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Messages - konsstrukt

Pages: [1] 2 3 ... 30
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Le cerveau / nouveau livre : découper l'univers
« le: septembre 03, 2015, 22:24:48 pm »
Pour ceux qui seraient passées entre les gouttes de ma newsletter, elle est consultable en ligne ici :

http://shoutout.wix.com/so/cKzNCl_K

J'y évoque la sortie imminente de mon nouveau recueil de poésie (enfin, poésie, je sais pas si c'est le mot juste - ça sort chez un éditeur de poésie, en tout cas).

A bientôt !

Christophe

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?

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Le cerveau / Papi jute dans la sauce aux câpres / nouvelle parution
« le: juillet 06, 2015, 09:35:04 am »
Bonjour à tous,

Mon nouveau livre, Papi jute dans la sauce aux câpres, vient de sortir dans la Collection Or des éditions de La Belle Epoque.

La Belle Epoque, c'est surtout une galerie Lilloise à la programmation exigeante et loin des sentiers battus. Et la Collection Or est une série de petits livres (format A6 approximativement) façonnés à la main et au tirage limité. On y retrouve Pennequin, Costes, Lucien Suel, Benjamin Monti, Anne Van Der Linden, Marc Brunier-Mestas - entre autres.

Je suis très fier d'y publier mon dernier texte, une nouvelle relevant d'un genre un peu marginal : le porno-cullinaire. Ce qui fut au départ une commande de mon amoureuse ("tu écris du porno, tu aimes faire la cuisine, pourquoi ne pas publier un texte qui mélange les deux ?") associée à une commande de David Ritzinger, qui dirige la collection ("Bon, tu me l'écris quand, ce porno, espèce de feignasse"). Sitôt dit, presque sitôt fait. Après quelques mois d'attente, le voici enfin, tout beau tout chaud !

 

Voici le début :

La première fois que j'ai vu grand-père se branler, c'était un vendredi soir. Le lendemain serait mon quatorzième anniversaire, que nous fêterions en famille autour de mon plat préféré, de la langue de bœuf sauce piquante. La fête avec les copains serait pour le samedi suivant.
J'avais été réveillé en pleine nuit par l'envie d'aller aux toilettes. En passant devant la cuisine j'ai aperçu de la lumière et entendu marmonner grand-père. Au lieu d'ouvrir la porte et lui demander si tout allait bien (grand-père, ancien résistant, avait survécu à Auschwitz et il lui arrivait encore de faire d'horribles cauchemars, il avait parfois besoin de réconfort, nous l'aimions tous beaucoup et depuis qu'il était veuf il ne se passait pas une semaine sans que nous l'appelions au téléphone), je me suis arrêté et j'ai collé mon oreille à la porte. C'était exactement comme s'il parlait à quelqu'un. Sa voix était agressive, bizarre.
J'ai entrebâillé la porte, à la fois inquiet et curieux.
Grand-père était debout devant le Frigo ouvert, dont seule la veilleuse éclairait la pièce, son pyjama aux chevilles. Dans une main il tenait le plat de béchamel où les câpres étaient figés et dans l'autre son sexe à moitié bandé qu'il trempait dans l'épaisse sauce tout en se masturbant.
Ses yeux étaient exorbités. Je ne comprenais pas un mot de ce qu'il disait. Il semblait s'adresser à un interlocuteur imaginaire. Il avait l'air de perdre la boule. Je suis resté sans rien faire, figé, épouvanté jusqu'à la fin, jusqu'à ce qu'il éjacule dans la sauce en poussant des grognements plus forts, le visage rouge et congestionné, trois grosses giclées que j'ai entendu faire ploc ploc ploc dans la béchamel, mon visage à moi complètement défait, après quoi il a remis dans le Frigo le plat et a essuyé sa queue et les gouttes de sauce qu'il y avait au sol. Je suis retourné dans ma chambre en catimini. Tout envie de pisser avait disparu.
J'ai passé une nuit et une matinée bizarre, à retourner tout ça dans mon cerveau. A midi tout le monde s'est réjoui en voyant le plat en porcelaine rempli de sauce blanche et fumante, et les points verts foncés qui flottaient dedans, et grand-père souriait encore plus largement que les autres.
— Et bin alors, tu n'aimes plus ma sauce ? m'a demandé ma mère en voyant la tête que je faisais.
J'ai eu du mal à me recomposer un visage normal – du mal aussi à terminer mon assiette.
Cette histoire a tourné un moment dans ma tête et puis je suis passé à autre chose jusqu'à cette nuit, environ trois mois après mon anniversaire, où nous avons tous dormi chez lui – il était question de faire un barbecue le lendemain, le premier de l'année, on était en avril, il faisait déjà beau et dans le jardin poussaient les premières fleurs, tout ça donnait vachement envie.
Quand il a fait grincer la porte de sa chambre, ça m'a réveillé. Il faisait nuit noire. J'ai décidé de le suivre. Je lui ai laissé un peu d'avance pour qu'il ne me remarque pas. Il s'est rendu à la cuisine.
Il a ouvert le Frigo, pris le Tupperware, l'a posé sur le plan de travail et a ôté son couvercle. Ensuite il a baissé son pyjama et saisi dans le Tupperware un pilon de poulet qui dégoulinait d'huile d'olive et d'épices.
Il bandait déjà.

Et si vous voulez m'entendre et me voir le lire sur scène, c'est par ici : https://www.youtube.com/watch?v=GhwMYD7LMD0 (et ça c'est passé au Terminus, à Rennes, le 29 avril 2015).

 

****

 

Si vous désirez recevoir un exemplaire dédicacé, ça vous coûtera 8 euros (+ 1,50 euro de frais de port) pour un exemplaire de l'édition courante, ou bien 30 euros (+ 1,50 euro de frais de port) pour l'un des six exemplaires du tirage de tête ; premier arrivé, premier servi.

Vous pouvez commander via paypal (ce lien pour l'édition courante : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=CY4NTECDPF7EC ; celui-ci pour le tirage de tête : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=4HRKRNHAHK3PJ), ou bien en m'envoyant un chèque : Christophe Siébert, 5 rue Sainte-rose, 63000 Clermont-Ferrand.

Et tant que j'y suis : j'ai à nouveau, et pour sans doute une courte période, des exemplaires de Nuit Noire et de Poésie Portable. Nuit Noire coûte 6 euros, Poésie Portable en coûte 9, plus 2 euros de frais de port. Même adresse postale pour payer par chèque, et voilà les liens Paypal :
Nuit noire : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=VTUVQYJ769MQQ
Poésie Portable : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=RPCLZ4EJW2ZJJ


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Le cerveau / Newsletter mars-juin 2015, et au delà
« le: mars 18, 2015, 15:55:46 pm »
La newsletter mars-juin 2015 (et au-delà) vient de partir en direction des moults abonnés. Ca peut prendre quelques jours pour la recevoir. Pour ceux qui sont pas abonnés, une simple demande par mail (konsstrukt@hotmail.com) et le tour sera joué.

Pour ceux qui veulent la lire en ligne, c'est possible par ici :
http://ecriture.leforum.eu/t265-Newsletter-mars-juin-2015-e

En voici le début :

Ca fait un bon moment que je n'ai pas envoyé de newsletter. J'étais occupé à pas mal de trucs, qui m'ont pris tout mon temps. Je vais donc rattraper le coup avec une lettre particulièrement dense et touffue, à tel point que pour vous y retrouver, voici un petit sommaire :

LES PROCHAINES SORTIES
Découper l'Univers (Gros textes, juin)
Holocauste (Rivière blanche, janvier ?)
Papi jute dans la sauce blanche, un petit conte de black porn magick (La belle époque, 2015 ?)
La dernière maison (Vermifuges, 2016 ?)
Porcherie (Lunatiques, 2016 ?)
Un nouveau roman chez Trash ? (2016 ?)

LES PROCHAINES DATES
29 mars à Lille
26-27 avril à Angers (salon ImaJn'ere)
13-14 juin à Clermont-Ferrand (salon des voix mortes)
20 juin à Clermont-Ferrand (en première partie de Father Murphy)

LA GROSSE

TEXTES INÉDITS
Poèmes tirés d'Un autre recueil
Nouveaux poèmes
Extraits de Descente

CHRONIQUES & AVIS DE LECTEURS
La place du mort (Camion Noir)
Nuit noire (Trash éditions)

Alors bonne lecture, et à dans quelques temps pour de nouvelles aventures !

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Salut à tous,

En prévision d'un mois de janvier et d'un mois de février (et, soyons lucides, d'un mois de mars) un peu durailles sur le plan financier, je cherche, à peu près n'importe où en France, à faire des dates. Je propose, sur scène, ou bien des lectures simples de mes textes, ou bien des rituels drone (avec donc en plus de la lecture des paysages sonores et une scénographie plus travaillée). Je dispose d'une demi-douzaine de sets différents (textes plus ou moins hardcores ou poétiques, musique plus ou moins aggressive ou cosy, lumières plus ou moins hostiles ou accueillantes) en fonction des publics visés, tous durant entre 30 et 45 minutes ; je demande entre 50 et 100 euros par date, en fonction du budget de l'organisation, mais je ne peux pas descendre en dessous de 50, c'est un minimum non-négociable. Idéalement, il faudrait que je booke quelques dates entre maintenant et le 30 mars. Tout-e orga intéressé-e peut me contacter à la suite de ce message, ou bien en m'écrivant en privé.

Merci !

Christophe

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Le cerveau / un nouveau forum ? ha bin oui, un nouveau forum
« le: janvier 26, 2015, 01:37:25 am »
Bonjour à tous,

Considérant que Facebook est un endroit efficace pour faire sa promotion et communiquer de façon unilatérale, c'est à dire envoyer des informations à ses lecteurs, et dans le meilleur des cas efficace aussi pour entamer des dialogues mais pas vraiment de discussion de groupe ; considérant que les newsletters aussi ; me rendant compte, du coup, que tout ça manque un peu d'échange, de convivialité, de la douce saveur de l'émulsion quand elle prend entre les gens, j'ai décidé...

… d'ouvrir un forum.

Vous le trouverez ici : http://ecriture.leforum.eu/index.php

Vous pourrez constater que son fonctionnement est simplifié au maximum.

Pourquoi un forum ?

Pour avoir, justement, un espace commun où chacun pourra lire les textes de tous, où chacun pourra commenter, où tous pourront discuter, bavarder, débattre, s'engueuler – non pas au sein de la vaste foule d'Internet, mais plutôt en comité réuni sur la base d'un point commun : l'importance que nous accordons à l'écriture.

Un forum n'est pas une revue, n'est pas un blog, n'est pas un comité de lecture ; c'est un espace à l'ambition esthétique relativement neutre, aux enjeux relativement faibles : c'est un espace tranquille, en somme, où il est possible de discuter à bâtons rompus, loin de l'idée de faire sa promotion, loin de l'idée aussi de convaincre un éditeur, ou de gagner du fric, ou de se sentir en concurrence avec les autres auteurs.

A la bonne franquette, en somme, dégagé des pressions habituelles, et à une échelle plus lente aussi que les réseaux sociaux, proche par exemple de l'échange épistolaire.

Pour qui, un forum ?

Idéalement, j'y espère trois types d'intervenants : des gens qui sont écrivains, des gens qui sont écrivains amateurs, des gens qui sont lecteurs. A mon avis, ce sera le panachage équitable de ces trois catégories-là qui fera que la sauce pourra prendre.

