête, avec ses deux mains, son sexe planté en moi. Et mes dernières secondes de conscience décuplaient mon orgasme.
Je me masturbais énormément, dans le sanctuaire. J’étouffais. Je manquais d’oxygène. Les orgasmes m’explosaient la tête. Des migraines à vomir, surtout pour les premiers. Et je continuais. Dix, douze fois. J’étais gelé, épuisé jusqu’à l’inconscience. J’étais couvert de sueur. Mes poumons, mon cerveau, étaient remplis d’air malsain. J’étais à moitié évanoui. La pourriture m’intoxiquait. A la fin je jouissais sans éjaculer. J’entrais en transes. J’avais des visions. Ma tête martelait, mon cœur martelait. L’homme en noir. Pour de vrai. Il était là. Anteros.

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Le cerveau / Conjuration
« le: avril 11, 2008, 13:09:12 pm »
y'a un petit côté alain bashung ou rodolphe burger qui n'est pas déplaisant.

425
Le cerveau / abattoir
« le: avril 09, 2008, 09:00:09 am »
la bombe me fascine
surtout le compteur.
je ne peux pas détacher mes yeux du compteur
les trois points d’interrogation rouges que je vais remplacer par des chiffres en appuyant sur des boutons
autour de moi c’est la pénombre.
je suis un peu éclairé par la lueur des points d’interrogation à cristaux liquides
je regarde ma bombe
c’est la mienne
elle est compacte
elle est belle

426
Le cerveau / la nuit noire
« le: avril 07, 2008, 07:43:13 am »
(gravure : jean-marc renault - jmr02.blogspot.com

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13 : 21

Au bout de quelques mois, le chien ne me faisait plus rien. Il s’était totalement décomposé. Il n’en restait que le squelette. Même son odeur, ne me fascinait plus. J’avais dix ans, je venais de passer en CM2, c’était l’été, ma mère travaillait toujours autant ; le soir nous baisions avec le gode-ceinture, elle aimait que je lui enfonce mon doigt dans l’anus pendant que je la pénétrais. J’avais grandi. Je pouvais me tenir à genoux derrière elle, et la prendre en levrette. Ensuite, elle me suçait. Ses yeux étaient toujours fermés. Elle ne me regardait jamais quand nous avions des relations sexuelles. Il faisait chaud. Je passais mes journées dehors, dans la forêt. Si on passe du temps à chercher quelque chose, si on est obsédé par ça, alors on trouve. Moi, ce que je cherchais, c’était des cadavres d’animaux. J’y passais toutes mes journées. Je me levais le matin un peu après que ma mère soit partie travailler. Je connaissais la forêt par cœur. Je connaissais les bons coins. Il y a des endroits où les animaux meurent davantage. Quand j’en trouvais un, un chat par exemple, un gros chat blanc, sans blessure apparente, je le soupesais, je le retournais, j’essayai de comprendre ce qui l’avait tué, une voiture la plupart du temps, quelquefois le poison, rarement, un autre animal. Quand le corps était trop près de la route ou d’une habitation, je l’éloignais. Je le dissimulai un peu. Mais la plupart du temps je ne le déplaçais pas.
Cet été-là, j’ai découvert une douzaine de corps. Chacun perdait de l’intérêt au bout de deux ou trois jours. Je n’étais plus capable de passer des heures à contempler le même animal, comme au début. Il me fallait davantage. A la fin, alors que la rentrée approchait, mes journées se résumaient à un périple fébrile, d’un corps à l’autre, un quart d’heure passé ici, une demi-heure, là. J’étais fiévreux, je n’allais pas bien, ce simulacre de traque, cette compulsion, me pesaient beaucoup.

