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Messages - Tehanor

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Le cerveau / Une excuse pas valable
« le: octobre 16, 2006, 21:21:05 pm »
ouaip, hésitez pas sinon à me critiquer sur la forme. Ca fait 36 fois que j'me corrige, que j'reformule, mais j'passe p'tetre à côté de trucs évidents. Pas facile d'aborder le dialogue parlé en essayant un minimum de coller à ce qui s'était dit pour mon soucis d'historien.
C'est la première fois que j'm'y colle...

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Le cerveau / Une excuse pas valable
« le: octobre 14, 2006, 18:12:19 pm »
C'était une journée de merde, et j'avais décidé d'enfiler mon mode blasé. Envie de rien, saoulé de tout, et plus particulièrement de ce sentiment de dépit qui m'envahissait à l'idée de franchir la porte de cours y affronter une pluie de blabla abstrait et complètement inutile.
« Allez vas-y, viens ce soir, faut sortir un peu, voir des gens, me lance Émile en me tapant sur l'épaule. Et puis comme ça, on sera déjà sur place pour aller à la Condition Publique. »
La prof s'était mise en tête de nous emmener voir la répétition d'une troupe de danse contemporaine. Un truc qui m'emmerderait au plus haut point, mais il fallait reconnaître que l'aspect pratique de la proposition, qui résidait dans le fait de se trouver à proximité de la salle où on comptait passer la soirée après, avait de quoi me la rendre assez intéressante au final. Je fais la moue du type moyennement convaincu.
« Mouais. A la limite.
- Ok. Et tu comptes venir en caisse ?
- Ouais. On a cas tous se donner rendez-vous chez toi si tu veux, comme ça, on y va ensemble.
- Et on se dit quelle heure ?
- Je sais pas. 6H30 ?
- Ouais, 6H30 c'est bien.
- Enfin, 6H30... J'essaierai de pas trop traîner quoi. »
Et je me retrouve quelques heures plus tard dans un gymnase, à regarder trois danseurs se dépêtrer sur du Wax Tailor, sans trop savoir quoi en penser. En fait, leurs déhanchements bizarres me donneraient presque envie d'en rire, alors je pince les lèvres en me sermonnant de manière un peu schizophrène :
« Crétin, t'y connais juste rien. Y'a une forte symbolique derrière ces corps en mouvement. La création ne repose pas sur des extensions de notre corps mais sur le corps lui même ! C'est beau, tout simplement.
- Ouais et alors ? Y'a rien de vraiment transcendant là dedans. J'trouve que ça rime à quedalle.
- Rappelles toi ce que pensent les gens de tes musiques barrées. Tu connais suffisamment ça pour avoir un peu de compréhension, et te dire que c'est juste parce que t'y es pas sensible.
- Peut être, mais c'est naze quand même. Danser, c'est une manière de recevoir la musique, ça vaut pas le coup d'en faire un art. Bon ok, les danses rituelles ont leur utilité sociale, à la limite, tout comme celles des minets dans les boîtes qui ont leur utilité nuptiale. Regarder tout ce petit monde s'agiter, c'est marrant cinq minutes, mais pas de quoi s'en aller lui foutre une logique de spectacle. C'est visuellement ennuyeux.
- Putain, mais c'est de penser l'art en terme d'utilité qui est naze. Et puis tu crois pas que Gerry, dont t'arrêtes pas de faire l'éloge, n'est pas aussi visuellement chiant que ce que tu vois là ?
- Si, mais en même temps, tu ressens trop l'oppression des mecs qui se savent pommés dans le désert, et c'est ça qui est génial.
- C'est la même chose ici. Le visuel au service d'un ressenti émotionnel.
- Ah, tu commences à me gaver. Allez, on va dire que j'y suis pas initié si ça peut te faire plaisir.
- Je préfère ça oui. »
La pièce se termine. La chorégraphe explique vite fait son délire, deux trois détails, et comme elle finit rapidement par ne plus avoir grand chose à dire, agresse le public en l'accablant du mutisme qu'il lui renvoie.
« Allez, j'suis sûr qu'il y a des questions là, j'ai vu une main se lever tout à l'heure. »
Silence. Je l'imagine les yeux injectés de sang, hurler sur la femme bedonnante du premier en rang.
« ALLEZ BORDEL ! CRACHES MOI UNE PUTAIN DE QUESTION SINON JE L'ARRACHE DU FOND DE TA GORGE AVEC MES MAINS ! »
Un type se jette à l'eau.
« Euh... Sinon, vous avez répété combien de temps pour monter cette pièce ? »
Nul doute qu'elle attendait mieux, mais ça lui permettra au moins de combler le vide pour quelques minutes. Sont marrants ces gens, à toujours chercher une raison, une justification, ou quelconque utilité à ce qu'ils font ; et le public de l'accepter juste parce qu'il paraîtrait que ça aide à comprendre l'oeuvre. Ben ouai, pourquoi pas. Qu'on vienne pas me dire après que l'art se ressent plutôt avec les tripes qu'avec la tête.
La dernière question vient d'une meuf de ma classe, qui secoue les mains en parlant d'une manière artificiellement excitée.
« Oui, j'avais une question. Bon, je suis désolée, ça va peut être vous paraître indiscret ce que je vais vous demander, mais je voulais savoir... Pourquoi avoir pris la thématique du bonheur ? Je veux dire, c'est du vécu ou... ? »
Je prends mon air faussement outré et avoue à Émile trouver qu'elle y va un peu fort avec sa question, ce qui nous fait doucement ricaner.

Bon, nous voilà à la Condition Publique.

Oh puis non, nous voilà dans ma caisse. Émile et moi, passablement éméchés par les bières sifflées tout au long du concert, nous motivons passablement pour faire la teuf en Belgique. Ça tombe bien pour notre semblant de conscience citoyenne, Fabien pouvait conduire sous le taux d'alcoolémie autorisé. On repasse vite fait à la Condition pour voir sur leur borne Internet le programme du Fuse et de quelques autres boîtes bruxelloises. Ok, un jeudi soir, c'est pas trop la teuf. On retourne passablement sur Lille, appelant chacun dans notre coin pour pister un after valable.