La différence que j'établis entre écrivain et écrivain amateur ne tient pas forcément au talent que j'attribue à priori à chacun, mais plutôt à l'idée que l'écrivain veut être publié, et plutôt publié par des maisons professionnelles, être critiqué, en vivre, participer à la vie littéraire, tandis que l'écrivain amateur ne se soucie que d'écrire, et quant au devenir de ses textes, vogue la galère.

Bref, ces trois-là à position égale ; les uns ne cherchant pas à tout prix à faire leur promo, les autres cherchant à trouver de nouveaux lecteurs pour leurs textes, et un regard à la fois plus attentif et moins complaisant que sur d'autres supports de publication.

Pour que la sauce prenne, il faudrait que se constitue très vite un noyau dur – des gens relevant de toutes ces catégories, une dizaine de chaque, pour commencer, et qu'il y ait trois ou quatre post quotidiens. J'ai assez de copines et de copains, je crois, pour que ce noyau dur puisse exister rapidement (ouais, les potes, c'est à vous que je cause ! Radinez-vous !). Et tous ces copains et ces copines sont suffisamment inconnus les uns des autres, j'espère, pour que ça ressemble davantage à une pendaison de crémaillère dans un 120 mètres carrés qu'au sempiternel apéro du jeudi soir chez Bébert.

Pourquoi ce forum et pas un autre ?

C'est vrai qu'il en existe une quantité d'autres. Ils offrent tous une ambiance particulière, et nourrissent tous une ambition spécifique. Ils ont chacun leurs qualités propres.
Mais aucun, à ma connaissance, ne se propose de faire ce que j'ai l'ambition de faire : créer une scène ouverte à tous, sans contrainte thématique, sans contrainte de genre, de forme, de qualité, créer un endroit où tous peuvent se retrouver sans aucune distinction, et échanger autour de cette chose que nous avons en commun, qui nous fonde, à quoi nous pensons tous les jours (quand ce n'est pas toute la journée) : LE TEXTE.

Le texte, dans ce qu'il a de plus général. La poésie, le roman, l'essai, l'aphorisme, tout ce qui s'écrit, tout ce qui se lit. Tous ceux qui écrivent, tous ceux qui lisent.

A vous, donc.

http://ecriture.leforum.eu/index.php

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Le cerveau / Re : actualités konsstrukt novembre décembre
« le: novembre 27, 2014, 22:00:53 pm »
4 novembre
La journée se passe
La soirée se passe
Rituel drone numéro 9, 30 minutes
Je dors
5 novembre
Fin de matinée sur le quai de la gare du Theil-de-Bretagne
Je suis assis sur un banc
Au pied du banc mes deux sacs
J'attends que le train arrive
De temps en temps je déambule sur le quai
Mes deux sacs restent au pied du banc
12h40
Le train arrive
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 12h43 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 13h28 le train arrive à Rennes
Je descends du train
Je déambule dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je m'achète un billet TGV
Je vais au Relay
Je feuillette des magazines
Je me tiens devant le Relay
Je profite de la zone Wi-fi
Je vais sur Internet avec mon téléphone portable mais ça ne marche pas
Je sors de la gare
Je ne trouve rien pour m'acheter à manger
Je reviens dans la gare
Je m'achète à manger
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je cherche un endroit pour manger
Je mange
J'ai mes sacs à mes pieds
J'ai terminé de manger
Je recommence à déambuler
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Début d'après-midi dans la gare de Rennes
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
13h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche ma place
Je dépose les sacs dans les logements situés au-dessus des sièges
Je dépose ma veste pliée sur les sacs
Je m'installe sur le siège côté couloir
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
Quelqu'un s'installe côté fenêtre
J'attends que le train démarre
A 13h28 le train démarre
Au cours du voyage je n'aurai pas d'amende puisque j'ai un billet
A 14h33 le train arrive au Mans
Je descends du train
Je déambule dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je vais au Relay
Je feuillette des magazines
Je me tient devant le Relay
Je profite de la zone Wi-fi
Je vais sur Internet avec mon téléphone portable
Milieu d'après-midi dans la gare du Mans
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
15h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 15h56 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 17h42 le train arrive à Tours
Je descends du train
Je traverse le quai
Je traverse le hall
Je repère le quai où est déjà mon train
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je traverse le quai
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 17h58 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 20h38 le train arrive à Nevers
Je descends du train
Je sors de la gare
Je m'achète à manger
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je reviens dans la gare
Je commence à manger
Le train est annoncé
Je traverse le hall
Je vais sur le quai
Le train arrive
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 21h03 le train démarre
Je termine de manger
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 22h32 le train arrive à Clermont-Ferrand
Je descends du train
Je traverse le quai
Je rentre dans la gare
Je traverse la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je sors de la gare
Je marche un peu
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
J'attends le bus
J'entre dans le bus
Le bus traverse une partie de la ville
Je suis debout
Mes deux sacs sont à mes pieds
Le bus s'arrête
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je descends du bus
Je marche un peu
Je pense à des trucs
Un flanc acheté à Rennes et mangé au Mans
Un rhume attrapé à Montparnasse et des mouchoirs achetés à Rennes
Un Coca bu à Lille et pissé à Paris
Je pense à des trucs
J'ouvre la porte de mon immeuble
Je grimpe quatre étages
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
J'ouvre la porte de mon appartement
J'entre dans mon appartement
Je ferme la porte de mon appartement


PROCHAINS RITUELS DRONE :

6 décembre à l'Hôtel des Vil-es (Clermont-Ferrand), en première partie de Kristof Stisinsky (chartres, éditeur des traductions de Saul Williams réalisées par Michel Bulteau)

20 décembre à la Maison pour tous Voltaire (Montpellier) - à l'occasion de la sortie de Banzaï numéro 7, dans lequel il y aura des textes de moi

16 janvier à la Villa des cent regards (Montpellier), dans le cadre des 24 heures du drone (alors celui-là, le loupez pas, je jouerai six heures d'affilée et peut-être sans aucun texte)

ET A PROPOS DU MASQUE :

Je voudrais, une nouvelle fois, attirer votre attention sur Aurore *U*, qui depuis la tournée Porcherie crée et fabrique mes masques, et qui pour le rituel drone a également conçu mon costume. Son travail est très original, de qualité, solide, adapté aux conditions du travail sur scène ; Aurore *U* a cette qualité rare de comprendre les significations et les enjeux de votre projet sans avoir besoin de discuter quinze ans avec vous, et de réussir à traduire ça en un masque qui, à la fois est parfaitement dans le sujet et à la fois évite tout caractère littéral ou bêtement illustratif ; si vous êtes musicien, théâtreux, cinéaste, vidéaste, performeur, etc., je vous encourage vivement à aller jeter un œil à ses sites. Considérant toutes les qualités que je viens d'énumérer, les tarifs d'Aurore *U* sont tout à fait abordables.

Voici ses divers sites :

Masques et créations textiles : http://auroreu.wix.com/pantyhose
Photos et dessins : https://www.flickr.com/photos/aurore-u
Sous le nom d'Archilux : http://archi-lux.tumblr.com/
Sa page Facebook : https://www.facebook.com/aurore.bela?fref=hovercard

***

Tout pour le Freak est un nouveau e-zine, auquel j'ai participé en donnant un texte et un morceau de drone. Voici ce qu'en dit l'éditeur :

Votre attention Messieudames, Tout pour le freak #1 est arrivé !
Une œuvre collective comprenant
- un livre de 58 pages (poèmes, nouvelles, essais, illustrations)
- une compil 8 titres electro/industriel
En téléchargement à prix libre (sans minimum), venez jeter un œil, partagez sans pitié...

...et Bienvenue dans la foire aux monstres !

https://toutpourlefreak.bandcamp.com/album/1-pile-haute

***

QUELQUES EXTRAITS DE DESCENTE :

*** attention : c'est du premier jet strictement pas relu, donc farci sans doute de fautes et de lourdeurs ***

— Il m'a fallu environ trois jours pour la retrouver. Trois jours d'enquête non-officielle, et sur mon temps libre. Sachant que j'en avais pas beaucoup. Pas mal, non ?
— Tu as fait quoi ?
— Elle était remariée, la pute. Tu te rends compte ? Remariée, mère d'une petite fille, et toute la smala vivait à Lyon. J'avais toute les infos. L'adresse, l'école où allait la petite, tout. Tu sais ce que j'ai fait ? Tu veux savoir ce que j'ai fait ?
— Raconte ?...
— J'ai attendu d'avoir quelques jours de vacances et je suis allé à Lyon. J'ai passé quelques jours à les observer... A roder près de chez eux, à prendre des photos, ce genre de truc. Rien de bien méchant, tu vois. Personne savait que j'étais là, évidemment. Je suis resté cinq jours en tout. Jeudi et vendredi, j'ai bien observé, tout. Samedi, dimanche, aussi. Lundi matin j'ai attendu que tout le monde soit parti, le connard à son travail, la connasse pareil, la gosse à l'école, et je suis rentré dans le pavillon de merde. Un jeu d'enfant, tu t'en doutes. Là, j'ai pris des photos du lit conjugal, j'ai pris des photos de l'intérieur des tiroirs, les culottes de cette pute, etc. Tant que j'y étais, des photos aussi de la chambre de la fille, des jouets, des vêtements, etc. J'avais un appareil jetable. J'ai fait développer ça, j'ai payé en liquide, tu t'en doutes bien, et j'ai fourré les photos dans une grande enveloppe que j'ai glissée dans la boite aux lettres. Ca m'a occupé toute la matinée. Ensuite je suis passé chercher la gamine à l'école. Elle rentrait seule à midi, et puis ses parents la rejoignaient. J'ai abordé la gamine un peu à l'écart de l'école et je lui ai remis un gros paquet-cadeau. Je lui ai dit que c'était de la part de son papa, pour lui faire une surprise. Elle m'a demandé si elle pouvait l'ouvrir, je lui ai dit qu'elle n'avait qu'à faire comme elle voulait. Et j'ai foutu le camp.
— Et... il y avait quoi, dans le paquet ?
— Un gros rat crevé, les tripes à l'air. Et le couteau qui avait servi à la tuer encore enfoncé dans son crâne. Dans la boite, sous le rat, j'avais marqué le prénom et le nom de la gamine.
— Putain...
— Héhé... Tu imagines la panique ? Le rat crevé, les photos de l'intérieur de la maison... La gamine traumatisée, le mec fou de rage... dépôt de plainte et tout, évidemment ils – enfin, je veux dire, les flics – sont venus me voir, mais j'avias un alibi et puis bon, merde, j'étais de la maison, ils allaient pas creuser beaucoup. Du coup j'ai refait le coup trois ou quatre fois en trois ans. Les photos des strings de la pute. Un chien décapité refilé à la fille. Un chat coupé en deux. Bien sûr je pouvais pas lui refaire le coup du cadeau surprise, mais à chaque fois j'ai trouvé un truc. Pas de problème. Ils ont déménagé. Rien à branler. Tu sais quoi ? J'ai détruit leur famille. Au bout de trois ans, ils ont divorcé. Mon ex-femme était en dépression. Le mec en pouvait plus, il s'est tiré avec une autre meuf. La gamine s'est remise à pisser au lit. Elle avait dix ans ! A plus rien foutre à l'école. Cauchemars, psycothérapie, etc. Parfait. Mais j'en suis pas resté là. J'ai continué à travailler mon ex-femme. Des courriers. Des menaces. Des petits trucs. Des mecs que je connais, qui sont passé chez elle. Pisser sur ses fringues. Se branler dans son lit. Dès qu'elle rencontre un mec, faire en sorte que le mec se fasse défoncer la gueule ou embarquer par les flics et passer à tabac. Il y a six ans j'ai payé un type pour la violer et lui péter la devanture. Plus une dent, elle avait, et le mec lui avait détruit la chatte, je le connaissais, c'était un putain de sauvage, un animal. Il y a cinq ans elle s'est suicidée. Quant à sa fille, pour autant que je sache, elle est devenue timbrée, elle est retournée avec son père mais c'est la merde, elle fout rien à l'école, elle cherche la merde, elle est devenue violente, j'ai bousillé son adolescence. J'ai détruit leur vie. Et l'autre, elle est morte. Qu'est-ce que tu dis de ça ?
— Je sais pas...
— Moi, je sais, ce que je dis : faut pas me faire chier. Tu comprends ce que je te dis ? Faut pas me prendre pour un con, c'est tout. Celui qui me prend pour un con, il tombe sur un putain d'os.