14 : 20

J’ai encore tenu tout un trimestre, ainsi. Avant de commencer à chasser. Mes première tentatives ont été ratées. Je ne savais pas m’y prendre. J’ai du m’inscrire à la bibliothèque, emprunter des livres, me documenter sur la chasse. Les cadavres ne me manquaient pas. Je préparais mon coup. Ca a duré des mois. Je n’étais pas pressé, je trouvais quelque chose à apprendre. Ma mère a rencontré un mec, à cette époque ; nous ne prenions plus tellement de bains ensemble, et elle dormait souvent chez lui. J’étais livré à moi-même. Ca m’allait bien.
le vingt-et-un mars mille neuf cent quatre-vingt-un, le jour de l’équinoxe, j’ai passé toute la nuit dans la forêt. Bien sûr, je n’avais pas choisi ce jour par hasard. J’ai pris de provision, de l’eau, des vêtements chauds, et je suis parti en début d’après midi. J’ai mis en pratique tout ce que j’avais appris dans les livres. J’ai posé des collets, j’ai disposé des appats à proximité et dans les collets. J’ai placé mes pièces à proximité de la route, et à proximité des maisons ; là où j’aurais le plus de chance d’attraper un chat ou un chien. Ca m’a pris tout l’après-midi. Quand le jour est tombé, et que la température a baissé, j’ai cherché un abris où passer la nuit. J’étais dans un grand état d’excitation. Je suis resté dehors toute la nuit, c’était incroyable. J’écoutais le vent, les voitures qui passaient de temps en temps sur la route. D’autres bruits, que je ne comprenais pas. Je n’avais pas peur. Je faisais corps avec la forêt. L’humidité, le froid ; les odeurs de feuille morte. Je n’ai pas dormi. J’étais attentif à tout, je tremblais d’excitation. Au matin, j’étais gelé et épuisé. J’avais mangé tous mes gateaux, j’avais faim. J’ai fait le tour de mes pièges. Il y avait un gros chat roux, pendu par les pattes avant et le cou. Il miaulait. Il paniquait. Il avait chié sous lui. J’ai brisé son crâne avec une branche.

15 : 19

Entre l’été quatre-vingt-un et l’hiver quatre-vingt-huit, j’ai capturé une ciquantaine d’animaux domestiques. Désormais, j’avais toujours un couteau avec moi. Je l’ai d’abord dissimulé sous le fond de mon cartable, et puis dans une poche de mon sac de collège, dissimulé parmi des vêtements. Il me servait à ouvrir la gorge de animaux que je capturais. Je variais les zones de chasses, pour ne pas me faire prendre. Je crois que jamais personne n’a eu aucun soupçon à mon égard.
Vers l’âge de douze ans, ma mère se suicidait régulièrement (j’y reviendrai), j’avais avec elle mes premières relations sexuelles avec pénétration, et mes fantasmes mêtaient en scène, de façon chaotique, l’homme qui approche et la mort de mes camarades de classe (j’y reviendrai aussi). C’est à cette époque que j’ai eu l’idée de construire mon sanctuaire.
J’ai trouvé le nom quelques temps plus tard. Au début, ça n’était rien d’autre qu’une planque, dans les bois, pour stocker les animaux que je capturais. C’était d’abord simplement un endroit dans la forêt, rien de fabriqué, simplement quelques branchages entassés et des vieilles couvertures pour dissimuler les corps, rien de plus. Ensuite, j’ai eu l’idée du sanctuaire. De nouveau, j’ai passé du temps à la bibliothèque. A me renseigner sur les temples, sur la maçonnerie. Et puis j’ai commencé le travail. Ma mère n’était plus avec son mec. Elle avait besoin de moi tous les soirs. Souvent, on dormait ensemble. Elle me laissait faire ce que je voulais, désormais. On était devenu un couple. Je consacrais mes mercredis à mon sanctuaire. J’avais seulement douze ans, mais je me comportais déjà comme un adulte. J’avais appris à tout séparer, à tout dissimuler. Mes pensées, mes actes, mes émotions. A douze ans, j’avais déjà compris que tout le monde mentait, et que tout le monde me voulait du mal. J’avais compris que s’ils connaissaient mes pensées et mes actes, ils me haïraient. Ils me tueraient.
Mon sanctuaire, j’ai mis trois mois à le construire. Et c’était juste le début.

427
Le cerveau / compte-rendu à la con de la soirée freak wave
« le: avril 06, 2008, 16:38:33 pm »
ah bon c'est pas suisse ? j'avais cru comprendre, je sais pas pour quelle raison. ah, oui, pour le festival cannibal caniche, il se déroule en suisse il me semble, d'où ma conclusion.