On rejoint finalement un pote qui s'appelait Cédric, un peu comme moi. Lorsqu'on arrive dans le bar, il discute avec une nana kaki-beige, le nez méchamment percé de gros anneaux. Ses yeux magnifiques sont barrés d'une mèche rousse, qui lui donne l'air d'une kepon tombée dans la fashion frange attitude.
Les enfoirés ont l'air bien plus pétés que nous. Qu'à cela ne tienne, je commande une Delirium Tremens. La fausse kepon en plastoc nous demande d'où on vient.
« P'tain, j'aurai trop voulu y aller à ce concert ! Y'a plein de potes qui m'ont dit du bien de Gong Gong.
- Wah, t'inquiètes pas. T'as rien loupé, c'était pas terrible, je lui réponds.
- Ah bon ?
- Aaah, il est dur, intervient Émile, faut pas l'écouter. »
J'essaie donc de défendre ce qui pourrait apparemment me donner une certaine coolitude à l'égard de la femelle.
« Ben disons que c'est sympa pour écouter autour d'un bol de cacahuètes, mais pas de quoi s'extasier non plus.
- Ah, c'est bizarre que c'est de la merde. J'en ai eu de très bons échos pourtant.
- J'ai pas dit que c'était de la merde.
- Ben un bol de cacahuètes, c'est pas terrible quand même.
- Ouais mais faut pas forcément le prendre de manière péjorative. Pour moi, un truc qui s'écoute autour d'un bol de cacahuètes, c'est quelque chose de sympa, mais sans plus quoi. »
Je sens remonter la rancune que j'avais éprouvé à voir le groupe sur scène avec trop de matériel que j'aurai difficilement eu les moyens de me payer.
« Ok, les mecs ont un putain de matos. Et ils savent s'en servir. Mais y'a rien qui ressort de leur truc. Des compos banales et sans âme, du déjà entendu. »
Je m'enfile la bière en pensant à la suite de ma conversation qui ne tenait plus que sur un fil dentaire.
« Parcontre, y'a un truc sympa qui joue bientôt la bas, c'est Cyan & Ben. J'te conseille vivement d'y aller parce que ça défonce bien. C'est un peu comme Portishead, un truc cool pour quand tu déprimes. J'suis deg' de pas pourvoir y aller.
- Ah nan, ça n'a rien à voir avec Portishead. Pourquoi tu peux pas y aller ?
- On joue avec mon groupe la même date.
- Ouai, moi j'irai les voir de toute façon, c'était déjà prévu au programme. »
Elle gagne un point dans mon estime, et moi, je pose une dernière fois ma pinte sans relever les yeux, pour mieux accepter d'être à court de discussion. L'éléphant gravé sur le verre me dit que je n'arriverai pas à la draguer si j'continue de trimballer ma tchatche de merde partout où je vais.
Cette fille dégageait une sorte d'assurance qui ne me laissait pas de marbre. J'apprenais plus tard, en filoutant d'une oreille distraite une bride de sa conversation avec pas moi, qu'elle faisait du théâtre (ou des études théâtrales plus précisément mais peu importe, l'un appellant souvent l'autre) et mettais l'aura qu'elle émanait sur ce seul fait.
Pour l'instant, on se retourne chacun de notre côté de comptoir et je déclame à Fabien toute mon admiration pour son renoncement à l'alcool qui me serait d'une torture psychologique difficilement soutenable pour l'alcoolo – occasionnel, je précise à ce moment pour me défendre du regard barbu que me jette le barman, l'air de dire « petit joueur, tu bois deux bières et tu fais ton malin » – que je suis. Je dis peut être ça car je commence à sentir la Delirium Tremens venir compléter ce qu'avait déjà entamé la bière de la Condition Publique – mais ça, le barman le savait pas, ah ouais. Dire que les deux larrons qu'on vient de rejoindre en sont déjà à leur cinquième, m'étonne pas qu'ils aient l'air défoncés.

Puis vint l'heure de se casser. Émile, déterminé à aller finir de nous pochtronner la gueule au Kiosk avec mes thunes. La belle kepon, traînant des bottes en prétextant s'y faire toujours draguer par des lesbiennes. Moi, traînant du pied pour essuyer la belle merde que je venais d'écraser. Fabien, décidant quant à lui de retrouver son bel apart' pour pionser.
Il fait bien, car le bar sera aussi vide qu'un PMU en pleine campagne picarde.
On siffle quand même une ou deux bières, question de pas être venu pour rien quand même, et l'autre Cédric, qui s'amusait à me chaparder le prénom depuis le début de la soirée, passe aux aveux :
« Tu sais ? On se connaît pas trop tous les deux, mais j't'aime bien quand même.
- Ça me fait plaisir que tu me dises ça, je lui fais, parce que c'est réciproque.
- Ah ouais ? Ah ben ça me fait plaisir aussi. Au fait, j'aime bien les mails avec tes histoires, que t'envoies comme ça, de temps à autres à toute la classe.
- Ouais mais t'es plus dans la liste de l'IUP, si ? J'en ai envoyé un nouveau y'a pas longtemps mais je sais pas si tu l'as reçu.
- Si, j'y suis encore. Je sais plus lequel j'ai reçu dernièrement mais je sais que j'reçois des trucs comme ça de temps en temps »
Ça me laisse perplexe, considérant le fait que je n'avais pas envoyé de mail de ce genre depuis au moins deux ans, mais je laisse pisser.
« Mais au final, c'est pas plus mal, me dit-il. J'veux dire, on se connaît pas trop mais on s'entend bien.
- Ouais t'as raison, je pense qu'on devrait garder cette relation de mecs qui se connaissent pas trop.
- En fait, même si ça fait longtemps qu'on se voit, j'me rends compte juste maintenant que t'es quelqu'un d'intelligent. »
Je dois salement tirer la tronche parce qu'il reprend de plus belle en rigolant :
« Alors que bon, t'as pas l'air comme ça. »
Un mec vient me saluer. C'est Deework, du collectif lillois Bedroom Research. Je me demande comment il a atterri dans cette soirée puante. Enfin, ça tombe bien, je suis bourré, et j'ai un paquet de sujets de foireux en tête que je m'empresse de lui soumettre avec un sourire en coin.