Un nouvel extrait de "Descente", mon roman en cours d'écriture. Je le mets en ligne, celui-là, parce que j'en suis bien content. Non que je le trouve spécialement réussi (c'est, comme tous les autres extraits que j'ai mis en ligne jusqu'à présent, du premier jet non relu, et donc susceptible de se transformer un peu, beaucoup, voire de disparaître complètement), mais j'en suis content parce que, après des jours et des jours à galérer sur ce chapitre, à écrire des pages bonnes pour la poubelles (et qui y ont, invariablement, fini), j'ai enfin écrit ce fragment, bref, mais qui ressemble enfin à quelque chose. Les vingt pages suivantes, désormais, ne sont plus qu'une question de travail, et de patience. Le plus dur est fait.

3.

Les gens sont laids, voilà ce que se dit M., qui préfère les oiseaux, qui leur parle parfois, et qui va déambuler dans les rues après avoir nourri les pigeons qui squattent sur les toits sur quoi donnent ses fenêtres.
Il regarde les gens qui marchent dans les rues, il regarde ceux qui ont l'air d'avoir un travail et ceux qui, manifestement, n'en ont pas ; il observe les vêtements dans les vitrines, et leur prix ; il observe les menus des restaurants, et combien coûte la nourriture ; il tente de raccorder ensemble toutes ces informations, comme un puzzle, comme de la poésie expérimentale ; il n'y parvient pas souvent mais chaque jour, dehors, pendant plusieurs heures, il essaie. Les gens sont laids.

Voilà, c'est tout pour cette fois, merci de votre présence, et à bientôt !

Christophe Siébert.

8
Le cerveau / Re : actualités konsstrukt novembre décembre
« le: novembre 27, 2014, 22:00:41 pm »
03 novembre
Début de matinée dans la gare de Lille-Flandres
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
Presque 8h
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 08h02 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 09h21 le train arrive à Amiens
Je descends du train
J'attends un moment dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
J'achète une bouteille de Perrier
Matinée dans la gare d'Amiens
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
10h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 10h14 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 11h32 le train arrive à Paris-Gare du Nord
Je descends du train
Je traverse la Gare du Nord
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je quitte l'espace de la gare
Je pénètre dans l'espace du métro
Je fais la queue pour acheter un ticket de métro
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je traverse les couloirs du métro
Je descends des escaliers
Je marche dans des couloirs
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
J'attends le métro
J'entre dans le métro
Je traverse Paris en métro
Je sors du métro
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je marche dans des couloirs
j'emprunte un très long tapis roulant
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je marche dans des couloirs
Je monte des escaliers
Je quitte l'espace du métro
Je pénètre dans l'espace de la gare
Je monte des escaliers mécaniques
J'arrive à la Gare de Montparnasse
Je marche dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je vais manger à Quick
Je déambule
Midi dans la gare de Montparnasse
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
13h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 13h06 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 15h24 le train arrive au Mans
Je descends du train
Je déambule dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je vais au Relay
Je feuillette des magazines
Je me tiens devant le Relay
Je profite de la zone Wi-fi
Je vais sur Internet avec mon téléphone portable
Je sors de la gare
Je m'achète à manger
Je reviens dans la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je cherche un endroit pour manger
Je mange
J'ai mes sacs à mes pieds
J'ai terminé de manger
Je recommence à déambuler
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Milieu d'après-midi dans la gare du Mans
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai ou sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
17h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 17h42 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 19h10 le train arrive à Rennes
Je descends du train
Début de soirée dans la gare de Rennes
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
19h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 19h35 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 20h11 le train arrive au Theil-de-Bretagne
Je descends du train
On vient me chercher
On m'emmène en voiture au lieu où je joue demain soir et où je dors ce soir et demain soir
La soirée se passe
Je dors

9
Le cerveau / Re : actualités konsstrukt novembre décembre
« le: novembre 27, 2014, 22:00:07 pm »
Rituel drone

Extrait vidéo du Rituel Drone numéro 8 à Lille :
http://youtu.be/6IaO2DIiSmA

Live report du Rituel Drone numéro 10 à Clermont-Ferrand, par Witold Bolik :

Un beau moment de nausée noisy, ou tout du moins du vomi de basse et des bruits stridents, voilà ce que promettait cette soirée à l’intitulé un rien intimidant : LA FIN DU MONDE C’EST POUR TES OREILLES ET A CLERMONT FERRAND. Ça se passait rue de la Coifferie. La belle affiche, toute de bouches et d’oreilles enflammées, est signée Lilas et Super Détergent. C’est en la contemplant que je me rends compte que j’ai complètement occulté un groupe de cette chronique et de la soirée : ça craint. Je suis désolé, Caveauphone. Je vous ai loupé. Comme expliqué ci-dessous, je boursicotais sur mon smartphone et je n’ai pas vu le temps passer. J’ai aussi loupé Petass mais c’est normal : elle a dû annuler.
Orchestre de quatre pistes : collectif anti-égo, pas de chanson, pas de chanteur, pas de refrain, pas de solo (encore que certains esprits tordus avec une vision toute personnelle de la pop trouveraient des refrains dans les apogées et des solos ou des call/recall gospeliens dans les éléments singuliers surgissant pour créer une nouvelle masse sonore). Une succession de nappes improvisées, certaines cotonneuses qui vous assomment, d’autres aiguës qui vous vrillent. Il n’y a aucune leçon à tirer de rien, le fait d’exister n’est pas un acquit, mais un hasard et une façon de tourner les boutons. Je comprends pas vraiment ce que je dis non plus, là, mais ça m’a évoqué ça.
Récré A2 rien compris non plus - but not in the good way. Je vois un type jouant de la basse (les copains m’expliquent après que c’est une guitare, pour dire à quel point je suis attentif) mais aucun son ne sort de l’instrument. On dirait un trip second degré de playback sur des bandes, ça a l’air rigolo mais impossible de rentrer dedans. Je m’imagine à tort que c’est parce que je ne suis pas assez saoul et je remonte boire des bières. En fait l’irruption imminente d’une Chantal Goya ne parviendrait pas à me réveiller. Je suis sous le coup du Rituel Drone qui a ouvert la soirée, dans une léthargie que L’Orchestre de quatre pistes ont prolongée (le pluriel leur va bien).
Christophe Siébert. Récit trash, à base de flux corporels, sperme, sang, excréments, un peu de sueur, de sadisme, d’inceste et de parenticide. Un truc dégueulasse que ne renierait pas le Jean-Louis Costes d’avant son entrée à l’Académie Française, mais sans l’hystérie et la gouaille à poils de ce dernier. Plutôt dans le ton froid, mathématique et sociopathosomnambulique d’un Anne-James Chaton. This non-song is killing me coldly, pour paraphraser la bluette. Je pense aussi à Fuzati, mais c’est plutôt à cause du masque et de la présence que de la forme d’écriture.
Un drone au laptop, qui me semble une accumulation progressive de nappes asynchrones, une sono petite qui ne m’a pas donné l’impression de faire perdre le moindre point d’audition. Mais ce qui est assourdissant c’est la violence du texte, et ce qui la rend terrible c’est la voix posée, ponctuée par des éclaircissements de gorge hors micro aussi secs que les phrases au style serré, au ton juste et cruel. Tout ça happe et retient même les fleurs bleues dans mon genre. Il s’agit bien d’un rituel. On en sort pantelant, émus, un peu merdique et trop léthargique pour du Récré A2. Ce n’est pas pour les enfants. Ce n’est pour personne. C’est de la poésie inadmissible et de la musique dangereuse (pour citer deux titres de bouquins que je n’ai pas lus dans la même phrase, c’est ma perf à moi).
Il me faudra quelques jours et quelques nuits agitées pour m’en remettre, à grandes lampées de musique kitsch dont l’anti-réalisme absolu fait du bien après tant de vérité hardcore : les Mills brothers. Je ne sais pas si ça marchera pour vous.

UN COMPTE-RENDU OBJECTIF DE LA TOURNEE :