(euh, oui, c'est bien moi)

428
Le cerveau / compte-rendu à la con de la soirée freak wave
« le: avril 05, 2008, 10:38:54 am »
ba là je suis de bordeaux (d'ailleurs si des gens ont des plans pour faire des lectures...), mais le bar du collectif konsstrukt (le méchantes bêtes) est à montpellier - et j'y joue fin avril, normalement. voilà. et le collectif ossobucco (dont auquel fait partie olivier lelong le vidéaste) est strasbourgeo-allemand. enfin, si j'ai bien compris.

et là, nous sommes sur un forum suisse, non ?

429
Le cerveau / compte-rendu à la con de la soirée freak wave
« le: avril 03, 2008, 13:33:56 pm »
charcot : ouais, j'étais de montpellier, pourquoi ?

430
Le cerveau / compte-rendu à la con de la soirée freak wave
« le: avril 01, 2008, 23:06:20 pm »
vous n’étiez pas à la soirée de lancement de la revue freak wave, moi non plus, mais on m’a raconté, alors j’en sais beaucoup plus que vous sur la question. enfin, j’y étais un peu, tout de même.

déjà, la salle. l’accueil. la vache ! c’était royal, non, mieux que royal : organisé.
bon, maintenant, je comprends que costes ait pété les couilles au collectif, quand on l’a fait jouer à montpellier. c’est sûr que s’il à l’habitude des salles aussi équipées en matos et en gens compétents que le point éphémère, la choc culturel a du le traumatiser.

déjà, les mecs ont vu mon magnifique micro sony à dix-huit euros acheté la veille à la fnac, tout frais sorti de son plastoque, et m’ont regardé avec un mélange de consternation et de pitié. il m’ont prêté un vrai micro, en métal, un qui capte et amplifie et les sons. moi, apparemment, même pour un karaoké, c’était pas bon. ensuite, on a pu commencer les balances.

bref.

donc, la soirée a commencé avec une performance grand-guignol et fille à poil des vétérans sexandroïdes. le début était bien sympa. une fille (à poil, donc) se fait torturer les nichons par un vieux vicelard aux cheveux ébourriffés et à la peau qui déteste le biactol. des aiguilles dans les tétons, etc. moi, je me suis tiré presque au début, hélas. j’aurais bien regardé, en plus la musique et les éclairage dégageaient pas mal aussi, mais le trac, bon, j’ai plutôt été faire les cent pas devant le canal saint-martin, sous le regard légèrement horrifié des pauvres gens qui buvaient des coups en terrasse. à propos de sexandroïdes, on m’a raconté qu’à un moment le vieux monstre découpe le téton de la fille, le machouille, et le crache dans le public. haha, bon, j’aurais bien aimé assister à ça, dommage. en tout cas, ils ont bien rempli la salle, les salauds.

ensuite, c’est à nous. nous, le konsstrukt big band, c’était moi à la lecture, olivier lelong aux vidéos et sons bizarres, et l’habituel vincent à la clarinette. rien à dire, performance impeccable, la meilleure de toutes celles que j’ai pu faire. faut dire, j’avais un micro qui coûte plus cher que mon ordi, et la sono était parfaite, et olivier projetait des vidéos épouvantablement bien, glauques, et tout, et faisait des bons bruits aggressifs avec son micro ; et vincent a fait des merveilles, tout en free-finesse, comme à l’accoutumée (c’est déjà lui qui m’avait accompagné pour la sortie de j’ai peur, et pour celle de raison basse). on a été applaudi par une foule innombrable. enfin, je veux dire que d’habitude, je parviens à compter les gens qui applaudissent rien qu’en les entendant, là, non.

ensuite, théoriquement, on devait bouffer entre artistes. finalement, devant la recrudescence d’amis, on a bu entre copains. je m’excuse encore auprès des camarades de la soirée d’avoir posé un lapin, mais après tout, c’est paques.