On se tire du bar quelques minutes plus tard. Je raccompagne tout le monde, à moitié pété au volant, et me retrouve seul avec la kepon car c'est la dernière à déposer. Je sens sa main d'Abbé Pierre posée sur mon épaule mais j'dis rien. Juste de quoi parfois combler le blanc trop long, en lui demandant le chemin au détour d'une rue.
« Tu me diras quand c'est bientôt...
- Encore un peu plus loin... Voilà, c'est là. »
Je m'arrête, attend quelque réaction de se part, mais rien.
« Bon ben bonne nuit, je lui dis.
- Ouais, merci, j'te fais quand même la bise. »
Je me tord le cou pour atteindre sa tête derrière le siège, et repense à la bise de politesse qu'elle m'avait refusée en arrivant au premier bar, juste parce qu'elle prétendait s'être mise sur son mode « associable ». Je sens le truc arriver gros comme une maison. Sa langue me roule sous le palais et ma main plonge dans ses cheveux. Pause.
« J'ai fait tombé ma casquette. »
Elle la ramasse et la refixe sur sa tête. Reprise. Je ne sais pas vraiment si c'est mon haleine ou la sienne qui refoule, mais ça donne un p'tit côté loupé à la scène auquel je décide de remédier. Pause.
« Putain mais on pue de la gueule, tu trouves pas ? »
Je tâte voir si un vieux chewing-gum plein de fils de manteau ne se morfondrait pas au fond d'une de mes poches.
« Nan, qu'elle me dit. »
Bon. Reprise. Au bout d'un moment, elle se cale au fond de la banquette et m'invite à l'y rejoindre. Je coupe le moteur, enjambe foireusement les fauteuils, lui fourre une langue de plus belle en l'enlassant sous le t-shirt ; mais je m'arrête brusquement, me jettant de l'autre côté de la banquette avec un sale air d'enfant battu.
« Arf, j'me suis fait mal à l'ongle en passant au dessus des sièges. »
Silence pendant que je me suce le doigt. Je crois que j'aurais difficilement pu sortir un truc plus pourri, mais elle enchérit quand même :
« Et sinon, tu fais quoi à la fac ?
- Ahah, ben ouais, que j'm'esclaffe. Maintenant qu'on s'est bien roulé des pelles, on se rend compte qu'on a rien à se dire, comme des cons, et tu me poses une question bidon juste pour combler le blanc.
- Nan, même pas.
- Excuses moi, j'suis un peu susceptible...
- Tu sais quoi ? La meuf au Kiosk, quand j'suis allée lui demander du feu. Elle m'a dit qu'elle était persuadée que j'voulais me la faire.
- Wah, c'est fou ça. C'est exactement ce que tu nous avais dit avant d'y entrer.
- Alors que bon, les lesbiennes, je déteste ça. »
Elle avait quand même réussi à se brancher la seule gonzesse du bar. Il faut dire que sa casquette militaire et ses cheveux coupés courts lui donnaient un côté garçon manqué.
Je lui dis :
« Au fond, tu me plais bien. Mais je crois que j'ai pas envie de te baiser. J'suis désolé.
- Qu'est-ce qui te fait croire qu'on allait baiser ?
- Bah, c'est un peu la suite logique des choses, nan ? Mais j'ai pas envie, même si mon égo de mâle voudrait que j'te prenne là, dans la caisse. Et tant pis pour ma fierté.
- Et quelle fierté t'aurais à me baiser, et à me retourner dans tous les sens ? C'est ça qui est chiant. Dès que t'es une meuf potable, suffit que tu sois pas trop grosse et que t'aies pas de protubérance sur la gueule pour que tous les mecs veulent te sauter.
- Je sais pas. C'est pas de ma faute, on baigne tous dedans. C'est le poids de la société qui veut ça, qui nous pousse à baiser le plus possible pour avoir une bonne estime de soi. J'sais que j'raconterai ça aux potes demain, et ils me diront que j'ai bien loosé. Mais ça m'intéresse pas de niquer comme ça, à l'arrache. Bouarf, tu loupes rien de toute façon, j'suis une catastrophe au pieu.
- Et c'est quoi que tu nous fais là ? Une crise de post-adolescence ? Et puis qu'est ce que t'en as à foutre de ce que disent tes potes ? Tu vas pas me dire que ce sont tous des playboys qui se tapent plein de meufs comme ça ? »
Son truc de post-adolescence me vexe et je tire un peu la tronche. Alors, pour se rattraper, elle glisse sa tête pour murmurer :
« Tu sais quoi ? C'est pas la loose, c'est cool de ta part, parce que j'en ai marre de me faire baiser. »
Ça me surprend venant de sa part car c'était quand même elle qui avait lancé l'affaire. Mais bon, sur le coup, j'suis assez content de moi. On commence à discuter pendant ce qui me semble une éternité. Un moment, elle fait mine de se barrer, et je repasse sur le siège de devant, en lui disant qu'elle aurait jamais dû faire ça parce que je tombe trop facilement amoureux, question de la faire culpabiliser. Ça marche, elle reste, mais me met mal à l'aise avec son art de la tchatche que je suis loin de maîtriser. Je commence d'ailleurs à me sentir de plus en plus con, et finis par perdre totalement le contrôle de la discussion, qui part en psychanalyse sur mon cas.
« Mais faut pas te déprécier comme ça parce que tu ressors d'histoires foireuses, me dit-elle, je trouve pas que tu loose.
- Mais au final, peut être que j'me sens bien dans ma loose. C'est un peu un masque que j'me mets, comme quand j'mets celui de bouffon de service pour faire mon intéressant devant tout le monde. Ça peut être un moyen de compenser mes nombreux plans foirés, parce qu'au moins, la loose, ça fait marrer tout le monde. »
Je sens qu'il y a quelque chose de raté dans la profondeur que j'essayais de donner à mon propos.
« Putain, ça y'est, j'commence à raconter de la merde.
- Nan... Je trouve que ça se tient. »
Je déteste quand quelqu'un essaie de me sonder, ça me donne l'impression d'être à poil au milieu d'une rame de métro. Le stress me secoue tellement les membres que je laisse échapper les clefs en dessous du fauteuil. Je tâtonne pour les retrouver en lâchant quelques jurons. J'abandonne. Elle penche sa tête entre les sièges pour les chercher, et j'en profite pour lui décocher une autre pelle goulue, appliquant pudiquement ce droit de cuissage qu'elle m'avait accordé pour un soir.
Elle prend un air profond.
« Tu veux que j'te dise ce que c'est la loose ? »
Silence. Je comprends qu'elle attendait une réponse de ma part.
« Euh oui ? Vas y, balances.
- Alors j'vais te dire ce que c'est que la loose. La loose, c'est d'être moche. »
Re-silence. L'espace d'un instant, je crois qu'elle prend une respiration mentale pour lâcher la suite.
« Euh, c'était une question ?
- Nan ! ...
- Ah ok, je devais juste mettre une virgule alors ?
- Nan ! »
Moi qui m'attendais à une tirade de fou, je reste un peu sur ma faim.
« Tu sais quoi, reprend-elle, faut pas se prendre la tête avec ces histoires. Moi, ça fait longtemps que j'me prends plus la tête. Je sais ce que je veux, j'ai mes ambitions, et puis voilà. C'est quoi tes ambitions à toi, avoir des gosses, fonder une famille ? »
Cette question m'interpelle pas mal, non seulement parce qu'elle me semble tout à fait hors de propos, mais aussi parce qu'elle refléterait presque un plaidoyer des bonnes raisons de ne pas sortir avec elle, comme si elle se sentait menacée. Je ressers ce vieux refrain que j'ai l'habitude d'agrémenter à toutes les sauces :
« Disons que j'suis sorti avec une meuf pendant plus de trois ans. Je me vidais la cervelle dessus car c'était ma seule confidente. Il m'arrivait même parfois de lui parler sans me rendre compte qu'elle s'était endormie. Quand on s'est séparé, je me suis tout à coup sentis muet. C'est ça que je recherche, quelqu'un à qui torturer l'esprit avec mes vidanges de cervelle.
- Ben dis donc, c'est pas très sympa... Moi, j'ai suffisamment subi pour arrêter de compter sur les autres, d'attendre quelque chose d'eux. J'en ai plus rien à foutre des gens.
- Bah t'en as de la chance. J'aimerais bien en avoir rien à foutre comme toi, et me cacher sous une bonne carapace. J'essaie de me convaincre que tout ça, c'est des conneries, mais au final, j'ai toujours mes vieux bads qui remontent à la surface.
- Putain mais t'es encore pire que moi. T'es vraiment le pire mec que j'me suis faite. »
Je ne savais pas trop si ça faisait référence au fait d'avoir refusé sa chatte, ou d'afficher mon sentimentalisme gnangnan. J'espèrais que c'était la dernière solution, mais ça m'aurait pas étonné pas que ça soit les deux à la fois.
« Merci, ça fait plaisir, dis-je de manière un peu gênée.
- Enfin, au moins, c'était original. J'ai préféré parler avec toi que de baiser, c'était plus sympa. Si j't'invite à prendre un café pour continuer cette discussion une autre fois, tu vas pas refuser ?
- Ben nan. »
Je la sens prête à partir, et ma bite qui se pointe au milieu de mon champs de pensée, tel un worms(®) innocent que je m'apprêterais à enterrer au bout de mon bazooka télécospique, m'inspire assez de pitié pour ne point l'achever de suite.
« Euh mais sinon, ça te dirait pas qu'on monte chez toi prendre une bière ? On va pas squatter quinze ans dans la caisse.
- Nan. Tu sais très bien que si on monte chez moi, on finira par baiser.
- Ah ouais, merde, c'est vrai. »
Ah y'est, je passais maintenant pour monsieur frigide alors que ce qui me faisait surtout chier, c'était de ne pas avoir mon petit confort de queuteur. Remarque, tant mieux, elle avait l'air de m'apprécier car je m'intéresserais à elle autrement que pour le cul, ce qui n'était pas totalement faux en fin de compte.
« Bon allez, lance-t-elle, j'vais te faire une fleur. D'habitude je trace à la fac sans calculer personne, en regardant mes pieds...
- Ah tiens, moi aussi!
- Mais là, si j'te vois, je déciderai de pas t'ignorer. »
Super, mec. Voici ton lot de consolation.
« J'peux quand même prendre ton numéro ? Pour au moins assouvir mon égo de gars en rut.
- Nan, on en a pas besoin. De toute façon, j'te recroiserai à la fac. »
Ok, ça aurait pu m'éviter de passer le lendemain à attendre anxieusement un texto qui n'arriverait pas, mais je restais intimement convaincu que je ne la recroiserai pas de sitôt.
« Ouai mais franchement, j'y suis pas souvent.
- Bah je t'y ai déjà vu.
- Ah bon ? T'es plus douée que moi parce que j't'ai jamais captée.
- Ouais. J'me suis dit que les dreads, ça t'allait pas parce que c'est rond et que t'as un nez pointu.
- Tiens c'est marrant, on me l'avait jamais sortie celle là.
- Ben ouai, normal. C'est un jugement plutôt esthétique. »
Je ne sais pourquoi cette remarque m'amuse autant. Peut être parce que je me mets à imaginer ma tête en BD, faite de triangles et de cercles.
« Au fait, chose cruciale, c'est quoi ton prénom ?
- Cédric
- Et bien bonne nuit Cédric.
- Bonne nuit Marie. »
J'éprouve une certaine fierté en voyant qu'elle ne réagit pas car j'étais pas trop sûr de mon coup. Pour une fois, ce n'était pas moi qui avais oublié le nom de la personne avec qui je parlais. Bon ok, y'avait pas de quoi se jeter les fleurs, mais quand on connaît mes dispositions à oublier les noms à la seconde même où on me les donne...
Je la fixe du regard.
« J'aimerais bien te revoir quand même, désolé si ça te fait peur que j'te demande ça. »
Va savoir pourquoi ai-je eu l'idée de dire un truc aussi con.
« Nan, ça me fait pas peur. Par contre, il faut que tu saches un truc... »
Elle se dresse pour attraper la portière.
« N'attends rien de moi. »
Je démarre le moteur, seul avec sa fatalité de kepon en plastoc, et la vois réapparaître au carreau.
« Bon, et tu m'as toujours pas dit en quoi t'étais, monsieur de Lille 3.
- J'fais un M2 ingénierie culturelle.
- Ah ouais, M2 ! C'est vrai ?
- Ben ouais, j'pensais que tu le savais.
- Nan, c'est bien, ça ! »
Là, c'est moi qui vient de gagner un point dans son estime. Je trouve le truc foncièrement dérisoire mais une pointe de fierté envahit mon être tout entier pour me faire briller tel un décalcomanie phosphorescent dans une boîte de céréales. Alors que j'avais passé au moins une heure à pleurnicher sur mon sort, je lui dis :
« Et ouais, c'est la classe. Et encore, tu ne connais pas tout de ma vie ».
Je sors mon plus beau sourire de crâneur, et lance la voiture sur la route. Ma fierté retombe aussi vite qu'elle est apparue, laissant place à l'impression d'avoir été quand même assez crétin sur cette dernière réplique. D'la merde. Je continuerai de me traiter pendant toute la route, comme à mon habitude, pour avoir foiré un plan de plus ; et passerai la nuit à me battre avec un moustique, juste pour la flemme d'aller chercher une prise anti-moustique dans la salle de bains. Le lendemain, j'avouerai ne pas être allé au cours du matin que j'avais promis de prendre pour Fabien, prétendant pour l'occasion détenir une circonstance attenuante. Sentant que ma bataille acharnée avec le moustique ne m'apporterait que peu de crédit, je sors la carte de celui qui finit sa nuit avec une gonzesse. Ça le fait plutôt marrer.
« Mais... Tu l'as baisée au moins ?
- Euh... nan. J'suis pas comme ça, moi. J'suis pas un chaudard.
- Alors si tu l'as pas baisée, c'est pas une excuse valable. »