28 octobre
Milieu d'après-midi dans la gare de Clermont-Ferrand
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
16h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 16h26 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 17h59 le train arrive à Nevers
Je descends du train
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
18h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 18h24 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 19h49 le train arrive à Montargis
Je descends du train
Je quitte la gare
On vient me chercher
La soirée se passe
Je dors
29 octobre
Début de matinée dans la gare de Montargis
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
8h et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 8h51 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 9h58 le train arrive à Paris-Bercy
Je descends du train
Je sors de la gare de Paris-Bercy
Je marche dans le quartier
Je cherche une boulangerie
Je trouve une boulangerie
Je m'achète à manger
Je marche dans le quartier
Je retourne à la gare de Paris-Bercy
Assis sur un siège dans la salle d'attente je mange
Fin de matinée dans la gare de Paris-Bercy
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends l'heure de départ de mon car
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
11h30
Il est possible d'embarquer dans le car
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je traverse le parking
Je fais la queue
Je montre ma carte d'identité
Je monte dans le car
Je trouve ma place
Je m'assieds
Je dispose mes sacs à mes pieds car ils ne rentrent pas dans les logements situés au-dessus des sièges
J'abaisse la tablette
J'y pose mon téléphone portable et mon livre
Quelqu'un s'assied à côté de moi
A midi le car démarre
Je n'aurai pas d'amende car j'ai un billet
A 17h20 le car arrive à Bruxelles-Midi
Je sors du car
Je traverse la gare
Je cherche mon chemin
Je cherche le lieu où je joue ce soir
Je marche
J'ai mon sac à dos sur le dos et mon sac de voyage à l'épaule
J'arrive au lieu où je joue ce soir
La soirée se passe
Rituel drone numéro 6, 40 minutes
Un taxi m'emmène à l'endroit où je dois dormir
Je dors
30 octobre
Je passe la matinée à me promener autour de la gare de Bruxelles-Midi
J'ai sur le dos mon sac à dos et sur l'épaule mon sac de voyage
Je m'achète à manger
En fin de matinée j'attends sur le trottoir où se garent les cars
Je mange
Mes sacs sont posés à mes pieds
Vers midi et demi il est possible d'embarquer dans le car
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je fais la queue
Je montre ma carte d'identité
Je monte dans le car
Je trouve ma place
Je m'assieds
Je dispose mes sacs à mes pieds car ils ne rentrent pas dans les logements situés au-dessus des sièges
J'abaisse la tablette
J'y pose mon téléphone portable et mon livre
Quelqu'un s'assied à côté de moi
A 13h03 le car démarre
Je n'aurai pas d'amende car j'ai un billet
A 15h10 le car arrive à Lille-Europe
Je sors du car
Je me promène dans Lille
J'ai mon sac à dos sur le dos et mon sac de voyage à l'épaule
En fin d'après-midi on vient me chercher
La soirée se passe
Je dors
31 octobre
Début d'après-midi dans la gare de Lille-flandres
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
Presque 13h
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je traverse une partie du tunnel
Je monte les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 13h02 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 14h21 le train arrive à Amiens
Je descends du train
On vient me chercher
Nous marchons à travers Amiens
J'ai mon sac à dos sur le dos et mon sac de voyage à l'épaule
Nous prenons un camion
Nous nous rendons au lieu où je joue ce soir
La soirée se passe
Rituel drone numéro 7, 40 minutes
Nous retournons à Amiens en camion
Nous déambulons dans Amiens
J'ai mon sac à dos sur le dos et mon sac de voyage à l'épaule
Nous nous rendons à l'endroit où je dors
Je dors
Premier novembre
Fin de matinée dans la gare d'Amiens
Je fais les cent pas
Sur mon dos le sac à dos
A mon épaule le sac de voyages
Je marche autour de la gare
J'ai sur le dos mon sac à dos et à l'épaule mon sac de voyage
Je m'achète à manger
Je retourne à la gare
J'attends que s'affiche le numéro du quai où sera mon train
De temps en temps je fais une pause
Les deux sacs à mes pieds
Midi et quelques
Le numéro du quai s'affiche
Je reprends mes sacs
Le sac à dos sur le dos
Le sac de voyage sur l'épaule
Je traverse le hall
Je descends les escaliers
Je pénètre dans le train
Je cherche une place libre
Je dépose le sac de voyage sur le siège côté couloir
Je dépose le sac à dos sur le sol au pied du siège côté couloir
Je dépose ma veste pliée sur le sac à dos
Je m'installe sur le siège côté fenêtre
J'abaisse la tablette
Sur la tablette je dépose mon téléphone portable et mon livre
J'attends que le train démarre
A 12h38 le train démarre
Au cours du voyage j'aurai sans doute une amende
A 13h58 le train arrive à Lille-Flandres
Je descends du train
On vient me chercher
Nous nous rendons au lieu où je joue ce soir et où je dors ce soir et demain soir
La journée se passe
La soirée se passe
Rituel drone numéro 8, 45 minutes
Je dors
02 novembre
La journée se passe
La soirée se passe
Je dors

10
Le cerveau / Re : actualités konsstrukt novembre décembre
« le: novembre 27, 2014, 21:58:33 pm »
Nuit noire vient de (re)sortir !

Et voilà, je viens de recevoir mes exemplaires de Nuit Noire ! C'est décidément, alors que ça fait maintenant onze fois que ça m'arrive, toujours la même excitation de déballer un paquet et de feuilleter pour la première fois un livre dont je suis l'auteur ! Un grand merci à tous ceux qui ont permis à ce livre d'exister, spécialement Antoine Dumont, de Trash Editions !

Quelques mentions technico-légales :
Disponible depuis le 15 novembre 2014.
Format poche, 150 pages, 6 euros (port non compris)
Couverture : Deshumanisart.
Maquette : Robert Darvel.
Préface d'Emmanuel Pierrat (écrivain, avocat, spécialiste de la censure)
ISBN : 979-10-92671-10-0
Pour contacter l'éditeur : trasheditions@gmail.com
Pour contacter l'auteur : konsstrukt@hotmail.com

Si vous voulez un exemplaire dédicacé, vous pouvez me l'acheter directement, soit par chèque (7,50 euros à envoyer avec votre adresse à Christophe Siébert, 5 rue Sainte-Rose, 63000 Clermont-Ferrand), soit par Paypal (en suivant ce lien : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=VTUVQYJ769MQQ)


Nuit Noire, que j'ai publié en 2011 chez Rivière Blanche, qui a été sélectionné en 2012 au prix Sade, est mon roman le plus dur, violent, dérangeant, obscène, sanglant, crade, tordu, et j'en passe. Il est l'histoire, racontée à la première personne, de quelqu'un qui tue. C'est son témoignage, depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte. Il nous explique qui il est, en quoi il croit, pourquoi il tue, comment il tue. Il ne se justifie pas. Il ne s'excuse pas. Il ne nous aime pas.

Ce livre, je l'ai écrit parce que j'en avais marre de la complaisance qui entoure, en fiction et parfois dans les conversations, les tueurs en série. J'en avais marre d'observer qu'ils fascinent, qu'ils sont (l'idée est connue) comme des rock stars du nihilisme. Merde. Ils ne sont pas ça. Ils sont cons, bornés, dangereux, pas sexys.

C'est ce que j'ai voulu montrer.

Nuit Noire, après une première carrière sur Internet, après une deuxième carrière chez Rivière Blanche, existe pour la troisième (et, je pense, dernière) fois chez Trash Editions, sous sa forme définitive, que l'éditeur appelle plaisamment director's cut. Comprendre : chez Rivière Blanche, pour atteindre à la taille de texte réclamée par l'éditeur, j'ai du rallonger la sauce : inventer un autre personnage, alterner ses propres aventures avec celle du narrateur de Nuit Noire. Je n'en étais pas tellement satisfait. Chez Trash Editions, Nuit Noire ressort expurgée de cette partie parallèle qui ne m'a jamais convaincue. C'est aussi une version nettoyée des fautes, coquilles et bourdes diverses qui entâchaient l'édition précédente.

Enfin, cerise sur le gâteau, Emmanuel Pierrat, avocat, éditeur, président du prix Sade (entre autres choses) en a écrit la préface.

Pour fêter sa nouvelle incarnation, un petit florilège des diverses réactions qu'il a suscitées par le passé :

très inquiétant...

j' espère seulement que ç'est pas trop trop trop autobiographique.

toujours aussi chargé...

C'est très fort les sentiments que tu arrives à transmettre... Un peu comme si tout cela était enfoui en nous mais que nous nous refusions à le laisser transparaître... Très fort...

Anteros n' a pas de grandes oreilles mais un gros zguègue

Tout çà me fais penser à Rouault.

la perte du sacré semble avoir beaucoup affecté notre héros, esperons qu' il se ressaisisse et sodomise toute l' éductaion nationale

Ton personnage me fais un peu penser au psychopat dans la première partie des "racines du mal" peut-être le seul livre de Dantec qui vaille le détour.

Florence va bientôt resembler à une peaupiette de veau fourrée
l'ambiance sexuel / morbide me rapelle vaguement certains passage de glamorama de B.E.Ellis qui m'avaient bien plus.

j'imagine même pas faire un film tiré de ce roman !

Je tient à te dire que j'ai lu à haute voix des bribes de phrases à quelques personnes de mon entourage, proche, une copine m'a limite cogné pour que j'arrete....

J'ai commencé mais je ne suis pas allée jusqu'au bout. Vouloir choquer peut être, mais présenter un enfant dans un rapport incestueux, comme s'il était consentant, je trouve ça scandaleux.

j'ai adoré lire ta saloperie de bouquin qui colle et poisse aux yeux...

Et en attendant les premiers extraits et les premières chroniques de Nuit Noire, voici la préface qu'Emmanuel Pierrat (avocat, écrivain, éditeur, etc.) a écrite pour la nouvelle édition :

Nuit noire est bel et bien un roman inclassable.

Le procédé est pourtant d’un abord classique : le narrateur prend la parole à la première personne, les phrases arrivent sans afféterie, la lecture est en apparence aisée. Tout présente les allures d’une fiction, certes angoissante et minutieuse, qui tourne vite au récit sexualo-terrifiant.

Mais aucun des chefs-d’œuvre du genre érotique ou d’horreur n’égale en outrance ou en intensité la plume de Christophe Siébert, dont l’audace et le style ont déjà séduit les lecteurs de la première édition papier de Nuit noire, publiée en 2011.

Christophe Siébert avait alors déjà obtenu l’adhésion d’un public exigeant grâce notamment à son collectif Konsstrukt et la parution d’épisodes parus dans l’univers numérique. Il y avait aussi ces romans pornographiques que La Musardine a édités et qui ne sont pas si éloignés que cela de notre Nuit noire, puisque la sexualité, forcément la plus morbide, alterne ou se mêle à la saleté, aux odeurs, à la souffrance, aux errances et à la mort.

Le talent de Christophe Siébert s’est confirmé depuis lors au gré de divers registres, et en particulier avec Poésie portable, paru début 2014 et dont le propos rejoint les obsessions désormais connues de son auteur.

Il ne sert à rien de résumer ici l’intrigue de Nuit noire pour analyser les raisons, si multiples, de la réussite et du succès de cette entreprise littéraire.

L’ouvrage déconcerte par sa simplicité et sa crudité : rien ne nous est épargné – et c’est tant mieux, car ce sont autant de détails qui aiguisent tous les sens, autant de malheurs subis ou voulus par le héros - dont nous suivons la folie meurtrière - et donc autant de bonheurs surprenants de lecture.

Il ne faut voir pourtant dans cette recette aucun goût pour la provocation : la pertinence du cocktail unique concocté par Christophe Siébert classe Nuit noire mille coudées au-dessus des supposés livres choc, dont le public est appelé, à grands renforts de mauvaise publicité, à se scandaliser à chaque saison littéraire.

Nuit noire est surtout un texte qui se lit sans tabous, sans complexes, sans retenue. Il met en scène la vie et la mort, réelles ou sublimées. Il s’attaque, sans crier garde, à la société et à ses tabous, sous un angle que la société, et en particulier les morales religieuse comme politique, désapprouvent. Les personnages tuent, lèchent, mordent, hument, etc. Et l’art de ce roman conduit à se délecter de ce qui autrement écrit ne pourrait qu’indigner. Les images évoquent, sans les copier, Les 120 Journées de Sodome de Sade ou, plus près de nous, Yapou bétail humain de Nosho Zuma.

La puissance de Nuit noire tient encore au mélange de tons et de voix, de scènes nauséabondes, de souvenirs d’enfance et d’adolescence, d’obsessions, de clichés, d’une volonté incessante de se soumettre à nu (dans tous les sens du terme) au jugement critique.

Les sujets abordés tour à tour se révèlent quelquefois presque inédits en littérature. Quel écrivain, même le plus sadien, a jusqu’à présent osé disserter avec un tel soin sur les aisselles, les cadavres d’animaux ou le viol de sa propre grand-mère ?

Notre romancier ne suit qu’une seule règle : le plaisir personnel, sexuel, exhibitionniste de ses créatures. Et dicte à son auditoire un rythme implacable.

Et voilà cet auditoire devenu voyeur, au fil des pages qu’il ne peut résister de tourner ; puis, arrivé au terme, s’avouer enthousiaste, vaincu par une prose écoeurante et fascinante.
Leçon magistrale contre les préjugés et les interdits, Nuit noire s’inscrit au premier rang des œuvres majeures, de celles dont la découverte marque une vie de lecteur.