ensuite encore, on a raté costes, c’est dommage, ça avait l’air fort bien, j’ai vu un peu les balances, bon, clavier-voix, certes, mais enfin il ne s’est pas transformé pour autant en michel berger (même s’il jouait du clavier debout). en tout cas, lui, il avait l’air content (enfin, surtout le lendemain, d’ailleurs y’a qu’à voir les photos, il est hilare). bon, de toute façon, costes, j’ai confiance, il nous enterrera tous.

jusqu’à pas d’heures, on a bu comme un trou et parlé comme des cons, on s’est mis la fièvre, pendant des heures.

le lendemain, au vernissage, pas parlé, bougé lentement un peu comme des lézards morts (mais gros, les lézards), café croissant pinaut chips, et hop le train, et hop au-revoir. et, quand même, on a vu la fille de costes, nettement plus contente que lui à l’idée de se faire immortaliser par allemane, haha.

et quelques mots sur la revue, quand même, c’est pour fêter sa sortie, tout ce merdier.

magnifique, la revue. elle coûte dix-huit euros, ce qui n’est pas grand chose quand on voit la gueule qu’elle a. j’ose pas imaginer combien de temps il a fallu pour faire ça. ni combien de sous. je préfère songer à olivier allemane et anne van der linden en dandies dillétantes, qui ont organisé ça à l’arrache, sur un coin, de table, en pensant à autre chose et en se remémorant le bon vieux temps, et penser à frédéric déjean, l’éditeur, comme à un ancien parrain du crime, richissime et sanguinaire, transformé en amoureux des arts pour expier ses fautes. la réalité (des centaines d’heures de boulot acharné, des dettes et des angoisses) est bien trop déprimante. il faut en acheter plein, des revues, les maboules qui sont publiés dedans, et, plus encore, les maboules qui ont publié les maboules, le méritent vraiment. y’a une liste des points de vente à la fin de mon sermon, liste non exhaustive puisque on a appris qu’il y aurait aussi des exemplaires en circulation à londres et à... san fransisco, mais oui monsieur, mais oui madame ! si on m’avait dit un jour que mes poèmes bite-couille-poil seraient lu dans la capitale des beatniks, bordel !... et en plus, illustrés par un type au talent incroyable. la folie. vraiment.

non, sérieusement, un énorme bravo à eux trois. et, dans la foulée, un très grand merci aussi, pour m’avoir invité à faire partie de ce truc. é viva. allemane, déjean, van der linden. ah les salauds.

et puisque j’en suis à remercier des gens, merci à tous les copains d’être venus (ariane, françois, fred, arnaud, juliet, jérome, brana, marc, simon, j’en oublie sûrement parce que je suis un con), et merci à l’intelligentsia parisienne (philippe jaenada et thierry théolier) d’être venu me supporter, m’applaudir, me soutenir, et m’offrir toute leur sympathie, euh, environ dix minutes après que j’ai terminé ma lecture. ah, paris sera toujours paris.

je vous aime tous. et j’en profite pour dire à pennequin devant tout le monde que ses deux textes sont des tueries totales, bordel de dieu.

bon, les liens, maintenant :
pour la revue, c’est ici : http://orbispictusclub.fr/freak-wave-la-vague-scelerate-1.html
pour le site de olivier lelong, c’est là : http://www.myspace.com/ideo_tv
et pour vincent, c’est à new-york que ça se passe.

il y aura sûrement une autre lecture à montpellier au méchantes bêtes fin avril, et l’expo freak wave tournera à nantes et sûrement à bordeaux à des dates que je ne connais pas encore, mais je vous tiens au courant, ah bin oui.

et voilà.

quelques points de vente, dans le désordre, liste provisoire :
centre beaubourg (paris)
palais de tokyo (paris)
un regard moderne (paris)
le monte-en-l’air (paris)
le lieu unique (nantes)
le furet du nord (lille)
le magasin (grenoble)
librairies mk2 (paris)
bimbo tower (paris)
le bal des ardents (lyon)
grand guignol (lyon)
jeu de paume (paris)
kléber (strasbourg)
quai des brumes (strasbourg)
sauramps (montpellier)
histoire de l’œil (marseille)
la mauvaise réputation (bordeaux)

et en bonus, le reportage du bonheur, exécuté (surtout nous) d’œil de maître par olivier allemane, où on peut reconnaître, dans un ordre approximatif, vanessa, costes qui savoure son succès avec la bonhommie qu’on lui connaît, et moi, qui dit oui, qui dit non, qui dit je vous attends. et aussi une photo de scène, mais comme je suis un couillon, j'ai oublié qui en est l'auteur. qu'il vienne me lapider, mon adresse est dans l'annuaire.