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Le cerveau / Mélancolique destin d’un alcoolique dans l’train
« le: octobre 06, 2006, 22:46:05 pm »
hihihi

Citation de: "djemija"
faites c'que vous voulez avec vos concubin(e)s d'un soir. Pas s'étonner si ça s'passe mal étant donné que derrière vos paroles ou vos silences y a quelquechose de plus bruyant qui  gémit .... or ce bruit, n'est pas séducteur du tout, bien au contraire


si tu le dis... J'essairai de penser moins bruyament ou de ne pas trahir mon regard en laissant échapper une petite étincelle de lubricité la prochaine fois, je verrai bien si ça porte ses fruits :)

Citation de: "djemija"
....là preuve, ce  texte que t'as pondu, Théanor, qui reflète dans le pire des cas  ta gaucherie, ta froideur, ta prise de distance, ton coté condescendant méprisant caché et ta lacheté...je sais tu vas me demander ou j'ai pioché tout ça..


nan nan, c'est plutôt bien pioché je trouve. Ca reflète assez  l'attitude dans l'instantané que j'ai pris de moi même.

Citation de: "djemija"
mais moi, j'te demande pas ou t'as pioché ces idées légèrement déshumanisantes sur les filles que tu fréquentes...


ouai ... mais je répondrai quand même (au passage, je sors de ma place d'acteur pour prendre celle de l'auteur) : J'venais de relire une tirade issue de Seul contre tous de Gaspar Noé, et ça m'avait assez inspiré pour le dernier paragraphe. Bon, j'ai p'tetre un peu forcé les traits parceque j'ai jamais sorti ça à quiconque mais j'avais envie de finir la niaiserie du paragraphe d'avant sur une petite note trash et super mysogine, le complexe justement d'avoir fait un truc un peu trop à l'eau de rose à mon goût juste avant.(hop, je remoule dans mon siège d'acteur la forme de mes fesses)

Citation de: "djemija"
j'sais pas où t'as besoin de les réduire à des choses visqueuses qui se frottent le cul sur ta jambe et pourquoi t'as besoin de te conforter dans l'idée que c'est mal de participer à l'assouvissement de leur plaisir...(pourquoi tant de distance entre elles et toi...?) toi tu fais quoi pendant qu'elles se frottent sur toi j'veux dire, tu tricote ou quoi? tu persiste dans ton monologue intelligent, tu fais comme si t'étais tout seul??


Mal en soi, j'en sais rien. Ce que j'évite, c'est surtout de pâtir d'une désillusion, comme celle à laquelle j'ai parfois eu droit quand les effets d'extasy s'estompaient chez une meuf pour qui j'avais commencé trop rapidement à me faire des films. Le monologue intelligent, c'est dans des circonstances complètement différentes et c'est peut être mal, ouai, qu'importe. On est sans cesse dans des processus de distinction (pour reprendre notre cher Bourdieu). Et quand c'est pas dans la musique que j'peux ramener ma gueule, alors c'est sûrement dans cette forme arrogante et dédaigneuse d'un élitisme plus ou moins larvé.
Ouai j'aime bien, parce que mon introvertisme ne me donne pas souvent l'occasion de me sentir au centre de l'attention d'une (ou plusieurs) personne. Alors quand j'peux jeter de la poudre aux yeux autrement qu'en jouant mon rôle de bouffon de service, j'en profite à fond, et je le fais pour le sentiment d'estime qui m'éclabousse dans le regard de l'autre, plus fort sur le coup que mon propre sentiment de culpabilité.