***

Découper l'univers, le mettre dans des boites, reculer de vingt pas, épauler son fusil et tirer sur les boites sera mon deuxième recueil à paraître chez Gros Textes. Il se composera de 47 textes et sera illustré (couverture et peut-être illustrations intérieures) par Lilas Mala (http://lalilas.over-blog.com/) et Super Détergent (http://superdetergent.tumblr.com/). La sortie est prévue pour début 2015 ; voici le premier texte, pour vous faire une idée :


1.

Après avoir accompli une tâche longue, difficile et absorbante, c'est le retour à la vie. C'est toujours un peu difficile, le retour à la vie. Vous avez, admettons, fait trois ans de prison. Ou bien aimé quelqu'un. Ou bien eu un travail. Vous vous êtes lancé dans quelque chose qui a tenu tout le reste à l'écart, et tout le reste ça veut aussi bien dire le sommeil, l'appétit, l'hygiène, les pensées simples, la branlette du matin, tout, quelque chose qui vous a bouffé corps et âme, vous a eu jusqu'à l'os.
Et ce truc-là, prison, amour, bureau, chantier, ce truc-là est terminé. Un beau matin, ce truc-là est fini et vous vous réveillez libre.
La saveur particulière de la première promenade. Tu te dis : merde, je suis libre. Rien ne m'attend, je n'ai rien à faire d'autre que flâner, dépenser la monnaie que j'ai dans les poches, je peux rentrer à n'importe quelle heure, je fais ce que je veux, rien ni personne ne m'attend, je suis LIBRE.
Ce sentiment ambigü. Cette joie qui paraît un peu louche. Cette envie de chialer qui d'un coup serre la gorge. Ce regard apeuré qu'on a envie de lancer tout autour, mais on se contient, on continue de marcher, nulle part.

***

Un autre recueil :

Bon, il semblerait que je vienne de terminer la série de poèmes que j'avais intitulée "Un autre recueil", et qui en compte 104, numérotés de 1 à 105, le numéro 6 étant absent. En attendant sa lointaine publication (vu le calendrier de mes prochaines parutions, je ne sais pas trop si une sortie sera envisageable avant 2016), voici les deux premiers poèmes du recueil, déjà postés ici et là, mais corrigés pour l'occasion, et dans leurs formes que j'imagine définitives :

1

J'aimerais éprouver de la haine ou de la peur ou simplement
De la colère ou de la joie
Mais la plupart du temps
Je / Ne / Ressens / Rien
De plus que ressentent
Les statues
Quand les pigeons, quand les pigeons
Leurs chient dessus

2

Il y a des gens
Qui ont une opinion
Sur la politique mondiale
Il y a des gens
Qui se positionnent
Par rapport à Wall Street
Il y a des gens
Qui sont pour qui sont contre le capitalisme la guerre dans je sais pas quel pays l'avortement la peine de mort la fuite des capitaux la Gauche la Droite la pub sur les chaînes publiques à vingt heures l'ouverture des supermarchés le dimanche Vigipirate la légalisation du cannabis l'expansion d'Israël la clope la fausse clope Internet tous ces trucs
Et Laïka sans doute avait
Son avis sur le programme
De la NASA
Et Panpan le lapin albinos
Son avis aussi sur la vivisection

(Photo : Mathias Richard)

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Le cerveau / actualités konsstrukt novembre décembre
« le: novembre 27, 2014, 21:58:01 pm »
NEWSLETTER NOVEMBRE-DECEMBRE

Ces derniers jours, je me suis fâché avec un garçon qui n'admettait pas que je puisse ne pas avoir reçu un de ses e-mails ; qui croyait, au contraire, que je l'avais reçu mais que, pas intéressé, méprisant, je n'avais pas répondu. Bon, en soi, c'est pas très intéressant, mais ça m'a donné quand même un peu à réfléchir. C'est un monde intéressant, que ce monde. Un monde où, entre l'affirmation invérifiable faite par un humain et la promesse invérifiable faite par une machine, certains choisissent de faire confiance à la machine.

Bref.

Bonjour à tous.

Grosse newsletter ce mois-ci, prenez votre temps pour la lire, de toute façon j'aurai trop de travail, d'ici janvier, pour venir vous reprendre la tête, et cette fois-ci il y en a pour tous les goûts : Poésie portable, La place du mort, Nuit noire, Découper l'Univers, le mettre dans des boites, reculer de vingt pas, épauler son fusil et tirer sur les boites, Un autre recueil, Rituel drone, Tout pour le freak numéro 1, Descente.

Voilà ce qu'une lectrice écrit à propos de Poésie Portable ; cette critique exceptionnellement longue, réfléchie, travaillée, intelligente, me rend extrêmement fier - me donne l'impression, disons, de pas avoir bossé pour rien.

Merci, donc, à son auteur. Sincèrement.

(Et si ça vous donne envie de recevoir un exemplaire dédicacé, vous pouvez m'envoyer un chèque de 9 euros à Christophe Siébert, 5 rue Sainte-Rose, 63000 Clermont-Ferrand, ou bien suivre ce lien Paypal : https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=RPCLZ4EJW2ZJJ)

« La démence d’être sauvé » ?
Christophe Siébert ou le nihilisme ultime

Dans la lignée du « Dieu vomit les tièdes » C. Siébert déclare tout net qu’« il faut brûler vif la tiédeur –incinérer les tièdes » (78). La vie n’est pas un processus à combustion lente.

Sulfureux, trash, tonitruant, maudit et fier de l’être, l’auteur de Poésie portable est le chantre d’une noirceur assez jubilatoire une fois la nausée première surmontée, d’un cynisme d’abord irrespirable puis stimulant dans un deuxième temps. C’est que cet animal retors sait empoigner ses contradictions intérieures pour les déployer en un brillant feu d’artifices dépressif, naviguant entre pessimisme apocalyptique, doutes existentiels, paranoïa et mythomanie.

Au premier degré, il est question dans son livre de purgatoire ici et maintenant. Rien ne saurait racheter l’homme qui ne mérite que d’être enfoncé méthodiquement et implacablement dans le désespoir. On ne peut se raccrocher à rien. Où qu’il pose les yeux, l’homme renvoie de lui-même une image qu’il ne peut évidemment pas contempler en face.

D’où la mise en scène caricaturale pour Comedia : macabre, ostensiblement solennisante, cauchemardesque.

Par une sorte de complaisance inversée, cruelle et perverse, Christophe Siébert s’emploie à saper avec force détails toute illusion consolatrice, c’est-à-dire toute condition de possibilité de l’existence.

On est d’emblée au bord de l’asphyxie, c’est réussi. Son dessein est de rechercher ce point ultime du désarroi, la limite du suicide. Le seul exutoire à cette délectation anxiogène et mortifère est l’écriture qui broie si finement le fond infâme humain. Un dégoût aussi profond de l’humanité- et en particulier de ses contemporains-, une misanthropie si hyperbolique, si exhaustive ne s’approche pas si souvent, ne se lit que peu à ce degré et s’écoute encore moins.

C. Siébert et sa descente infernale spectacularisée nous défie avec toute l’intelligente impudeur qui sied à l’indécence de son propos du bord de sa scène dantesque, nous contraignant à nous confronter avec tout ce dont nous nous détournons pour simplement continuer à vivre et à perpétuer la mascarade sociale absurde qu’il dénonce. Dynamite incandescente, attisée, que la réalité ob-scène qu’il assène, mots martelés de poinçonnage psychologique.

« J’aime bien isoler le pire – le circonscrire, gaspiller tout mon temps à l’examiner sous toutes ses coutures » (51)

C’est un anti-happy end intransigeant et définitif que de derrière son masque il nous impose.

La question est de savoir jusqu’à quel point sa Poésie portable est vraiment subversive ? Il sait bien qu’au fond, par-delà sa littérale provocation et sa volonté délibérée de choquer, il ne bouleversera rien dans nos vies (désespérément normales). Il n’a rien à perdre, d’où sa violence paroxystique. Sa poésie est d’ores et déjà à fond perdu. Paradoxale subversion, trop virulente, trop frontale, trop extrême, pour réellement prétendre à un quelconque pouvoir de changement.

Il faut lui reconnaître le courage d’en exprimer la dérisoire et risquée grandeur. Son « panache » provient de ce décalage entre d’une part l’amertume et l’intégrale noirceur et d’autre part l’absence d’un point de non-retour puisque par un mécanisme de défense psychologique et instinct de survie bien méprisable, nous ne pouvons faire autrement que de nous dissocier de sa visée destructrice et de la rejeter. Son inversion des valeurs reste personnelle, îlot radical et superbe isolement sans lueur d’espoir (consolation : « l’échec est toujours plus riche que la réussite ») ; aucune affirmation en perspective. On « macère » dans la phrase « nihiliste » et on y reste englué sans tunnel de sortie. Griserie assumée des limites outrepassées, posture intenable et pourtant revendiquée.

« Sans ça je ne serai pas écrivain […] sans ça je n’aurais pas compris que la beauté se cache dans l’éclat d’un regard et que la vie se cache dans l’ombre des névroses et que plus on est vivant, moins on est normal. »

Telle est la phrase-clé susceptible de « briser la mer gelée en nous », pour commencer à comprendre et à s’orienter, qui vaut qu’on en mesure l’édifiante portée.

Excéder la normalité, s’en écarter, c’est effectivement le signe d’une exigence de vie « plus scabreuse », supérieure, qui implique souffrance et dépassement. C’est cet indice de vie intensifiée par-delà la norme qui est le critère de toute valeur, artistique ou non.

Pour cette raison, on respecte Poésie portable, quand bien même il relève des livres qui n’aident pas à vivre, où la seule balise qui vaut est cette lucidité exacerbée nimbée de folie.

Ainsi C. Siébert continuera-t-il à piétiner l’humanité et la normalité dans l’incompréhension voire l’indifférence. C’est un besoin viscéral et l’estampille de son soleil noir.

François-Xavier Farine avertissait aimablement en janvier sur son site « Poebzine » :

« Un poète de la trempe de C. Siébert n’est pas là pour rassurer les consciences bien nées. »

« Attention, chastes oreilles, cette poésie ne s’adresse pas à vous…Mais je n’en suis pas si sûr au final. »

L’hésitation exprimée à la fin d’une critique très élogieuse et enthousiaste dénote une perplexité symptomatique, qui soulève prudemment -sans la trancher- la question de la réceptivité problématique d’un tel livre, enjeu qui semble devoir être précisé.

A qui s’adresse C. Siébert ?

L’auteur, toujours à l’avant-garde, répond dans le § 88 : il s’adresse à ses pairs, pas au troupeau de la norme imperméable, mais aux « fous philosophaux » de son espèce, aux happy few du trash.
Maîtrisant l’auto-dérision dialectique, il va au-devant des critiques, prévenant le reproche de morgue que ses lecteurs ne peuvent manquer de lui adresser, - se le servant lui-même avec assez de verve et ne permettant pas qu’un autre le lui serve - : « je suis un connard –hautain-prétentieux-méprisant-débordant d’orgueil » (95)

L’outrance qui surclasse est un hameçon à double tranchant.
On en vient, après quelques difficultés, à distinguer deux niveaux de lecture selon le public atteint.

Si on s’en tient au point de vue réactif, primaire de la « norme » vilipendée, on est forcément dans la condamnation car choqué et le rejet est immédiat, bref et sans appel.