(et tant qu’on yest, en bonus-bonus, un lien vers une (première ?) critique :
http://sexes.blogs.liberation.fr/agnes_giard/2008/03/du-vandalisme-r.html)






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Le cerveau / abattoir
« le: avril 01, 2008, 23:05:58 pm »
je ne suis là pour personne
je suis fatigué
je suis fatigué comme jamais auparavant
je ne suis constitué que de ça
j’ai un goût de poussière dans la bouche et la gorge
l’air que je respire à une odeur de poussière
je crois qu’en fait ça vient de moi
qu’en réalité l’air est pur
comment pourrait-il en être autrement

432
Le cerveau / la nuit noire
« le: mars 31, 2008, 09:08:05 am »

(gravure : jean-marc renault - jmr02.blogspot.com)

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10 : 24

La première fois que j’ai vu un cadavre d’animal, j’avais neuf ans. Ca faisait deux ans que mon père s’était pendu, et un an et demi que j’avais des relations sexuelles avec ma mère. A l’école, j’étais invisible, méfiant, et indifférent à tout. Mon statut d’enfant de suicidé s’estompait, mais tout le monde, adultes comme enfants, me foutait la paix. Ca m’allait bien.
Cet animal, c’était un chien. Je l’ai découvert le matin, en allant à l’école. Je n’ai d’abord pas vu de quoi il s’agissait, il faisait encore nuit, on était en novembre. Juste une forme immobile à cheval sur le talus et la route. Et puis j’ai identifié cette forme. Mon cœur s’est mis à battre, j’ai pensé à plein de choses, dans tous les sens. Je me suis approché de l’animal. Il avait probablement été écrasé. Il était presque intact. J’ai juste vu une blessure à la cuisse, où le sang avait collé et laqué les poils. Il était allongé sur le flanc, la tête tournée vers la route, la gueule ouverte. Un liquide noir mêlé à de la boue tâchait ses dents et ses gencives. Ses yeux étaient ouverts et vitreux. Je me suis accroupi. J’ai tâté la cuisse là où il avait été percuté. Les poils collaient. En dessous c’était froid et rigide. J’ai touché sa langue, ses dents, ses yeux. J’avais des frissons. Je n’en perdais pas une miette. Ce chien dégageait une puissance incroyable. Il me donnait de l’énergie, il me faisait du bien. Je n’en revenais pas. J’ai été tiré de ma rêverie par les phares d’une voiture qui approchait. J’ai juste eu le temps de tirer le chien dans le fossé, pour que personne ne le voie. Il fallait que j’aille à l’école. J’étais déjà en retard. J’espérais qu’il serait encore là à mon retour. La journée d’école est passée très vite. Je ne pensais qu’au chien. Je l’ai revu le soir, brièvement, mais je savais que j’aurais plus de temps le mercredi suivant.