Citation de: "djemija"
Mais continue, toute cette complexité  ça te donne au moins la possibilité d'avoir un regard assez lucide sur tes aventures"amoureuses"....
J'sais bien qu'c'est difficile...( à bon entendeur salut :))


Disons que j'essaie de tourner la chose pour qu'elle me plaise dans le portrait qui en résulte, et pas tellement pour l'image de moi même que j'en renvoie. Après, la lucidité, c'est autre chose, et je sais qu'elle a souvent tendance à me faire défaut. Cela dit, j'accepte quand même le compliment :)
Désolé, je sais pas si j'ai été super clair parcontre, avec le côté légèrement schizophrenique du post huhu  smiley9

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Le cerveau / Mélancolique destin d’un alcoolique dans l’train
« le: octobre 04, 2006, 21:48:59 pm »
Citation de: "SQallY"
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Au contraire, si j'peux me remonter dans mon estime, c'est bien dans le fait de l'avoir fuit comme la peste dès que j'ai appris la chose, plutôt que de me complaire dans une dragouille foncièrement inutile

ha ok j'avais compris l'inverse parc'que je croyais que le fait qu'elle soit maqué à double tour renforçait ton intérêt pour elle...quand tu disais :
Je suis loin de me douter que cette gonzesse de chez Naïve dont j’avais peur de tomber amoureux après avoir découvert l’attachement qu’elle éprouvait pour son fiancé, « sa perle »
donc du coup comme elle est entrée dans ton jeu, et qu'elle allait céder tu l'as fuis comme la peste ? smiley9


putain ouai exact, j'avais pas capté qu'on pouvait le comprendre dans ce sens là... jvé corriger du coup.

Citation de: "SQallY"
après hein on est pas tous joueur ni joueuse...fffiou smiley6


ouai, c'est bien là le problème (si problème il y a). Certains le prennent comme un jeu anodin alors que d'autres n'ont plus vraiment envie d'en rire. Tout dépend de la situation dans laquelle on se trouve et de la personne que l'on a en face.
J'avoue préférer être de l'autre côté quand même, en particulier ce moment où elle vous regarde avec des yeux écarquillés et la tête penchée légèrement de côté, s'abreuvant de chacune de vos paroles comme si vous étiez le mec le plus brillant qu'elle ait jamais rencontré, alors que vous savez pertinament que vous êtes trop bourré et que vous racontez de la merde, mais avec des mots intelligents qui, alignés, vont bien ensemble. Putain, moi qui me sent super gauche dans mes relations sociales, je kiffe trop ces instants parce qu'ils me remontent grave dans mon estime ; ce qui m'amène à penser que d'autres meufs me font (et m'ont déjà fait de toute façon) le même coup, mais en se frottant le cul sur ma jambe pour voir la quantité de bave avec laquelle elles pourront se recoiffer la mèche en s'envoyant un clin d'oeil dans la glace.

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Le cerveau / Mélancolique destin d’un alcoolique dans l’train
« le: octobre 04, 2006, 19:25:21 pm »
Citation de: "SQallY"
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y'en a beaucoup aussi qui aiment se faire désirer juste pour remonter l'estime qu'elles ont d'elle même, et aérer un peu leur situation de couple fermé à double tour.

casé à double tour ou non le jeu de la séduction est partout et fait partie de l'Homme...après c'est plus ou moins pathologique chez certain ou certaine...
ce que je veux dire c'est que ta fille n'a pas plus besoin de remonter l'estime qu'elle aurait d'elle même et aérer sa situation de couple fermé (c'est son choix) en répondant à tes avances que toi de remonter la tienne d'estime et combler le vide de ta situation de nouveau célibataire en la séduisant en connaissance de cause....
elle est aussi chienne que toi tu es chien dans l'histoire huhu
sans vouloir être offensante bien sur  smiley15


Au contraire, si j'peux me remonter dans mon estime, c'est bien dans le fait de l'avoir fuit comme la peste dès que j'ai appris la chose, plutôt que de me complaire dans une dragouille foncièrement inutile. Efforts réduits en miettes lorsqu'elle a commencé à faire sa chaudasse au moment où je baissais la garde, pensant pouvoir finalement la fréquenter en mode "relation amicale".

Bon voilà, c'était ma séquence loveur du mardi, je recommencerai plus, promis, ou du moins, jusqu'à cumuler assez de loose pour avoir matière à en pondre un texte (ce qui risque d'arriver assez vite en fin de compte, vu mon don inné pour les collectionner).

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Le cerveau / Mélancolique destin d’un alcoolique dans l’train
« le: octobre 04, 2006, 13:45:19 pm »
Citation de: "SQallY"
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Je suis loin de me douter que cette gonzesse de chez Naïve dont j’avais peur de tomber amoureux après avoir découvert l’attachement qu’elle éprouvait pour son fiancé, « sa perle »

technique !
faire croire qu'on est innacecible avec le coeur bien rempli rend le challenge dans la séduction encore plus excitant n'est c'pas !  alors que si cette fille avait été seule et directement accecible elle ne t'aurait sans doute pas intéressée...chien ! smiley5


J'avoue je suis un p'tit joueur, j'attaque généralement au moment où elles sont le plus vulnérable, où elles ne tiennent plus trop à leur relation et j'me contente de donner un p'tit coup de pied dans le tas, sinon le challenge me paraît trop dur. Faut dire, la bague de fiancailles, les "ça n'a jamais été aussi bien qu'en ce moment", et les projets de vie commune m'ont quelque peu refroidi  smiley9 , considérant ce qu'il s'est passé, j'aurai p'tetre pas dû jeter l'éponge si vite en fin de compte mais bon, y'en a beaucoup aussi qui aiment se faire désirer juste pour remonter l'estime qu'elles ont d'elle même, et aérer un peu leur situation de couple fermé à double tour.

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Le cerveau / Mélancolique destin d’un alcoolique dans l’train
« le: octobre 03, 2006, 22:21:36 pm »
Les poteaux entament leur marche à travers la vitre sous l’impulsion d’une secousse à peine perceptible, et je croise les doigts pour que personne ne s’asseye à côté de moi. Je finis par détourner le visage de mon reflet en semi-teinte, débouche la bouteille, avale une goulée et plonge le nez dans Courrier International, répétant sans cesse le geste jusqu’à m’avachir dans ce qui devient pour mon entendement un labyrinthe de phrases. Puis, c’est l’effet totalement inverse qui arrive. Je m’absorbe dans ce buvard cérébral, en arrache les lettres des yeux avec une telle avidité qu’ils en éventreraient presque l’article. Je noie mes pensées distraites dans sa substance hautement polémique et l’alcool.