A un deuxième degré, après relecture de Poésie Portable, on se dit que l’auteur vaut vraiment la peine d’être lu, tant sur le fond que sur la forme, pour son écriture séditieuse, rageuse, sa liberté licencieuse exigeante, d’une intensité pas à la portée du premier pseudo rebelle ou autoproclamé révolté authentique venu. Car c’est un art subtil que de savoir « ingurgiter le maléfice familier qui nous entoure […] en être dissous de l’intérieur […] le vomir sous une forme ou sous une autre. »

Il n’est pas certain que tous ceux qui voient en lui un prophète, un maître es déstabilisation sociale, saisissent les conséquences de la phrase : « le relativisme nous enterrera tous ». L’incompréhension alliée à l’engouement adhésif, au suivisme fasciné n’est sans doute pas plus enviable pour lui que celle due aux préjugés de la « normalité », tant sont variées les manières d’être mal compris.
Sans doute C. Siébert mérite-t-il mieux qu’une reconnaissance confidentielle, mais vu l’étroitesse, la rigueur de sa position, sa retorse complexité, et son habillage intempestif, s’il s’en tient là, on a quelque doute sur l’efficience d’une diffusion plus large.
Poésie portable, c’est une « philosophie à coup de marteau », un point de vue jusqu’au boutiste immunisant contre la bêtise de tous bords, voie mordante et piquante qui n’est pas celle de la facilité et par laquelle il est sûr en l’ayant empruntée de s’être exposé aux foudres et gémonies d’une part, à des interprétations approximatives et partielles de l’autre.

Derrière l’extrémisme de sa posture, il sait laisser adroitement sourdre sa sensibilité d’écorché vif, tout en gravissant les sommets escarpés de « la glace » ou de « la lave » : son présent est « un haut fourneau dans le désert glacé » qui ne connaît que « l’obsession à cœur perdu et sans souci des conséquences ».
Notons, remarque précieuse entre toutes, qu’il n’est pas non plus dupe du « langage, un abus » (89).

Un brûlot superlativement âpre, dont la lecture aguerrit pour autant qu’on accepte d’être bousculé « d’un coup de poing sur la tête » et qu’on en perçoive les ressorts salvateurs. Merci pour la mise à l’épreuve.

« Toutes les manières de voir sont bonnes pourvu qu’on en revienne. » Nicolas Bouvier
« Un poème est une question posée aux autres façons d’être au monde. » Philippe Jaccottet

(Photo : Mathias Richard)

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Une chronique de La place du mort par Yannick Blay pour Prémonition.fr :

Christophe Siébert, originaire de Millau, écrit beaucoup, mais de manière assez confidentielle. Après quelques pornos pour l'éditeur La Musardine dans la collection "Les Érotiques d'Esparbec" et un premier roman, "J'ai peur", paru dans la collection plus grand format du même éditeur, Siébert se voit publié aujourd’hui chez Camion Noir. Ce nouvel ouvrage intitulé "La Place du Mort, série Z existentielle" met en scène un jeune couple de narrateurs anti-héros aussi marginaux qu’immoraux et totalement dévorés par les liens étroits unissant Éros et Thanatos. Ceux qui n’ont pas la même vision laide et pesante de l’univers, du sens ou des choses de la vie sont tous à leurs yeux des morts-vivants et ne méritent que mépris et, accessoirement, annihilation.
À un rythme soutenu, "à tout berzingue", pour reprendre l’expression favorite de Siébert, ce roman (à ne pas confondre avec l'ouvrage du même titre, "La Place du mort", de Pascal Garnier paru l’an passé chez Points) étale donc avec une certaine complaisance les états d’âme, les obsessions et les actes violents et morbides de ces êtres à la dérive. L’auteur ne semble préoccupé que par les toxicomanes, les tarés et les cas sociaux et va parfois très loin dans la démesure sordide et brutale, presque à l’image d’un Peter Sotos ou du premier roman de la chanteuse no wave Lydia Lunch. Mais on pense aussi à "Crash" de Ballard, qui serait réécrit pour le coup par une Virginie Despentes vitupérante et sous speed, écoutant en boucle Noir les horreurs des Bérus, tant la vitesse automobile, les collisions de toutes sortes, l’obscène et le scandaleux hantent cette prose morbide et indubitablement pornographique. Malheureusement, contrairement à l’auteur anglais de "Super Cannes", l’excès et la répétition quasi systématique des scènes érotico-sordides semblent parfois un tantinet gratuites. La rébellion et la soif de vivre, libre et à tombeau ouvert, de l’héroïne s’avèrent parfois aussi destructrices que vaines, voire misérables, notamment lorsqu’elle abandonne son enfant à sa mère alcoolique. De plus, on perd parfois un peu le fil de l’histoire, surtout lorsqu’on change de narrateur et donc de focale, de temps (avec de nombreux flashs-back), ou de lieu, de manière un peu abrupte et impromptue. Cependant, on reconnaîtra à Siébert un style original et hanté ("Ça m’a fait dans le ventre comme un chasse-neige à travers la montagne" ou encore "Nous nous sommes regardés, les yeux allumés, crépitant d’une vie malicieuse et tarée, un sourire de murène en travers de nos gueules") et une facilité déconcertante à se mettre dans la peau d’une harpie vira-goth toute en déviance rock’n’rollienne, totalement désinhibée et profondément scandaleuse. Le lecteur risque bien d’être tiraillé entre attraction et répulsion pour ces êtres parfois par trop extrêmes et dénués de tabous pour le commun des mortels. À découvrir malgré tout, ou justement pour toutes ces raisons, du moins si vous n’avez pas peur des sensations fortes et du sexe sale et purulent où cyprine, sperme et sang giclent de concert dans un monde où l’échec est permanent.

Yannick Blay

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Le cerveau / Re : poésie portable
« le: novembre 13, 2014, 11:48:23 am »
?

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Bonjour à tous,

Quelques précisions sur les prochains Rituels drone :

LE RITUEL DRONE NUMÉRO 6 se déroulera le 29 octobre à la Galerie E-Carré, à Bruxelles, dans le cadre du finissage de l'exposition « Entrailles, détails, bétails » ; au programme aussi ce soir-là : Transient & eerie (expérimental et atmosphérique) et Echos dans la nuit (live mix + textes).

Infos diverses (horaires, localisation, etc.) : http://galerie-e2.org/finissage-entrailles-details/

LE RITUEL DRONE NUMÉRO 7 se déroulera le 31 octobre à côté d'Amiens, dans le cadre d'une soirée consacrée à Samonios, le nouvel-an celte ; au programme aussi ce soir-là : Ö'b3Ron (drone ambient) et Les morts vont bien (formidable duo apocalyptique indus rituel génial).

C'est une soirée privée sur invitation uniquement, mais ceux qui ne voudraient pas rater ça (et, putain, je les comprends) peuvent m'écrire à konsstrukt@hotmail.com et je verrai ce que je peux faire)

LE RITUEL DRONE NUMÉRO 8 se déroulera le premier novembre à Lille, dans le cadre d'une soirée privée organisée par Nuit et brouillard et le B.A.R #2 ; au programme : rien que ma gueule, et même s'il y a trop de monde, vu que c'est dans un petit lieu, on remet ça le lendemain.

Réservation (obligatoire, gadjo !) et infos : contact@nuitetbrouillard.com

LE RITUEL DRONE NUMÉRO 9 se déroulera le 4 novembre à la Fermatozoïde, au Theil-de-Bretagne (à côté de Rennes), dans le cadre des joyeuses soirées organisées là-bas ; avec aussi au programme CHROMB ! (quatuor de musique de chambre capitonnée à destination des adultes émotifs et des enfants sauvages, avec une prise au bout pour le brancher à l'électricité ).

Infos diverses (horaires, localisation, etc.) : https://www.facebook.com/events/699360450148252/?ref=51&source=1

LE RITUEL DRONE NUMÉRO 10 se déroulera le 10 novembre à la galerie de la Coifferie à Clermont-Ferrand, dans le cadre de la fin du monde qui est pour tes oreilles ; et au programme aussi ce soir-là : Petass (apocalyptic dance, one-man-band d'un des membres de Merde Fantôme), Cavophone (deviens sourd et soit heureux), Orchestre national de quatre pistes (des bouchons d'oreille et du sang), Récré A2 (ninendo-core et antidote).

Infos diverses (horaire, localisation, etc.) : https://www.facebook.com/events/554311784670287/?fref=ts

Transient & eerie : http://www.deezer.com/album/8510957
Ö'b3Ron : https://www.youtube.com/watch?v=-qh9XXzXmvE
Les morts vont bien : https://www.youtube.com/watch?v=Q7_BRLl4V3o
CHROMB ! : https://www.youtube.com/watch?v=o2BMlcnICn4
Petass : https://www.youtube.com/watch?v=rcx6TrCc5mM
Orchestre national de quatre pistes : https://www.youtube.com/watch?v=QskBhBJqt1c
Récré A2 : https://www.youtube.com/watch?v=d_0b67-YXZ0&list=PL64CEBEB59A36C841
Christophe Siébert : http://konsstrukt.wix.com/christophe-siebert#!video/c1pz

Et au plaisir de vous voir à l'un de ces événements !

Bisous,
Christophe

14
Le cerveau / actualités d'octobre de christophe siébert
« le: octobre 15, 2014, 13:18:39 pm »
Bonjour à tous.

Comme vous le savez sans doute déjà, je n'ai pas eu le prix Sade. Alain Guiraudie l'a obtenu au finish pour un bouquin qui manifestement le mérite (je ne l'ai pas lu, mais ce que je connais de son cinéma me met en confiance) ; quant à moi, il semblerait que ça ne s'est pas joué à beaucoup. Une prochaine fois peut-être ? Espérons.

En parlant du prix Sade : Nuit noire, qui était sorti en 2011 chez Rivière Blanche et avait été sélectionné l'année suivante pour ce même prix, est réédité ces jours-ci chez Trash Éditions, dans une version plus proche du manuscrit original, voici ce qu'en dit l'éditeur :

« Prolétaire de la littérature depuis 2007 et écrivain de séries Z existentielles depuis 1998, Christophe Siébert est un auteur prolifique, auteur de nombreux romans, nouvelles, poèmes. Il est également le fondateur de la revue konsstrukt.
Il vient de publier La place du mort au Camion Noir.
Chez TRASH, nous sommes tombés amoureux de son roman édité chez Rivière Blanche, intitulé Nuit Noire.
Nous proposerons donc une nouvelle édition de ce roman, corrigée par l'auteur à cette occasion.
Un texte sans concession, sombre, oppressant, glauque au possible qu'il nous tarde de vous faire (re)découvrir ! »

Et aussi :

« Nuit Noire, ou le bouquin le plus violent, le plus malade et le plus extrême de Christophe.
Nuit Noire, qui avait été refusé partout jusqu'à ce que Philippe Ward accepte de l'éditer chez Rivière Blanche en octobre 2011. Nuit Noire, qui a failli avoir le prix de Sade en 2012.
Et qui ressort chez nous, donc. Alors pourquoi cette réédition ? Eh bien tout simplement parce que nous avons estimé qu'un roman aussi puissant méritait une deuxième vie, et parce qu'il a parfaitement sa place dans notre catalogue. Et parce que cette ressortie va nous permettre de vous présenter un vrai "director's cut". Car le texte, même s'il a été conservé "dans son jus" et ne comportera donc aucune différence perceptible, a été soigneusement relu, revu et corrigé.
En outre, il a été amputé de toute l'histoire additionnelle commandée par Rivière Blanche pour satisfaire au calibrage maison. Nous n'avons gardé que le récit principal en trois parties: le nerf, les muscles et les os. Cette version sera par conséquent définitive, car elle est celle voulue par l'auteur. Que nous accueillons donc parmi nous avec une joie non dissimulée.
Nuit Noire, après avoir été le 33ème livre de la collection "Noire" de Rivière Blanche, portera dès le mois de novembre le numéro 11 de la collection TRASH. Qu'on se le dise, Guillaume Lévy et Marc Musso ne sont pas les seuls à voir leurs bouquins ressortir au format poche. »

Ce sera donc début novembre, et avec une préface, s'il vous plaît, d'Emmanuel Pierrat (avocat, éditeur, président du jury du prix Sade, spécialiste de la censure et de la littérature déviante, etc.) !