11 : 23

Je suis sorti de la maison peu de temps après ma mère. Si elle l’avait su elle me l’aurait interdit. C’était une bonne mère. Ce qu’on faisait le soir, et tous ce qu’elle prenait, c’était une chose. Mais c’était une bonne mère, elle m’élevait bien. Elle me prévenait des dangers du monde. Elle m’enseignait la méfiance.
Je me suis habillé chaudement, et je suis retourné à l’endroit où j’avais laissé le chien. Il était toujours là. J’ai commencé par le soulever, le porter, le traîner à l’écart comme je pouvais. Je me suis enfoncé dans la forêt. Au bout d’un quart d’heure, j’étais en sueur, et essoufflé. Le chien était invisible depuis la route. Les arbres m’entouraient, il faisait presque noir, il y avait juste une lumière grise, hivernale, qui perçait entre les branches. L’odeur de ma transpiration m’envahissait, des senteurs de terre et de compost m’entouraient. J’étais bien. Je me suis agenouillé à côté de la dépouille. Des fourmis marchaient sur ses yeux et sur sa langue. Son parfum était plus fort que quelques jours auparavant. J’ai passé toute la journée à le toucher, à le respirer, à enfoncer mes mains au fond de sa gorge, à humer sa gueule, sa peau, ses organes génitaux, son anus. J’ai promené mes narines partout sur lui. J’ai enfoui mon visage dans son pelage sale. Des sensations violentes me traversaient. Je découvrais quelque chose d’encore plus fort que mes propres odeurs. J’ai sauté le repas de midi, sans même m’en rendre compte. J’étais hors du temps. A l’aide de mes doigts, j’ai ouvert davantage la blessure, j’ai touché la chair gelée à l’intérieur, le sang gelé. Avec une branche j’ai extrait un œil. J’ai coupé le nerf et puis j’ai fait rouler le globe dans ma main. Il était dur et glacé et collant. Je l’ai pressé entre mes deux paumes. C’était difficile mais je suis parvenu à l’écraser. Dedans, c’était gélatineux et froid. La sensation était indescriptible. Comme vivant et mort à la fois.

12 : 22

A l’école, je ne disais rien à personne. J’avais vite compris que ma mère, ça n’était pas normal, ce qu’elle faisait. Mais je savais aussi que sans moi, elle mourrait. Elle ferait comme mon père ; et moi, je me retrouverais seul. Je ne pouvais pas envisager ça, à l’époque. Mais ce qui se passait dans la baignoire, ça me rendait dingue, lentement. Je n’en pouvais plus, de cette tension. Un jour, à l’école, j’ai pété les plombs. J’ai frappé un élève, et un instit. J’étais enragé. J’étais incontrôlable. Je suis devenu fou en seulement quelques jours. J’étais apathique ; je suis devenu furieux, violent. Il y a eu des psychologues, et une enquête sociale. J’ai été placé dans une famille, pendant deux mois. Là, j’ai compris. J’ai vu ce qui allait se passer, si les autres savaient, pour nous. Heureusement, ils n’ont rien découvert. Je suis retourné chez ma mère. J’ai vu un psy au début. Mais au bout de six mois les choses se sont tassées. Ma mère m’a dit qu’elle avait essayé de se suicider. Elle m’a montré ses poignets. Elle m’a supplié de ne plus jamais, plus jamais la quitter. Elle a pleuré. Nous avons fait l’amour. Les choses sont revenues à la normale.
A l’école, désormais, je me tenais à carreau. J’avais compris. Ces six mois avaient été un cauchemar. Voir ma mère pleurer tout le temps. La voir flipper que je déballe nos secrets au psychiatre. Que je la dénonce. Elle m’aimait. Elle me le disait. Tout le temps. Au bout de six mois, quand ils nous ont foutu la paix, ça a été la délivrance. Et toute ma rage, maintenant, je la garderais. Rien que pour moi.
Le chien était resté à la même place, tout ce temps. Il avait changé. Il s’était décomposé et desséché. J’avais pensé à lui tous les soirs, dans la famille d’accueil. Quand je l’ai revu, j’ai pleuré. De joie. Je me suis senti heureux, comme jamais je ne l’avais été.

433
Le cerveau / abattoir
« le: mars 26, 2008, 10:01:18 am »
je balance quelques coups de poings dans le mur aussi fort que je peux
je m’éclate la peau des jointures mais je m’en fous
il faut que je me calme
j’avale une grande goulée d’air poussiéreux
j’ai encore le cœur qui bat trop vite mais il finit par ralentir un peu
mon stress baisse
il reste une angoisse sourde bizarre
comme si je savais qu’un truc horrible allait se passer et que je ne pouvais rien faire pour l’en empêcher
c’est comme si je n’attendais que ça mais sans avoir courage d’attendre vraiment
j’ai pas du tout envie de penser à ça
je ne sais pas quoi penser ça me rend fou cette histoire ça me rend marteau
ça prend toute la place dans ma tête ça bouffe tout ça bouffe tout le reste
ça m’empêcher de respirer de bouffer de baiser ça bloque tout j’en peux plusil faudrait que je remonte mais je ne peux pas

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la semaine prochaine : compte-rendu à la con de la soirée freak wave, avec en bonus, le reportage-photo du bonheur.