Le tgv entre en gare. Je range ma bouteille et laisse passer le ballet des précautions, conscient à l’instant même de ma balourdise si il m’était donné d’y participer. Un danseur gère comme il peut les forces centrifuges qui s’exercent sur son corps en rattrapant son sac, pendant que son partenaire évalue l’étroitesse du passage qui lui reste, glisse un « pardon » dans son dos, et se faufile devant avec la grâce que peuvent lui permettre ses bagages au bout du bras. Pour une fois, je n’aurai pas la désagréable impression d’être toujours celui que personne n’attend au bout du quais car Emile viendra m’y chercher pour aller au Tripo. On échangera quelques mots, il finira mon pastis devant l’entrée, et on se paiera une bière à l’intérieur. On retrouvera mes potes, on dansera, on ira aux chiotes, on se perdra, l’ex d’un pote me vomira sur le bras et moi, ça me fera marrer. J’irai le nettoyer et finirai la soirée par l’enrouler autour de la mienne d’ex, tout en lui disant pour soulager ma conscience qu’elle a bien fait de me larguer parce qu’on est bien finalement comme ça, comme potes, apaisant qu’il est de parfois se mentir à soi même.



Pour l’instant, je vide ma vessie dans les toilettes exigus du train. Je repense à Naïve et la dernière semaine de boulot qui m’y attend.

Je suis loin de me douter que le boss viendra en personne à mon pot de départ soulager la sienne de conscience en se lançant dans une mission « remerciement de stagiaire », et que moi, sous l’effet de l’alcool, ne lâcherais plus son regard fuyant qui cherche la moindre occasion pour s’éclipser, bien trop content de lui raconter n’importe quoi.

Je suis loin de me douter finir ce pot dans un bar à la poursuite d’une suédoise qui ne comprendrait rien à mon anglais minable, juste pour soulager une irrésistible envie de lui dire que sa tête me ferait trop penser à une pub pour Freedent, ce qui serait de toute façon perdu d’avance car elle ne connaîtrait pas le mot « adverstising » et aurait encore moins de chances de connaître une marque à consonance franco-anglaise.



Je suis loin de me douter que cette gonzesse de chez Naïve dont j’avais peur de tomber amoureux malgré l’attachement qu’elle éprouvait pour son fiancé, « sa perle » ; cette gonzesse, que j’avais fuit pendant deux mois pour finalement m’en désintoxiquer et recommencer à fréquenter de manière sereine ; je suis loin de me douter qu’elle finirait notre dernière soirée ensemble par me caresser le dos de sa main baguée, pendant que je feindrais de ne point m’en rendre compte. Qu’elle resterait collée à moi pendant que je lutterais pour éviter que sa poitrine écrasée sur mon bras ne me foute la gaule. Qu’on se perdrait bêtement à la fin de Birdy Nam Nam et que j’en ruminerais tout le retour, imaginant qu’il se serait passé je ne sais quoi d’inavouable si elle était venue comme prévu dormir chez moi pour y récupérer le portable qu’elle avait oublié plus tôt dans la soirée.

Le mien se met à sonner : c’est Emile qui m’attend. Je le range dans ma poche, remonte ma braguette, et appuie sur le bouton de la chasse tout en esquissant un sourire de gosse en pensant à la soirée qui m’attend.



Pourtant, je suis loin d’imaginer la mélancolie qui m’envahira cette dernière semaine de Naïve, à force de cumuler diverses histoires foirées dont le point culminant était cette déclaration d’amour flanquée d’un aveu d’infaisabilité qu’on m’envoya en pleine tronche cet été. Je commencerai à croire être la victime d’un sort qui pousserait chaque meuf pour laquelle je m’attacherais à secouer les fesses sous mon nez pour bien me montrer ce à quoi je ne pourrais prétendre. Et tous les efforts que j’avais fait pour encaisser ces coups sans broncher se liquéfieront en pleurs sur l’épaule d’un collègue de Naïve, juste parce que l’alcool m’aura ôté la honte de le faire et que rien au final ne décrasserait mieux les blessures qu’une bonne coulée de larmes.



De toute façon, je finirai par jouer les gros durs, répétant à qui veut l’entendre que je me prends la tête pour des conneries et que je ne devrais pas, car les meufs sont toutes des putes qui ne méritent qu’on s’y attache juste pour bien leur bourrer le trou, quitte à faire plus ou moins d’efforts pour les supporter et en justifier le sacrifice par les quelques paillettes d’amour qu’on s’envoie soi même à la gueule ; le problème de fond étant qu’elles savent nous faire chier avec autant d’énergie qu’elles ont de talent pour nous tenir par les couilles, et pour s’en remplir la chatte avec une adresse dont on ne saurait se passer vu la satisfaction certaine que cela procure.

Je suis complètement saoul en m’extirpant du train, mais ça, je m’en doutais déjà avant d’y monter.


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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 17, 2006, 20:31:37 pm »
SUITE !

J'ai finalement annoncé ma fin de stage chez Naïve. A défaut de ne pas avoir dû écrire quatre copies sur ce qui m'a plu pendant celui-ci, ce n'est pas moi qui dérogerait au traditionnel mail de départ...

"Alors qu’approchent à grands pas ses dernières heures (minutes ?) de boulot, le stagiaire naïf(ve), confronté à l’insignifiance de l’empreinte qu’il laisse derrière lui, ressent comme un désir plus ou moins submergé de partir la tête haute (coiffée d’un stetson), le regard lointain, avec pour fond sonore le blues d’un crooneur cancéreux crachant sa mélancolie entre deux notes de banjo.



Plutôt que d’opter pour une séance de dédicaces-remerciements, tout en risquant d’afficher pour l’occasion une asociabilité à la mesure de la chétivité de la liste qui pourrait en résulter, je préfère partir sur une petite touche nostalgique. Je vais regretter les petits plaisirs quotidiens qui ont donné à ces quatre mois de stage tout son charme :

Le fait d’attendre devant l’ascenseur l’extinction de la petite lumière rouge pour appuyer frénétiquement sur le bouton tout en sentant la futilité de la chose au bout du doigt.

Ou d’attendre de se retrouver dans le-dit ascenseur pour s’imaginer que replacer une mèche qui bique et se donner quelques baffes suffiront à dissimuler les heures de sommeil qui font cruellement défaut. Puis de saluer les gens avec un tel enthousiasme qu’on en vient à envisager d’arrêter de se donner de faux espoirs devant une glace.



Attendre d’avoir suffisamment de désordre sur le bureau pour se convaincre de tout ranger. Remettre la main sur son bic quatre couleurs préféré, et fêter les retrouvailles à grandes flopées de post-its multicolores dès que l’occasion se présente.

Attendre devant l’entrée de Naïve la personne qui descendra avec la sacro-sainte clef. Essayer de ne pas s’attirer trop d’apitoiement en balançant une remarque sur le mur nouvellement peint, afin de montrer que les vingt minutes que l’on a pas perdues ont été mises à profit de sa prodigieuse érudition concernant ce qui relève de l’art pictural, et des monochromes de Klein en particulier.

Attendre qu’il n’y ait personne à l’étage pour fourrer dans la chaîne son cd de préféré de polka-core haïtienne. Se faire couper dans l’élan par une rentrée de déjeuner dont on avait mal estimé la précocité. Le mettre quand même et se faire rappeler cinq minutes plus tard l’existence de ce vieux casque qui traîne sur le bureau. Réfléchir un instant, et oublier la suggestion tout en maudissant le jour où l’on en a perdu la mousse des écouteurs.