Toutes les infos bientôt ici : http://trasheditions.blogspot.fr/

MES PROCHAINES DATES :

18 octobre : rituel drone numéro 4 à l'Asile 404 à Marseille (135 rue d'Aubagne), dans le cadre de l'exposition Espace entre, ouverture des portes 20h, prix libre mais nécessaire, toutes les infos ici : http://asile404.org/espace/

21 octobre : rituel drone numéro 5 à Manifesten à Marseille (59 rue Thiers), ouverture des portes à 20h, prix libre mes nécessaire.

29 octobre : rituel drone numéro 6 à la Galerie E-carré à Bruxelles (5 rue des Ursulines), renseignements complémentaires à suivre.

31 octobre : rituel drone numéro 7 à Amiens, renseignements complémentaires à suivre.

01 novembre : rituel drone numéro 8 à Lille, renseignements complémentaires à suivre.

En novembre : je serai présent à la ZAL 2014 (à ce propos, un petit reportage ici sur l'édition 2013 : https://www.youtube.com/watch?v=BYoKvi5rME0), et il y aura des rituels drone à Montpellier, Toulouse, Clermont-Ferrand et Saint-Étienne – restez attentifs !

A propos du rituel drone, je voudrais, une nouvelle fois, attirer votre attention sur Aurore *U*, qui depuis la tournée Porcherie crée et fabrique mes masques, et qui pour le rituel drone a également conçu mon costume. Son travail est très original, de qualité, solide, adapté aux conditions du travail sur scène ; Aurore *U* a cette qualité rare de comprendre les significations et les enjeux de votre projet sans avoir besoin de discuter quinze ans avec vous, et de réussir à traduire ça en un masque qui, à la fois est parfaitement dans le sujet et à la fois évite tout caractère littéral ou bêtement illustratif ; si vous êtes musicien, théâtreux, cinéaste, vidéaste, performeur, etc., je vous encourage vivement à aller jeter un œil à ses sites. Considérant toutes les qualités que je viens d'énumérer, les tarifs d'Aurore *U* sont tout à fait abordables.

Voici ses divers sites :

Masques et créations textiles : http://auroreu.wix.com/pantyhose
Photos et dessins : https://www.flickr.com/photos/aurore-u
Sous le nom d'Archilux : http://archi-lux.tumblr.com/
Sa page Facebook : https://www.facebook.com/aurore.bela?fref=hovercard

UN PEU D'AUDIO :

J'ai composé, pour une compil à paraître bientôt, une chanson-drone d'une dizaine de minutes ; je suis en train de travailler, pour une sortie future chez NKS International Muzakillabel, à une chanson-drone d'environ 45mn. Pour vous donner une petite idée d'à quoi ça pourrait ressembler, voici quelques morceaux plus anciens :

Un extrait de la tournée 2013 (avec Horse gives birth to fly) : http://christophesibertcolletifkonsstrukt.bandcamp.com/album/horse-gives-birth-to-porcherie-portable

Et cet album, qui était sorti en même temps que Porcherie, et qui contient deux titres : Abstinence (lecture + drone du texte du même nom), et Ghost in the monotron (instrumental) : http://christophesibertcolletifkonsstrukt.bandcamp.com/album/porcherie

Bonne écoute !

Et comme ça fait longtemps que je n'ai pas mis en ligne de nouveaux poèmes, en voici une demi-douzaine, pour conclure cette lettre :

58

J'ai le privilège
Immense
De me
Lever chaque matin à l'heure que je veux
Et vous
Êtes-vous
Une mouche
Forçant
Forçant
Pour s'a
Rracher
De la
Sonnerie
Mais c'est peine perdue toujours elle vous dévore ?

*

59

Ève Ruggieri
A des nichons
Délicieusement
Sixties

*

60

Lire la presse
Lire les magazines
Écouter la radio
Regarder la télé
C'est peu à peu se rendre à l'évidence que le monde, les gens, n'existent pas, n'ont jamais existé, que tout est séparé
Restent les romans

*

61

Mon fantasme numéro 1, en tant que fraudeur permanent de la SNCF, ce serait de tomber sur un contrôleur qui connaisse mes livres. Au moment de rédiger le PV, avec son petit stylet et sa petite machine, il lit ma carte d'identité, il voit mon nom et me demande : mais vous êtes ?..., et moi je réponds oui, alors il continue : je peux vous demander ?..., et moi je réponds bien sûr, et je signe deux fois, une fois le PV et une fois le bouquin qu'il me tend, qu'il a toujours sur lui, qui a changé sa vie.
Si un tel truc m'arrivait, est-ce que je banderais ?

*

62

Le jour où tu baisses les bras
Le jour où tu deviens
Un artiste local

*

63

Cette idée bien française
Cette idée bien crasseuse
Qui dit que l'uniforme engendre l'harmonie
Cette idée bien française
Ce dix-neuvième siècle
Qui toujours se demande si chaque citoyen a bien rangé sa chambre
Ce dix-neuvième siècle bien dégagé derrière les oreilles
Et qui dure, et qui dure
Qui dure

*

64

A la Gare de Lyon en grève deux adultes qui courent pour attraper leur train et un enfant qui court pour sauter dans les bras de son papa.

*

65

Ça existe pas
Les conséquences
C'est un truc inventé pour faire peur aux gens
Pour les éduquer
Ça existe pas
Les conséquences
Foutez-vous ça
Dans le crâne

*

66

Quand je baise
Je ne suis jamais complètement
A l'aise

MERCI A TOUS ET A BIENTÔT,
Christophe Siébert

P.S. : mon correcteur orthographique ne connaître pas le mot « birth ». Il me propose « biroute » à la place, ce qui, au fond, n'est pas dénué d'une certaine logique.

15
Le cerveau / Re : newsletter 20 septembre
« le: septembre 20, 2014, 13:44:10 pm »
Pour vous détendre, un nouvel extrait (toujours du premier jet non relu, donc toujours probablement truffé de fautes et de lourdeurs) de Descente, le roman sur lequel je travaille en ce moment :