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abattoir numéro quatre version papier ne va pas tarder à sortir. pour en recevoir gratuitement quelques exemplaires, envoyer un mail avec son adresse postale à konsstrukt@hotmail.com

434
Le cerveau / la nuit noire
« le: mars 24, 2008, 09:44:22 am »


(jean-marc renault - http://www.jmr02.blogspot.com)

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7 : 27

C’est à cette époque-là que ma mère a commencé à dérailler. A avoir le sommeil agité. A prendre des médicaments. Somnifères, antidépresseurs. Tranquillisants. A fumer beaucoup plus de tabac. A se mettre au cannabis. Tout ça progressivement, au cours de la première année. Je ne la voyais pas beaucoup. Elle se levait après que j'étais parti pour l’école, et rentrait de son travail une heure après moi. Elle s’endormait souvent à table ou sur le canapé, devant la télé.
On mangeait des pâtes, des conserves réchauffées au micro-onde, des soupes en sachet. Souvent, c’est moi qui m’occupais de la cuisine. Elle mettait la table. Elle faisait chauffer de l’eau ou elle ouvrait une boite. Elle se mettait à table, et elle avalait ses cachets sans y penser. Elle enchaînait joints et cigarettes. Elle piquait du nez devant le journal télévisé. La plupart du temps, je la laissais dormir. Je mangeais seul. Ou alors, je ne mangeais pas, moi non plus. J’écoutais sa respiration troublée. Je n’en pouvais plus de la voir comme ça. Et il y avait aussi les bains.
Une heure ou deux après avoir piqué du nez, alors que je me préparais à aller au lit, elle ouvrait les yeux. Elle rallumait la télé que j’avais éteinte, elle marmonnait des phrases que je ne comprenais pas, et elle allait au réfrigérateur prendre deux ou trois yaourts, qu’elle mangeait debout, dans la cuisine, avant de revenir rouler des cigarettes et des joints. Elle me souhaitait bonne nuit. Elle ne m’accompagnait pas au lit. Elle me disait qu’elle m’aimait, mais son regard était absent.
Je continuais à m’intéresser à mes odeurs, mais j’avais abandonné mon carton. Je pleurais beaucoup. Je n’arrivais pas à encaisser cette situation. Je voyais ma mère devenir folle, et la seule chose qui la réconfortait ne me paraissait pas bien. Je m’enfouissais sous les couvertures, pour ne pas l’entendre parler à mon père mort, et je remplissais ma conscience des odeurs de mon corps. Je ne pensais plus.

8 : 26

On prenait des bains ensemble pour passer plus de temps tous les deux. Ma mère était trop fatiguée pour jouer avec moi, alors elle a décidé que le bain serait un moment à nous. Au début, ça me gênait un peu d’être nu devant elle, mais la gêne est passée. Elle me disait que ça lui faisait du bien, que sa vie était horrible, que ça l’aidait à tenir. Moi, je pensais à mon père.
Elle me racontait comment c’était difficile de me laver quand j’étais bébé et que je remuais dans tous les sens. Elle me disait à quel point c’était agréable de me donner le sein. Un soir, j’ai joué au bébé. Je l’ai éclaboussée et elle s’est mise à rire. On a pris l’habitude de ce jeu. Un autre soir, elle a prolongé le jeu et elle m’a donné le sein. J’ai retiré ma bouche, surpris, mais elle m’a maintenu contre elle. Elle m’a murmuré de continuer, que ça lui ferait du bien, beaucoup de bien. Alors, je l’ai tétée. J’ai trouvé ça agréable. Et je me sentais très mal à l’aise, aussi. Elle respirait fort. Elle m’a expliqué, d’une voix coupée de soupirs, que quand j’étais bébé elle prenait beaucoup de plaisir à m’allaiter, un plaisir incroyable, et qu’elle était tellement, tellement heureuse que ce plaisir revienne. Elle avait la tête renversée en arrière, elle gémissait, et de ses deux mains elle me guidait d’un téton à l’autre. Elle se tortillait. Après avoir hésité un peu, elle a relâché son étreinte. D’une main elle m’a caressé la nuque et le dos ; elle a plongé son autre main sous l’eau, entre ses cuisses. Elle a gémi plus fort, jusqu’à un paroxysme qu’à l’époque je n’ai pas compris, et puis elle m’a repoussé, et de nouveau attiré contre elle, pour un câlin plus doux.
Je me sentais à la fois bien et mal, content et frustré. Mon sexe était dur, mais nous faisions semblant de ne pas nous en apercevoir.