Attendre d’être suffisamment expérimenté pour comprendre le 26eme degré de monsieur Schuster. Finir par se dire qu’on a déjà saisi le fonctionnement de la photocopieuse, du transfert de ligne, et qu’en fait, c’est déjà pas mal.



Attendre que sa boîte mail finisse de charger les spams du standard et les mails non sollicités. Décider que le peu de messages portant sur le viagra que l'on reçoit aujourd'hui fera office d’horoscope, et en éprouver une certaine virilité.

Attendre de se prendre un argument de journalisme ou de licence poétique en pleine face pour accepter l’inutilité de ses corrections. Puer la rancune sur le coup et oublier parce qu’en fait, c’est pas vraiment grave. Juste qu’avec un égo aussi gros que le sien, le t-shirt de stagiaire naïf a de temps en temps tendance à le boudiner.

Attendre de faire baisser son taux journalier de conneries professionnelles pour se sentir un peu moins crétin. Faxer une feuille à l’envers, s’en apercevoir après coup, et admettre que c’est sûrement peine perdue.



La bienséance voudrait que je balance une petite formule choc de fin avec pour guise d'enluminure quelques points d’exclamation et un smile de circonstance, mais l’autosatisfaction que me procure le fait d’avoir tenu au moins une personne au bout de ce mail m’insuffle une pointe d’extravagance qui me pousse au vice de ne pas le faire, quoique cela aurait tout aussi bien pu constituer un choc en soit (ou pas)."

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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 18:45:50 pm »
Je suis pas sûr que ça soit lui, mais en tout cas, c'était bien un chauve.
Et celle qui faisait sa danse nimp était une meuf avec (hum hum) une frange et un t-shirt à rayures....  smiley9
C'était à l'Elysee Montmartre au concert d'Ellen Allien

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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 18:43:20 pm »
roh merde...

ahahah

41
Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 16:58:57 pm »
Ce qui est marrant dans ce cas précis, c'est qu'on a beau s'expliquer, les gens ne retiennent au final que ce qu'ils ont plus ou moins envie de me faire dire. Boarf allez c'est pas grave, au moins j'donne l'occasion à quelques suceptibilités se défouler.

42
Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 16:06:59 pm »
Citation de: "cindy cenobyte"
:stupid:  :boulette:

si je comprends bien vous ne baisez que des fermières de 120 kilos les gars ?


Non tu comprends mal. J'adore les putes à frange, mon ex était une pute à frange. Je l'ai dit, c'est juste un p'tit nom affectif sans mesquinerie derrière.
Et puis je vois pas en quoi décrire un look spécifique ferait tomber dans le préjugé.


_non non, on n'est pas tous des costar-cravatte petit être malveillant emprunt d'idées préconçues. Ton opinion est fondée sur des conjectures juste parceque t'es pas capable d'avoir l'esprit suffisament ouvert pour capter que sur le mien, y'a un trou de cigarette, et que le sien est plus délavé
_ah ouai t'as p'tete raison. N'empêche que le mien est gris et j'me sens beaucoup plus original que vous. Enfin je dis ça, je dis rien...

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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 13:32:49 pm »
Citation de: "Riz_Au_Lait"
Merci pour ces explications , à noter que les putes à franges ont souvent des petites lunettes noires rectangulaires.


Trop pas, elles ont au contraire d'énormes lunettes rondes à la Chips.


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Ben j'avais un pote de fac , black avec des dreads, il n'aimait pas du tout , du tout reggae , par contre c'était un fou de metal et de grind. Il s'est rasé la tête , il en pouvait plus que les gens (surtout des nanas)  viennent lui demander si il connaissait peter tosh , lkj , ou ... tryo

ha les stéréotypes..


C'est exactement mon cas, sauf que j'suis pas black, et que métal & grind ne sont qu'une partie de ce que j'aime bien écouter. Moi aussi j'ai eu du mal à supporter ces réflexions, mais j'ai opté pour un compromis, celui de se raser seulement les côtés.

Au final, ça a pas changé grand chose...  smiley18

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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 14, 2006, 11:56:25 am »

ouai la pute à frange est un petit terme affectif désignant les meufs fashion typiques que l'on trouve dans ces soirées, qui adoptent toutes la même coupe (avec plus ou moins de variantes mais toujours une frange) et qui s'habillent en noir, en blanc, ou en rayures noir & blanc. C'est pas vraiment mesquin en fait, même si ça en a pas l'air.
Quant à la dread, c'était pas fait méchamment mais plus sur un mode taquin auquel j'étais pas vraiment réceptif ce soir là. J'accèpte ça comme le tribu à payer pour avoir cette coiffe, au même titre que les rastafaraï qu'on m'envoie dans la rue et auxquels je me vois plus ou moins obligé de sourire, tout en sachant au fond de moi que rien ne m'emmerde plus que d'écouter du reggae.
Finalement, je m'aperçois qu'il y a un fond cheveulu dans toutes ces tribulations auquel je n'avais pas fait gaffe...
Merci pour tous ces commentaires, ça me fait plaisir :)

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Le cerveau / Non, je n'irai pas au NAME samedi
« le: septembre 09, 2006, 17:51:58 pm »
00h45 : Un bol de nouilles chinoises, une boîte de sardines, et un verre de pastis. Je me fais chier devant ce reportage sur la contrefaçon de sacs à main. Je zappe. Mon pc-télé lâche un jouissement pendant que je tentais malhabilement d'avaler une salve de nouilles par le dessous. Je coupe le son, devant sûrement ce réflexe à mes premières années de branlette devant M6. Un type coiffé chez Shampoo se frotte le bas du ventre sur le vagin de sa partenaire. La scène est tellement grotesque que j'ai du mal à croire avoir pu bander sur ce genre de truc étant plus jeune. Bref, je viens de comprendre la feinte de Cyrille au resto, pote de Mathilde, elle même pote de fac, lorsqu'il faisait référence aux films du vendredi soir sur W9. Je me doutais bien que ça cachait quelque chose de la sorte. Quoiqu'il en soit, mes soupçons sont maintenant dissipés. Je zappe. Je tombe sur un clip des Pussycat Dolls. Ca parle d'un mec qui aime se rincer l'oeil sur les seins, le cul, et la chatte de celle avec qui il chante, laquelle lui réplique qu'elle s'en fout et qu'il peut aller se toucher le zizi.



Chaque mot un peu cru est remplacé par un bip de censure rythmé de manière régulière à la fin de chaque couplet. La grosse tendance du moment en variet', c'est bien de parler de sexe sans vraiment en parler. Tout dans l'évocation, une espèce de recette magique qui semblerait destiner chaque morceau qui s'y adonne allègrement à un certain succès, mais c'est bien la première fois que quelqu'un ai eu l'idée d'en jouer musicalement. Putain, ici le sexe n'est pas gratuit, il devient prétexte à une mélodie se résumant par un simple bip. C'est génial, c'est beau. Alors que je m'émeuts de cette trouvaille, Kevin, dit Jean-Kevin, dit Jean-Kev', m'envoie un sms : « euh bon jsui raide jcroi ke jvai pas y aller lol ».