— Je t'ai déjà raconté, le désert ?
— Le désert ? Non, jamais.
— J'ai envie de t'en parler. Ca ne t'ennuie pas ?
— Bien sûr que non, mon chéri.
L'appartement de Cynthia est luxueux. Cent vingt mètres carrés au dernier étage, une vue imprenable sur tout le centre historique, on aperçoit même le Vatican en faisant un effort, l'ameublement est contemporain et dépouillé, d'un goût à la fois sophistiqué et luxueux, ce qui contraste nettement avec la décoration. Là où on attendrait des reproduction d'art contemporain et quelques objets précieux, des antiquitiés ethniques, par exemple, mais rien de tout ça. A la place, des posters du Grand Bleu, de 37°2 Le Matin, de Seven, de Léon, de Jimmy Hendrix, de Nirvana (énormément), des Doors (beaucoup), tous punaisés sur les murs parfaitement blancs et commençant à se détendre ; des peluches, des coussins, des breloques d'inspiration indiennes, quelques accessoires en provenance, sans doute, d'Ikea.
La question, c'est : quel type de déco choisit une fille séquestrée dix ans et disposant d'un budget illimité. La réponse à cette question fascine Churchill. Dans le cas de Cynthia, la réponse est simple : elle recrée un environnement familier. Elle ne cherche pas à élargir son horizon esthétique ou culturel mais plutôt, manifestement à se rassurer.
Il y a aussi des barreaux aux fenêtres et, à la porte d'entrée, une serrure électronique ainsi qu'un visiophone, et elle est protégée, ainsi que les fenêtres, par une alarme muette reliée au personnel de service et de sécurité.
Il y a trois personnes dans la maison en plus de Cynthia. Un cuisinier, un valet de chambre (qui sert également de coiffeur et de maquilleur), un factotum, un homme de ménage, une esthéticienne, un médecin. Les quatre premiers vivent sur place, les deux autres ne viennent que lorsque leur présence est nécessaire. Tous les six, en plus de leur qualification principale, ont également en charge la surveillance de Cynthia. L'ensemble des coûts (location de l'appartement, nourriture, salaires des employés, dépenses diverses effectuées par Cynthia sur Internet, etc.) est pris en charge par Churchill.
Cynthia, qui auparavant était call-girl indépendante, n'a pas quitté cet appartement depuis cinq ans au moment où a lieu cette conversation. Elle en est prisonnière. D'après Churchill, elle le quitterait au bout de dix ans à son service – et c'est tout autant un service sexuel qu'affectif, ce qu'on appelme le « girlfriend experience ». Elle est payée. L'argent est bloqué sur un compte auquel elle aura accès à sa libération. Elle a de l'argent de poche, qu'elle peut dépenser en achats sur le net ou bien en passant commande à son personnel. Par ailleurs, ses parents sont sous surveillance. Ils ignorent évidemment tout de sa situation mais si elle commettait le moindre faux-pas (comme se suicider), ils seraient aussitôt tués. Les premiers mois ont été difficiles. Il a fallu qu'elle s'habitue. Il y a eu des épisodes violents, tristes. Maintenant ça va. Elle a pris le pli. Elle joue le jeu. Elle se drogue beaucoup. Elle fait beaucoup de banc de bronzage. Elle achète en ligne beaucoup de vêtements de luxe. Bien entendu, elle n'a accès ni à Facebook, ni à rien qui permette de communiquer avec l'extérieur. Pas de blog, pas de chat, pas de forum. Tout est filtré, surveillé, il y a un spécialiste en charge de la question.
Churchill à l'extérieur fait ce qu'il faut pour donner le change à l'extérieur, avec des putes de luxes, voire avec des maîtresses, mais il n'y a qu'ici qu'il est véritablement excité. Il n'y a qu'ici qu'il peut prendre du plaisir.
Outre ce plaisir qu'il prenait, c'était la seule personne à qui il pouvait tout dire. Il se confiait à elle complètement. Il lui parlait aussi bien de ses pensées les plus intimes, que des aspects les plus secrets de son travail. S'il pouvait se sentir aussi libre avec elle, s'il pouvait à ce point lui faire confiance, c'est parce qu'il savait très bien qu'elle ne serait jamais libérée. Cette histoire de dix ans était un mensonge. La vérité, c'était qu'un jour il se lasserait d'elle, la ferait tuer, en prendrait une autre. La précédente, qui était aussi la première, avait duré trois ans. Celle-ci, au bout de cinq, était encore là et il ne paraissait pas se lasser d'elle. On verrait.
Avait-il besoin de cette fiction, de cette promesse de libération à une date déterminée, et de ce faux compte en banque, pour s'assurer sa loyauté ? Le menace de tuer ses parents ne suffisait pas ? Il pensait que non. Il pensait que personne n'était loyal aux siens au point de leur sacrifier leur propre vie. Mourir pour les siens, peut-être, pourquoi pas. Mais offrir son existence entière, à perpétuité, en échange de la vie sauve des siens, il ne croyait pas ça possible. Il était persuadé que, quelque soit le châtiment qu'on infligerait à ses parents, si Cynthia venait à apprendre qu'elle était ici pour toujours – dumoins, qu'elle y était jusqu'à ce qu'on se lasse d'elle et la tue –, elle se suiciderait. Elle tenterait de fuir, peut-être. En tout cas, la sauvegarde des siens ne serait pas du tout une priorité. La menace exercée sur les siens serait sans effet.
Ce genre de pensée offrait un résumé assez exact de la psychologie de Churchill. Churchill était ce genre de type.
Cynthia vingt-quatre ans. Elle est très belle. Ce qui frappe d'abord chez elle, c'est sa peau mate, ses yeux verts et la grâce de ses mouvements. Elle est fine et musclée, une allure de danseuse, elle a fait quelques années de danse quand elle était petite, avant que ça ne tourne mal. Elle a des cheveux bruns, longs jusqu'à la moitié du dos, elle joue beaucoup avec, les sculte, les teint, les emmêle en coiffures incroyables et truffées de pinces, élastiques, chouchous de toutes les couleurs, elle a un beau cou, elle aime le mettre en valeur, ou alors elle ignore la beauté de son cou, ou bien elle s'en fout, et juste elle aimer jouer avec ses cheveux. Elle se vernit les ongles des pieds et des mains, qu'elle a parfaitement manucurés, vernis tantôt criards, tantôt noirs, elle change très souvent de vêtements, de style, d'allure, avec une préférence pour ce qui est court, moulant et de couleur vive, elle aime les paillettes, elle aime ce qui brille, et ça vaut aussi pour les bijoux ; elle passe des heures à s'occuper de tout ça, à choisir, à coordoner, à organiser, à recommencer, peut-être est-elle superficielle, peut-être fait-elle ça pour faire diversion ; le reste du temps elle lit des mangas (surtout les vieilles séries destinées aux jeunes garçons, comme Naruto, Cow-boy Bebop ou Samourai champloo) et regarde des DVD (comédies romantiques, films d'horreur teenage, les séries vintage (Sopranos, True Detective, tous les trucs de l'âge d'or) ; une ou deux fois par semaine, elle reçoit Churchill.
— Je vais te raconter.
En général il reste une demi-douzaine d'heures, au cours de laquelle il la baise de manière assez classique (rien à voir avec les perversions dont il peut faire preuve par ailleurs), il lui parle, lui raconte sa vie comme aujourd'hui l'épisode du désert, ou bien lui parle de son métier, ou de cetains de ses projets, et puis il repart, jusqu'à la prochaine fois.
Elle s'allonge sur le grand lit, il s'allonge à côté d'elle ; ils sont nus tous les deux. Elle vient de sortir de la douche, lui est encore un peu essoufflé. Il regarde le ciel, à travers la fenêtre, à travers les barreaux, la beauté du ciel romain, il pense à son avion, il pense à des tas de choses.
— Ce que j'ai appris dans le désert, la chose principale que j'ai apprise, je veux dire, la plus importante, c'est que le monde est comme un linge froissé, plein de plis. celui qui sait le déplier, le tendre, le défroisser, ne voit pas mieux le monde, comme on pourrait le croire, non. Il voit tout autre chose. Il voit un autre monde, et ne peut plus voir l'ancien, quelque soit les efforts qu'il fasse. La vérité est un lieu dont on ne revient pas. Tu comprends ?
— Oui.
Elle le regarde avec admiration. Ses sentiments à son égards sont compliqués, ambigüs. C'est l'homme qui l'a emprisonnée, qui menace ses parents ; c'est l'homme aussi qui lui permets d'assouvir tous ses caprices, et qui la rendra riche (elle ne sait pas qu'il fait semblant de la payer, que le compte en banque où il est sensé verser une somme faramineuse qu'elle pourra toucher dans dix ans, à sa libération, n'existe pas, et qu'il n'y aura pas de libération mais une balle dans la nuque et cent litres d'acide qui feront disparaître jusqu'à la moelle de ses os) ; elle le trouve intelligent et c'est ce qui la trouble le plus, elle n'a jamais pu s'empêcher d'admirer les hommes intelligents, tous ceux dont elle est tombée amoureuse étaient intelligents. Bien sûr, elle ne tombe pas amoureuse de Churchill, de l'homme qui l'a emprisonnée, mais il est intelligent, il la traite bien, est-elle plus mal lotie que si elle était libre ? Elle se pose la question, elle se déteste de se la poser, et puis il y a aussi l'aspect sexuel : avec elle Churchill n'est pas tordu – alors que beaucoup d'autres l'ont été, des clients mais aussi des amoureux –, il est attentif, prévenant, il lui donne du plaisir. Elle a entendu parler du syndrome de Stokholm, des tas de films, des tas d'épisodes de série traitent du sujet, mais elle a beau le savoir, c'est difficile de ne pas s'y laisser prendre.
Quand elle le regarde avec admiration, quand elle passe la main sur son torse tandis qu'il lui raconte le désert, elle est sincère, et c'est ça qui la désole.
— J'ai acheté une tente et tout ce qu'il fallait à Almeria, mais la première nuit, je ne l'ai pas passée dans le désert. Je l'ai passé dans une espèce de motel, un truc à touriste, la nourriture était infeste mais personne n'était vraiment là pour boire, juste à la sortie de la ville, à cinq cent mètres des dernières maisons, en bordure de route. Ca s'appelait la Casa Rafael Almeria. A l'intérieur il y avait un comptoir qui occupait toute la largeur de la salle, et tout le monde se pressait pour commander. On buvait de la bière et du vin rouge, surtout. Il y avait des tapas mais personne n'y touchait. Le reste de la salle était occupé par des présentoirs et des machines à sous. Tout le monde était dehors, il y avait une terrasse montée sur une estrade en bois, sous un auvent, et un vaste parking où étaient garés voitures et cars de tourisme. Il y avait peut-être une centaine de personnes, la moitié repartirait bientôt, le reste dormait là. Tout le monde discutait, ça parlait Français, Espagnol et Allemand, tout le monde se débrouillait. J'ai passé une bonne soirée, pour une fois dans mon existence, j'étais à l'aise avec les gens, détendus – sans doute parce que j'étais sur le point de me retirer loin des hommes. Je n'en parlais bien sûr à personne mais j'en retirais une secrête jouissance, de jouer au touriste, à l'homme normal, alors que je n'étais déjà plus parmi eux, que j'étais un exilé volontaire, un presque fantôme. A l'aube j'étais debout, la lumière était gris perle, j'ai fait quelques pas sur le parking, il y avait un peu de vent et mes pas soulevaient le sable très fin qui recouvrait le sol et se transformait en nuage de poussière à chaque voiture qui passait, mais il n'en passait aucune, tout était immobile, tout le monde dormait. Je n'avais rien prémédité, je ne rodais pas parmi les voitures à la recherche de quelque chose à voler, mais quand j'ai vu ce camescope posé sur le siège arrière d'une Clio je n'ai pas pu m'empêcher de le piquer. Ouvrir la porte était un jeu d'enfant, je savais faire ça très bien, et ça faisait tellement longtemps que je n'avais plus de quoi prendre des images. Je savais que dans le désert, pendant ma retraite, ça m'aurait manqué. Alors, je ne me suis pas gêné pour le prendre. Et puis je suis parti, à pieds. J'aurais pu, tant que j'y étais, prendre la voiture elle-même, mais je n'en avais pas l'usage. Je voulais marcher. Très vite j'ai quitté la route et j'ai longé le Rio Andarax. J'avais un peu étudié les cartes. Je pouvais le longer jusqu'à Santa Fe de Mondújar, ensuite il faudrait que je bifurque au nord et j'entrerai dans le désert proprement dit. Ca m'a pris la journée de faire tout ce trajet, et le soir venu je plantais ma tente aux portes du désert, près d'un minuscule cours d'eau. Le lendemain j'ai effectué une nouvelle journée de marche et, en fin d'après-midi, je me trouvais au cœur du désert de Tabernas. J'ai planté à nouveau ma tente, pour de bon cette fois, résolu à rester ici au moins tout un mois, et à être le moins actif possible. Uniquement méditer, filmer le désert, rien d'autre. Il a fallu d'abord que je m'organise, je veux dire, que j'organise ma subsistance, et tout ce qui concernait ma survie d'une manière générale. J'ai commencé par installer un piège à rosée, c'est à dire un filet qui recueillait la rosée et la laissait couler ensuite dans une gourde – ce dispositif m'apportait environ un litre d'eau par jour, ce qui était à peu près le quart dont j'aurais eu besoin, ensuite j'ai fait un feu. Les nuits étaient très fraîches et le feu, que je laissais brûler jusqu'à l'aube, éloignait les insectes, les serpents et les scorpions. J'avais également une arme à portée de la main, on ne sait jamais. J'avais trouvé un recoin du désert éloigné de tout, des vieux studios de cinéma transformés en village touristique, éloigné de la voie rapide, éloigné des hameaux, j'étais réellement au milieu de nulle part mais pas à l'abri d'une mauvaise rencontre, il fallait tout de même que je sois prudent. Je n'avais pas pris à manger. Je comptais jeûner pendant trente jours – la retraite du Christ au désert en avait duré quarante, je sais, mais mon intention n'était pas de participer à un concours. Je n'avais pas encore découvert Genet ni Mishima, ni Crowley, je ne connaissais personne, ceux-là, tu le sais, c'est Napoléon qui me les ferait découvrir, mais ce serait plus tard, après le désert ; j'avais juste lu l'ancien testament et Burroughs, et c'est la fusion des deux qui avait fait germer cette envie d'aller me perdre dans le désert, et d'y provoquer les visions. Il y avait eu la drogue, aussi, et les visions qu'elle avait induite, les premières expériences avec les démons, je voulais comprendre, il y avait bien entendu le chagrin consécutif au départ de Charlotte, il y avait mes problèmes sexuels, sentimentaux, existentiels, que je voulais résoudre, et j'avais l'intuition que cette retraite au désert, ce dénuement absolu, allait faire de moi un autre homme – j'avais la certitude que je ne mourrais pas. Dès le deuxième jour, d'ailleurs, je me suis passé de tente. Il faisait affreusement chaud la journée, affreusement froid la nuit ; la transition était très brève, très rapide. Je m'animais un peu, durant ce moment où la température était douce, j'avais des pensées cohérentes. Le reste du temps je cuisais, ou bien je grelotais, épuisé par le manque de nourriture, totalement déshydraté. Je demeurais en permanence enveloppé de ma couverture de survie, assez grande pour me contenir tout entier, ainsi ma sueur ne s'évaporait pas. Le litre d'eau que je recueillais quotidiennement grâce à mon piège à rosée était loin de me suffire.

Voilà, c'est tout pour cette fois. Portez-vous bien. Ne lisez pas les cochonneries de la rentrée littéraire. Je vous aime.

Christophe Siébert.

PS : j'ai en stock, pour une brève période, une dizaine d'exemplaires de La Place Du Mort, J'Ai Peur et Poésie Portable. Ecrivez-moi (konsstrukt@hotmail.com) si vous souhaitez vous procurer une version dédicacée de l'un ou l'autre de ces livres.

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