9 : 25

Elle m’a très vite appris à lui lécher le sexe. Entre sept et quatorze ans, notre sexualité a été de plus en plus approfondie. Moi, je ressentais le même mélange incohérent d’émotions et de sensations. La première fois qu’elle a osé me branler, le malaise qu’elle éprouvait s’est mélangé au mien. Cette fois-là seulement, j’ai éprouvé un plaisir sans contrepartie. Un véritable orgasme. Ensuite, ma mère a évacué sa honte. Et moi, même si elle me faisait jouir en me masturbant ou en me suçant, je restais partagé entre la gêne, l’écœurement et le plaisir. J’avais tout à la fois envie de recommencer, pour retrouver le bien-être intense de cette première fois, et honte d’avoir de telles pensées, et envie que tout cela cesse, et je ne trouvais pas le courage de le dire à ma mère, et je me sentais par-dessus tout coupable de vouloir briser la seule chose qui lui apportait du bonheur. Tout ça se mélangeait et créait une grande confusion dans mon esprit.
Pour mes neuf ans, elle m’a offert un gode-ceinture, afin que je puisse lui faire l’amour comme un grand (disait-elle). Les bains, désormais, étaient de simples préliminaires, et nous terminions au lit. Je la baisais avec mon gode-ceinture. Le plus souvent, j’étais allongé sur elle. Ses cris de jouissance me faisaient peur au début, et me donnaient envie de pleurer, et puis je m’y suis habitué. Après qu’elle ait pris son plaisir, elle me donnait le mien en me suçant. Nous faisions aussi des soixante-neuf. Nous avions des relations sexuelles pratiquement tous les jours. Lorsque j’ai eu douze ans, il n’a plus été nécessaire d’utiliser le gode-ceinture. Je parvenais à la pénétrer sans difficulté. Je la faisais jouir. Une partie de moi adorait ça. Mes sentiments, mes émotions et mes sensations physiques s’intensifiaient, chacun dans sa direction opposée aux autres. J’étais tiraillé de honte et de dégoût, mais ma libido demeurait insatiable. Souvent, c’est moi qui allais provoquer ma mère. Les autres filles ne m’excitaient pas.

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Le cerveau / abattoir
« le: mars 18, 2008, 18:23:48 pm »
(tu me diras ce que tu penses de soulseek, à l'occasion - dans le genre lycéen déprimé, justement, haha)

***

je ferme mon bureau à clef
devant l’ascenseur huit personnes attendent
l’ascenseur arrive
nous montons tous
il y a déjà quatre personnes à l’intérieur
l’ascenseur commence son trajet silencieux
je quitte l’immeuble
je marche avec la foule
je me rends à mon restaurant habituel
je m’assieds à la même table qu’hier
je commande un plat du jour
au cours du repas un homme se suicide en se tirant une balle dans la bouche
le vacarme est effroyable
tout se suspend dans la salle
moi aussi je cesse de manger
ma cuillère aux trois quart pleine de soupe de poisson est figée dans ma main
ma main est immobile entre l’assiette et ma bouche

***

SOIREE DE LANCEMENT DE LA REVUE FREAKWAVE LE 22 MARS AU POINT EPHEMERE :

voici le programme de la soirée :

17h45 : ouverture de la salle
18h : présentation de la revue freak wave
18h15 : dj wise
19h : sexandroïdes
19h40 : lecture konsstrukt : christophe siébert + olivier lelong
à 20h ça boucle et tout le monde dehors et retour à 21h pour le récital de costes (10€)

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abattoir numéro quatre ne va pas tarder à sortir. pour le recevoir gratuitement, envoyer un mail avec son adresse à konsstrukt@hotmail.com

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