01h30 : Une pensée me traverse l'esprit pendant que je dévale les escaliers à toute allure : Je dois avoir l'air sacrément con avec cette boîte de sardine vide dans la main. Qu'importe, y'a personne pour me voir et puis de toute façon, le pastis m'a suffisamment éméché pour affronter l'éventualité de croiser quelqu'un sans rougir de mon butin. Paf, je l'envoie direct dans la poubelle, paf, paf, je fais voler les cadenas de mes deux antivols et enfourche mon vélo. Je déboule boulevard Clichy pleine vitesse sur la voie piétonne en mode « roi du monde », je slalome les gens avant qu'ils aient pu tenter quelconque esquive, et je garde un oeil sur les reflets qui m'apparaissent au grès de la route pour ne pas prendre de tesson de Kronenbourg dans le pneu. Je me demande bien pourquoi on ne trouve de verre que sur les pistes cyclables d'ailleurs. Je laisse ce mystère et mon vélo sur une barrière de trottoir : « C'est pas vrai, faut faire la queue pour entrer ! Quelle chiote... ».



Je me m'exécute en ruminant le fait que Jean-Kev' ait attendu 1h du mat pour se rendre compte qu'il était trop bourré pour venir. Une voiture klaxonne pour passer dans la rue, la file d'attente se démarque du passage piéton, et j'en profite pour me glisser en son milieu de la même façon que les deux gonzesses devant moi. Leur geste est pute mais pas le mien, j'ai personne avec qui discuter. Je suis un peu la grand mère à Carrefour que tout le monde laisse passer à la caisse parce que c'est bien connu que les mémés ont la vie trop remplie pour s'attarder dans les supermarchés. Moi, j'ai le cercle d'amis trop vide pour traîner dans une file d'attente.

01h50 : J'arrive au passage fatidique. Les deux gonzesses de tout à l'heure se font refouler car elles n'ont pas de monnaie pour payer l'entrée. L'une d'elles demande si elles seront obligées de refaire toute la queue. Apparemment oui. Je constate avec horreur que je n'ai qu'un billet de vingt euros, mais je remballe mon effroi, mon portefeuille, et avance devant le guichet en mode « l'air de rien ».
Ca doit sûrement être mon jour de chance, après m'être fait rembarré le billet de vingt euros, je me la joue neuneu qui galère à compter ses centimes et la technique se révèle payante : Pressées de se débarrasser d'un boulet qui fait attendre tout le monde, les meufs du guichet larguent leur dernier billet de cinq euros en me disant que c'est parce que j'ai fait un effort. Gagné ! J'entre dans la salle en exultant, fier de mon subterfuge.



02h00 : C'est Ellen Allien qui est aux platines. Renseignements pris, Interlope vient de terminer son set. Fait chier, j'étais venu pour eux. Je me fraye un passage dans la masse de putes à franges et de mecs suintant le gel des cheveux pour me trouver une place convenable. Les deux mois passés en ermite à bosser mon mémoire le week end ont creusé un vide dans mes jambes, qui ne tarde pas à se combler en attaquant le dancefloor. Purée, j'aurai jamais cru que cela m'aurait fait tant de bien de me dépêtrer comme une vulgaire volaille.



03h00 : A ma surprise, Ellen Allien largue quelques morceaux teintés d'une pointe d'electronica, cool. Soudain, la musique se coupe et m'éjecte de la transe dans laquelle je m'étais plongé depuis au moins une heure. Tout le monde gueule, je pense tout de suite à un problème technique mais le son reprend. Bon, ça arrive à tout le monde de commettre une erreur, on ne lui en tiendra pas compte. Rebelotte, coupure. Je viens de comprendre que ce n'était pas un problème technique mais bien madame Allien qui s'amusait avec sa platine. Peut être ne s'est elle pas rendu compte que la musique qu'elle passait à ce moment là était bien trop touffue pour que son effet soit réussi. 3eme coupure. Décidément, c'en est trop pour le public. Des sifflements partent de parts et d'autres, pendant que certains balancent les bras en forme de non pour lui demander d'arrêter le carnage. Ellen Allien s'en excusera par un haussement d'épaules l'air de dire « ben quoi, j'ai bien le droit de m'amuser ». Au fur et à mesure, son set s'essouffle et devient super chiant, certaines transitions de morceau sont tellement ratées qu'on croirait entendre une débutante : Sans doute ce qui m'avait poussé l'année dernière à me barrer à la moitié de son set au NAME. Quant à celui du festival de Dour, on ne peut pas dire qu'il m'ait particulièrement marqué, mais c'était toujours moins pire que Miss Kittin. Je commence à croire que les djs femelles profitent de leur charisme pour asseoir un succès amplement pas mérité. Je chasse cette pensée de mon esprit sans trop de conviction. Le dj qui lui emboîte le pas arrive alors en véritable messie, sortant le public d'un emmerdement suprême en l'assenant de beats ravageurs. C'est décidé, j'irai vendredi au NAME plutôt que le samedi.



05h00 : Un type me tire une dread dans le dos. Pfff, je commence à en avoir marre de jouer à ça. C'est toujours la même chose. Je décide de l'ignorer et il recommencera jusqu'à ce que je devine qui est le comique du lot. Je me retourne trop vite et je ne le trouverai pas car c'est précisément le moment où il aura pris soin d'être le moins flagrant possible. Je décide donc d'attendre suffisamment longtemps pour qu'il commence à envisager de me retirer la dread et je me retourne. Un mec juste derrière moi feint de tourner la tête tout en dansant. Je le regarde un instant, mais il ne réagit pas. Je décide donc de lui sourire pour que mon geste ne soit pas vain. Il me regarde et m'envoie un « P'tain ! Comment t'as fait pour me griller ? » en rigolant. Je ne répond pas et retourne dans ma transe, en voilà un qui ne m'emmerdera plus. Une gonzesse à côté de moi danse de manière un peu extravagante pour attirer l'attention. En gros, elle balance un stimulus « je ne me prends pas au serieux, y'a t'il quelqu'un pour jouer avec moi ». Je n'y prête pas attention et continue ma transe. J'suis vraiment quelqu'un d'asociable sur le dancefloor mais bon, deux mois de manque, ça a besoin d'être satisfait sans qu'on m'interrompt toutes les deux secondes. Dix minutes plus tard, je la vois en train de simuler un pogo avec un mec : stimulus réussi.



06h00 : Je rentre chez moi, je rêve que j'annonce mon départ de stage prématuré à la directrice artistique de Naïve, et que celle-ci, pas bien emballée par ma décision, me rétorque d'écrire 4 copies sur ce qui m'a plu dans le stage. Pour mettre un peu de piment au truc, je me met en tête de raconter l'histoire d'un jeune réfugié libanais qui grandit, et devient directeur artistique d'Universal. Je sors du taff, et me rend dans un bistrot allemand pour ne pas me faire déranger pendant l'écriture. La serveuse vient me voir et, machinalement, je commande une bière afin de payer mon dû pour le squatte d'une de ses tables. En fait, elle n'était pas venue pour ça mais pour me faire tester sa spécialité d'alcool au viandox. Je goûte, c'est ignoble, j'essaie de lui faire croire que je trouve ça bon mais elle sourit car je mens trop mal. Putain, une heure et demi que je bosse et l'A&R m'appelle déjà. Je rentre avec mes deux feuilles : L' histoire s'interrompt au moment où le réfugié libanais doit faire face à la cruauté de la vie lorsque son père lui explique qu'il est obligé de tuer un agneau pour qu'ils puissent manger. Heureusement, mon pote Gaëtan a préparé les 4 copies pour moi. C'est cool de sa part, mais je me rend compte que j'aime pas ce qu'il a écrit. Je me réveille.




Tehanor

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